Face aux Gafa, Publicis dégaine l'IA Marcel

Face aux Gafa, Publicis dégaine l'IA Marcel Le groupe se donne un an pour développer un assistant intelligent capable de faire travailler ensemble ses 80 000 collaborateurs pour mieux répondre aux attentes des clients.

"Publicis doit passer du statut de holding à celui de plateforme", nous explique le nouveau président du directoire Arthur Sadoun, installé dans une suite du Majestic, hôtel où le groupe a pris ses quartiers pendant les Cannes Lions. L'acquisition de Sapient courant 2014 et la réorganisation de Publicis en quatre entités (Publicis Communication, Publicis Media, Publicis Sapient et Publicis Health) ont posé les jalons de cette transformation. Le lancement de sa plateforme Marcel (baptisée ainsi en l'honneur du fondateur du groupe, Marcel Bleustein-Blanchet) doit achever cette mutation.

Marcel est un des tous premiers projets du nouveau président du groupe, Arthur Sadoun. © Publicis Groupe

Attaqué sur beaucoup de ses métiers, par les cabinets de consulting mais aussi les Gafa, Publicis se devait de repenser son offre. "L'enjeu c'est de transformer le groupe en une organisation transversale et modulaire, ouverte aux clients et aux plateformes externes, avec en son cœur : la technologie", estime Arthur Sadoun. Au cœur du réacteur donc, cet assistant dopé à l'intelligence artificielle dont seuls le nom et le logo ont été pour l'instant arrêtés. Le groupe s'est donné un an pour concrétiser ce projet. La deadline ? L'édition 2018 du salon Vivatech. Si le projet est à l'état embryonnaire (le choix de l'intelligence artificielle qui l'équipera n'a même pas été arrêté), le groupe ne manque pas d'ambition. "Nous y consacrerons jusqu'à cette échéance l'ensemble des efforts et budgets de promotion du groupe", annonce Arthur Sadoun.

Marcel aura plusieurs objectifs. D'abord, valoriser les talents disséminés au sein des 80 000 collaborateurs du groupe en permettant, par exemple, à un créatif situé en Thaïlande de postuler à un brief commandé par un client US. "Marcel lui permettra de déclarer son intérêt pour certaines missions et se chargera de lui recommander celles qui lui semble le plus en ligne avec ses attentes et ses compétences." L'autre enjeu, c'est l'amélioration du partage des connaissances au sein du groupe en s'appuyant sur l'IA de Marcel pour améliorer la réponse donnée aux interrogations des clients. En bref, s'appuyer sur la data pour identifier des tendances qui touchent directement ses clients.

Marcel a donc deux objectifs. Il s'agit d'un côté de redorer le blason du groupe auprès de nouveaux talents dont les attentes en matière d'expérience de travail ont complètement changé. Le groupe subit de ce point de vue la concurrence plutôt rude de Gafa et autres start-up plus attractives quand se pose la question des conditions de travail. On observe, côté agences, une véritable fuite des talents depuis quelques années.

De l'autre côté, il s'agit de répondre aux exigences de clients qui ont besoin d'une palette toujours plus variée de compétences et de faciliter la mise en relation avec les experts du groupe. Ainsi un client de Publicis Media, la branche d'achat média du groupe, sera plus rapidement mis en relation avec les experts de la branche techno, Publicis Sapient, pour discuter machine learning ou big data. "On pourra aller même plus loin, s'enthousiasme Arthur Sadoun. On ne sera plus dans la réponse à un besoin client mais dans sa prédiction. La dimension prédictive de l'IA doit nous permettre d'avoir plusieurs coups d'avance."

L'outil est pour le moment un projet interne… Mais le groupe ne s'interdit pas de le proposer une fois qu'il aura fait ses preuves à ses propres clients. "Les premiers auxquels nous en avons parlés sont très enthousiastes", se félicite Arthur Sadoun. 

Marcel est un facilitateur pour les collaborateurs du groupe. Peut-on imaginer qu'il devienne, dans un futur proche, un collaborateur à part entière ? Une intelligence alimentée par une armée de data scientists qui se substitue à certains métiers traditionnels du groupe : planning stratégique, analystes, insights specialists…. "Nous n'en sommes pas là, assure Arthur Sadoun. Le but n'est pas de le substituer à certains métiers mais d'en faire un booster de compétence." Tout dépendra sans doute également de son efficacité, les projets d'IA de ce type tenant parfois du simple effet d'annonce. Rendez-vous dans un an.