INTERVIEW 
 
Alain Bazot
Président de L'Union Fédérale des Consommateurs et directeur des publications Que Choisir
Alain Bazot (UFC-Que Choisir)
"La portabilité du numéro est le prochain cheval de bataille de l'UFC-Que Choisir"
Doyenne des associations de consommateurs en France, l'Union fédérale de la consommation a été créée en 1951. Son président, Alain Bazot, revient sur la part croissante du secteur des nouvelles technologies dans la défense des consommateurs.
(04/08/2004)
 
JDN. L'UFC-Que Choisir prend régulièrement position sur des thèmes liés aux nouvelles technologies de l'information et de la communication. Que représente ce secteur pour votre association ?
  En savoir plus
Dossiers
Téléphonie et Internet
Premium
  Le site
L'UFC-Que Choisir
Alain Bazot. L'enjeu est majeur puisque bon nombre de problématiques de consommation passent par Internet. L'UFC-Que Choisir se doit de suivre l'évolution des habitudes de consommations des gens. Or, dans le budget des ménages, les nouvelles technologies occupent une part croissante. On observe de ce fait une augmentation du nombre de litiges liés à l'Internet ou à la téléphonie. Ce secteur est donc devenu tout naturellement l'une de nos priorités.

Quelles sont les thématiques liées aux NTIC qui retiennent tout particulièrement l'attention de l'UFC-Que Choisir ?
Le secteur des NTIC a révolutionné la vie du consommateur dans trois domaines principaux : le commerce, la communication institutionnelle et le lien juridique. Par exemple, en matière d'e-commerce, l'un de nos premiers combats a été de d'instaurer un lien contractuel entre les photos en ligne d'un produit et le produit lui-même, afin que les consommateurs achètent bien ce qu'ils ont vu et non un tout autre produit.

Quels sont les moyens de réaction et d'action de l'Union des consommateurs ?

L'UFC est organisée en département et en commissions de travail. Nous avons une commission appelée "commerce et nouvelles technologies" qui s'occupe des thématiques liées aux NTIC. Au sein de ces commissions, nous développons deux sortes d'expertise : une expertise juridique, liée aux problèmes de contrats et qui peut déboucher sur une plainte auprès des instances judiciaires, et une expertise économique liée aux problèmes de prix, de tarifs et de droit de la concurrence. Le combat de l'UFC-Que Choisir sur la baisse du prix des prix des SMS fait suite à une expertise en interne du marché pertinent des messages courts.

L'UFC-Que Choisir s'est souvent vue reprocher de n'être pas assez réactive sur les problèmes liés à l'actualité des nouvelles technologies...
La critique n'est pas infondée. Il est vrai que nous sommes un peu long à l'UFC-Que Choisir. C'est avant tout un problème de logistique. Les thématiques liées à l'Internet et aux nouvelles technologies prennent, certes, une part croissante dans nos préoccupations, mais elles n'ont pas détrôné les problématiques classiques. Elles viennent se surajouter. Pour le moment, nous n'avons pas de commission entièrement dédiée aux NTIC car nous n'en n'avons pas les moyens. En outre, avant chaque prise de position de l'Union des consommateurs, nous développons une expertise en interne afin de rendre un jugement exhaustif. Tout cela peut prendre du temps. Cependant, je crois que nous avons prouvé notre capacité de lancer le débat et d'influencer les pouvoirs publics, notammment avec l'affaire des SMS et les services de météo payante sur Internet [lire l'article du 23/07/04, ndlr].

Quels sont les problématiques sur lesquelles travaille actuellement la commission "nouvelles technologies" ?
Il m'est difficile de vous en parler avant le lancement d'une procédure. Toutefois, je peux vous dévoiler que le marché libéralisé de la téléphonie est notre prochain cheval de bataille. Nous avons remarqué qu'il existe de nombreux freins au changement d'opérateur de téléphonie mobile. Changer d'opérateur, et donc de numéro, c'est long et compliqué. Nous allons très prochainement monter au créneau sur la portabilité du numéro et engager une action auprès de l'ART.

L'ART n'est jamais monté au créneau dans l'intérêt du consommateur."
Quel jugement portez-vous sur l'Autorité de régulation des télécoms ?
L'ART n'a pas su encore véritablement affirmer son indépendance. Elle est coincée entre le gouvernement et les opérateurs, qui exercent un lobbying tout à leur avantage. L'Autorité n'est jamais monté au créneau de façon forte pour défendre l'intérêt du consommateur. Elle régule selon une logique de politique industrielle et non pour le consommateur.

L'outil Internet a-t-il changé la donne dans la gestion des plaintes et dans la genèse d'une prise de position de l'UFC ?
Les plaintes proviennent essentiellement de notre réseau d'association locales. Lorsqu'une thématique revient en force, la machine de l'UFC-Que Choisir se met en branle à l'échelon national, ce qui peut déboucher sur une action auprès des pouvoirs publics. La création de notre site il y a cinq ans a généré une augmentation du nombre de plaintes déposées. Cependant, notre politique est de limiter au maximum les plaintes en ligne et de rediriger les consommateurs vers une association locale. En revanche, l'outil Internet nous permet de développer des forums, biens cadrés, afin de cerner l'état d'esprit des consommateurs sur certains sujets qui nous étudions. Internet nous ouvre des perspectives immenses en terme d'action.

Par exemple ?
Les internautes constituent une nouvelle catégorie de sympathisants à l'UFC-Que Choisir. Le meilleur exemple est celui de la journée nationale de boycott des SMS. Nous avons lancé l'appel sur notre site, et cela a tout de suite pris des dimensions inespérées. On peut parler d'un effet viral. L'appel au boycott a très rapidement été relayé par de nombreuses communautés d'internautes. Plus d'un million de messages ont été envoyés par transmission d'e-mails.

Ne pensez-vous pas que les communautés d'internautes suppléent les associations de consommateurs plus traditionnelles comme l'UFC-Que Choisir ?
Non, ces communautés ont un rôle important, mais elles ne substituent pas à une association de défense des consommateurs. L'objectif de l'UFC n'est pas uniquement de faire naître un débat : Il faut également le suivre et le mener à terme. Le lobbying exige toute une logistique, c'est long. Les communautés d'internautes ne sont donc pas un concurrent pour nous. En revanche, elles tiennent un rôle essentiel dans l'alimentation du débat et la médiatisation des problématiques soulevées.

Quels sont les autres thèmes liés à l'Internet ou aux NTIC plus généralement qui retiennent l'attention de l'UFC-Que Choisir ?
La transparence tarifaire est l'une de nos priorités. La multiplication des offres téléphoniques couplées avec Internet, ainsi que l'arrivée sur le marché d'opérateurs alternatifs soulèvent de plus en plus de problèmes pour le consommateur. Mais agir demande réflexion. La téléphonie suscite deux sortes de problèmes. Un problème de forme, lié à la facturation, et un problème de fond sur le contenu des offres.Par exemple, nous avons obtenu de la plupart des opérateurs qu'ils proposent des tarification à la seconde, clause qui n'était pas incluse dans les contrats auparavant. Concernant les nouvelles offres de VoIP, nous les surveillons, mais pour le moment nous sommes en stand-by. Cela vaut également pour les services.

  En savoir plus
Dossiers
Téléphonie et Internet
Premium
  Le site
L'UFC-Que Choisir
Etes-vous concernés par le services premium ?
Oui, sans aucun doute, le thème des services payants en ligne est inscrit sur la liste des problèmes à étudier. Nous avons reçu de nombreuses plaintes de consommateurs qui se sont sentis floués par certains services premium, notamment certains jeux en ligne. Mais là encore, il nous faut développer une expertise plus poussée.
 
 
Propos recueillis par Emilie LEVEQUE, JDN

PARCOURS
 
 
Alain Bazot, 45 ans, ets président de l'UFC-Que Choisir depuis mai 2003.

En 1977, Alain Bazot adhérait à l'association locale des consommateurs de Bourgogne. Jeune étudiant en droit, il est entré à l'UFC pour régler des litiges.

Devenu rapidement président de l'UFC Bourgogne, Alain Bazot a progressivement gravi les échelons dans la hiérarchie au niveau local, régional puis national. Aujourd'hui président de l'UFC-Que Choisir et directeur des publication du groupe, il exerce cette fonction à titre de bénévole. Il exerce le métier de professeur de droit public à l'université de Bourgogne.

Et aussi Alain Bazot est conseiller municipal de son village de Bourgogne.

   
 
 
  Nouvelles offres d'emploi   sur Emploi Center
Chaine Parlementaire Public Sénat | Michael Page Interim | 1000MERCIS | Mediabrands | Michael Page International