JDN.
Avez-vous remarqué chez American Express une progression
du canal Internet par rapport aux autres canaux dans l'univers
des cartes ?
Benoît Gruet. Notre cible de clientèle sont
les 10 à 15 % de la population la plus aisée et sur
ce segment, près de 100 % de nos clients disposent
d'une connexion Internet en haut débit. Notre site Internet
est beaucoup consulté, nous avons enregistré une croissance
de 60 % de connexions en 2006.
Mais en termes de stratégie, depuis le début des années
2000, lorsque nous avons lancé le site americanexpress.fr,
nous n'avons pas traité Internet différemment des autres
canaux. Nous l'avons intégré dans l'éventail des modes
de contacts d'acquisition de clientèle, au même titre
qu'un envoi de courrier couplé à un appel de télémarketing,
de la vente directe en face à face ou via nos stands
dans les aéroports par exemple. Toutefois, il est vrai
qu'Internet offre des avantages certains également en
ce qui concerne la relation avec les titulaires de carte
et les établissements qui acceptent nos cartes, grâce
à la réactivité et aux possibilités de traçabilité liées
à ce canal.
En
matière de recrutement, quelle part représente le Web
désormais pour American Express ?
Internet représente une part non négligeable de l'ordre
de 15 à 20 % des acquisitions. Même si cette part
peut paraître modeste en comparaison avec les marchés
anglo-saxons, elle est due à des raisons d'ordre pratique :
le cadre réglementaire français impose aux consommateurs
d'envoyer un ensemble de documents, comme un RIB et
une photocopie de la carte d'identité tandis que dans
les marchés anglo-saxons, il est possible de souscrire
une offre de carte sans présenter de justificatifs.
Le processus de souscription à une carte en France ne
peut donc pas être uniquement effectué en online. C'est
pourquoi nous multiplions les formules pour optimiser
ce processus de souscription, via des dossiers envoyés
par la poste pré-remplis avec les informations entrées
directement en ligne par l'internaute, afin de faciliter
la concrétisation des demandes de souscription. Nous
constatons par ailleurs que si la volumétrie de recrutement
en ligne est moins importante que par les canaux traditionnels,
elle est cependant d'excellente qualité. Un point crucial
dans le monde du paiement : l'enjeu pour nous consiste
à recruter les bons profils, c'est-à-dire des personnes
qui ne multiplient pas les moyens de paiement, ou cherchent
à réaliser des fraudes.
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Nos
newsletters enregistrent des taux d'ouvertures
de 60 à 80 %." |
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Qu'en est-il de l'utilisation
d'Internet dans la gestion de la relation clients et partenaires ?
La force d'American Express réside dans cette relation
unique que nous entretenons d'une part avec les titulaires
de nos cartes, et d'autre part avec les établissements
acceptant la carte American Express. Les actions que nous
menons via des mailings clients ont été appliquées depuis
environ deux ans au online, par le biais de e-newsletters
qui sont totalement intégrées dans la communication. Ces
campagnes d'e-mailing enregistrent un très bon accueil,
avec des taux d'ouverture de 60 à 80 %.
L'e-mailing nous permet de réaliser des envois extrêmement
ciblés, sur des segments plus réduits. Ce point est crucial,
car nous ne voulons pas que ces e-newsletters soient perçues
comme du "spamming", et c'est pourquoi nous surveillons
les fréquences d'envois. Mais à partir du moment où l'offre
correspond aux attentes des clients, les e-newsletters
mettant en avant des offres promotionnelles d'établissements
partenaires ne sont pas perçues comme dérangeantes. Nous
analysons ensuite les retours, pour déterminer les types
d'offres aux différents profils, et rester en affinité
avec les attentes.
Sur ce point, le monde bancaire
dispose d'un avantage indéniable : vous devez avoir
accès à un ensemble d'informations qui vous permet de
connaître précisément le profil de votre clientèle ?
Nous avons en effet plusieurs clés de sélection :
tout d'abord, la couleur de la carte correspond très exactement
à des comportements de consommation, car le titulaire
choisit une carte et des services associés, et monte en
gamme en fonction de ses besoins. De notre côté, nous
réalisons une segmentation de l'offre commerciale en fonction
des cartes, à savoir Gold, Platinum et Centurion. Nous
pouvons ensuite appliquer des filtres géographiques et
par industrie, c'est-à-dire par domaine d'activité, en
fonction de la nature des dépenses réalisées.
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La
couleur de la carte, la localisation, la nature
des dépenses sont des clés de
sélection." |
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En revanche, je ne pense pas que le monde bancaire classique
atteigne ce niveau de connaissance de leur clientèle.
Les émetteurs de cartes doivent avoir accès à cette information,
mais ils n'ont pas de relation en direct avec les clients.
A contrario, en contrepartie d'un supplément du coût de
la commission prélevée, notre modèle réside dans le fait
que nous offrons un moyen de paiement associé à un outil
marketing, s'appuyant sur notre capacité à promouvoir
l'activité des établissements qui acceptent notre carte.
Et cette animation de l'offre
de vos partenaires, vous la proposez tant dans le monde
physique que sur le Web. Vous avez notamment réalisé des
opérations particulières avec Chateauonline. Pouvez-vous
préciser votre approche ?
Oui, nos établissements partnaires sont des acteurs du
monde physique uniquement, ou à la fois dans le monde
physique et sur Internet, ou des pure players, mais la
relation reste la même. Avec Chateauonline, nous avons
lancé depuis quelques temps déjà une offre pilote qui
permet aux clients d'accéder depuis une e-newsletter à
des offres privilèges, définies en fonction de la couleur
de leur carte, directement dans des pages cachées sur
le site de notre partenaire. Le filtre du paiement par
carte American Express s'applique ensuite pour garantir
que l'offre est exclusivement réservée à nos clients.
Pensez-vous étendre ce modèle
commercial plus largement ?
Oui, nous sommes en discussion avec d'autres partenaires,
car même si cela impose un certain travail de la part
du partenaire qui héberge et anime ces pages, le modèle
s'est avéré efficace, et lui offre une augmentation du
chiffre d'affaires. D'autre part, nous souhaitons élargir
ces offres Internet au-delà des tarifs préférentiels.
Si le monde Internet était à ses débuts très centrés sur
le prix, aujourd'hui le principe de l'accès privilégié
à des offres commence également à intéresser les internautes.
En décembre 2005, nous avons par exemple réalisé une opération
importante autour du concert des Rolling Stones :
nous avons pu proposer d'accéder à la billetterie sur
le site de Ticketnet, avant que les réservations ne soient
ouvertes en France au grand public. Nous souhaitons donc
renforcer ce type d'opérations de pré-vente.
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Le
principe des ventes privées en ligne
ne nous échappe pas." |
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Vous comptez également surfer
sur la vague des ventes privées en ligne ?
Le modèle online des ventes privées qui s'impose rapidement,
ne nous échappe pas, car nous sommes justement positionnés
dans cet univers. Nous avons des discussions très avancées
avec des sociétés spécialisées dans le monde de la vente
privée, mais également avec des marques qui souhaitent
toucher une clientèle très ciblée. Car nous n'avons pas
vocation à être grand public, et les volumétries de nos
cartes premium rassurent ces marques.
Investissez-vous également
pour la promotion de ces offres partenaires sur votre
propre site Web ?
Nous constatons de notre côté, une évolution des canaux :
les titulaires souhaitent réaliser beaucoup de transactions
en ligne, et c'est pourquoi nous travaillons pour offrir
un maximum de services sur notre site. La possibilité
pour nos clients de téléphoner pour utiliser leurs points
de fidélité accumulés en fonction du volume d'achat réalisés
avec la carte est un système cher à American Express.
Toutefois, depuis 2005, nous avons également mis en ligne
notre guide Membership Rewards qui rassemble toutes les
offres qui leur sont proposées dans le cadre de ce programme
de fidélité. Et pour Noël 2006, nous offrons désormais
la possibilité de réaliser des échanges de points pour
acquérir les produits offerts.
D'autre part, nous avons investi en termes de communication
pour accroître la notoriété de notre programme "Selects",
via une stratégie de communication de 'drive to Web' dans
les newsletters print, ou sur les relevés de compte papier.
Ce programme a pour vocation l'animation de notre base
clients pour créer du trafic vers les offres de nos partenaires,
comme Galeries Layette, Fnac
Depuis 2004, il est donc
possible de consulter les offres internationales en temps
réel. Un moteur de recherche par destination, puis thème
(restaurant
) permet de visualiser l'ensemble des offres
et permet même d'imprimer un coupon pour recevoir en cadeau
par exemple une bouteille de champagne lorsque le titulaire
se présente dans le restaurant. Et pour les offres Internet,
des codes privilèges sont fournis aux clients. Ce programme
est aujourd'hui bien installé, et monte rapidement en
puissance. Nous analysons bien entendu le niveau de fréquentation,
de clics sur l'offre, de concrétisation afin de réaliser
une sélection des offres les plus pertinentes.
Réfléchissez-vous également
à avancer vers de la personnalisation, du marketing one-to-one
sur votre site ?
C'est un sujet d'intérêt essentiel. Toutefois, nous
prenons beaucoup de précautions, car dès lors que cela
touche à des zones sécurisées, une fois que le titulaire
d'une carte a entré son mot de passe et son login, c'est
la sécurité qui prime avant tout. De fait, la marge
de manuvre pour pousser des offres commerciales dans
ces zones est plus limitée. De leur côté, les clients
préfèrent une communication épurée et la moins parasitée
possible. Mais bien sûr, nous suivons de près les résultats
de ce qui se fait aux Etats-Unis.
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