INTERVIEW 
 
Munjal Shah
Fondateur
Riya
Munjal Shah
"Le plus dur, c'est de recruter des gens compétents"
Chaque jour pendant une semaine, le Journal du Net interroge un pionnier américain du Web 2.0. Aujourd'hui, le fondateur de Riya nous parle de son service basé sur la reconnaissance visuelle, et de ses projets de moteur de recherche.
(23/10/2006)
 
JDN. Comment vous est venue l'idée de créer Riya ?
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Riya
Munjal Shah. Ma famille prend énormément de photos et je m'occupais de les classer. En tout, il y en avait 32.000 et c'était une sacrée tâche ! Je cherchais donc un moyen pour faire de la recherche automatique dans ces fichiers, et j'ai pensé à la reconnaissance faciale, c'est-à-dire utiliser l'informatique pour regarder à l'intérieur des photos. Après une année de développement, nous avons une technologie qui permet de "tagger" un visage et de pouvoir ensuite retrouver les photos où figure cette même personne.

D'où vient le nom "Riya" ?
Le projet s'appelait au départ "Ojos", "oeil" en espagnol. Nous avons changé pour Riya, un prénom très commun en Inde, que porte la fille de l'un de nos co-fondateurs. Il se trouve que cette petite Riya a été gravement malade et nous avons voulu rendre hommage à son courage.

Que faisiez-vous avant Riya ?
Riya est la deuxième société que nous avons créée avec les deux autres co-fondateurs. La première est Andale, née en 1999 et revendue en 2004. Elle développait des logiciels pour aider les vendeurs sur eBay.

Vous n'avez donc pas eu de difficultés à convaincre des investisseurs ?
Non. Nous avons d'abord levé 4 millions de dollars en septembre 2005 puis 15 millions en janvier 2006 auprès de capital-risqueurs. Je crois que notre technologie unique a suscité l'intérêt et une certaine excitation autour de Riya. Y compris de la part de Google, avec qui nous avons été en discussion pour un rachat. Plus que de lever des fonds, le plus dur a été de recruter des gens compétents car il y a une énorme compétition dans la [Silicon] Valley dans ce domaine. Nous avons finalement réussi a convaincre une dizaine de Ph.D [doctorants, Ndlr].

Nous avons été en discussion avec Google pour un rachat"
Vous annoncez un nouveau service de "moteur de recherche visuel". De quoi s'agit-il ?
Les moteurs de recherche d'images comme ceux de Google ou de Yahoo ne recherchent que linguistiquement, c'est-à-dire les textes autour de la photo. Ils ne regardent pas dans la photo. Or cette méthode est limitée car on ne peut jamais décrire parfaitement une photo, et plusieurs personnes utiliseront des mots différents. Notre moteur de recherche Web utilisera une technologie reconnaissant les similarités. Je ne veux pas en dire plus car nous détaillerons le mois prochain notre stratégie, mais il s'agira dans un premier temps de reconnaissance de produits, permettant de trouver par exemple des produits semblables sur différents sites .

Pourquoi ce changement de stratégie ?
Nous nous sommes rendus compte que rechercher ses propres photos sur son ordinateur était intéressant, mais que les gens ne le font pas chaque jour, contrairement à la recherche sur le Web. C'est une activité beaucoup plus forte, avec un modèle économique précis. Ce service ne s'appellera pas Riya, mais ce ne sera pas non plus le nom de la fille de l'un de nos salariés !

Quelle est votre définition du Web 2.0 ?
C'est une seconde version, améliorée, de sites ou services qui existaient déjà le plus souvent. Comme par exemple Riya par rapport à Google Vidéo. La forme et la "diffusion" sont différentes, mais surtout, il s'agit de services qui fonctionnent !

L'engouement pour ces projets 2.0 fait craindre à certains une nouvelle bulle, et la disparition de nombreuses sociétés actuelles. Qu'en pensez-vous ?
Peut-être, mais c'est juste la théorie de l'évolution de Darwin. Lors de la dernière bulle, les sociétés qui ont survécu étaient les meilleures. Ce sera la même chose. Oui, une sélection va se faire, mais c'est cela le business. A la différence que tout le monde sait qu'il y a eu une première bulle. Les entrepreneurs et les investisseurs s'en souviennent et ne feront peut-être pas les mêmes erreurs.

la plupart des entrepreneurs du Web 2.0 étaient déjà entrepreneurs du Web 1.0 "
Vous trouvez les capital-risqueurs plus prudents ?
Mais le capital-risque a un modèle économique très différent de celui des entreprises ! Sur dix financements de sociétés, ils n'ont besoin que d'un gros succès. Il est donc naturel qu'ils prennent des risques. Ce facteur est d'ailleurs très important pour que la Valley reste un endroit unique au monde où l'innovation est très forte.

Etes-vous proches d'autres Web entrepreneurs ?
Oui, de beaucoup. J'ai d'ailleurs constaté que la plupart des entrepreneurs du Web 2.0 étaient déjà entrepreneurs du Web 1.0, même si leurs entreprises n'ont pas toujours été couronnées de succès. Je connais par exemple Karl Jacob, qui dirige aujourd'hui Wallop, le réseau social de Microsoft, et qui a fondé plusieurs sociétés dont Cloudmark. Il y a aussi Naval Ravikant, à l'origine du comparateur de prix Epinions, racheté par la suite par Shopping.com, et qui a lancé Vast, un moteur de recherche de petites annonces.

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Connaissez-vous des sites Web 2.0 français ?
Malheureusement non, je ne lis pas le français ! Mais je sais que la proportion de blogs y est très importante, plus grande qu'aux Etats-Unis. C'est une condition favorable au développement de projets innovants en France, car je pense qu'une grande partie du trafic vers les sites Web 2.0 vient des blogueurs.
 
 
Propos recueillis par Baptiste RUBAT du MERAC, JDN

PARCOURS
 
 
Munjal Shah est diplômé en informatique de l'université de Stanford. Il a travaillé chez Baan, IBM et Blaxxun, avant de fonder en 1999 Andale, vendu en 2004. Il est également à l'origine de Round Zero, un forum d'entrepreneurs.

   
 
 
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