INTERVIEW 
 
Didier Cornardeau
Président
Appac
Didier Cornardeau
"Internet devrait faciliter le décryptage des comptes des sociétés mais ce n'est pas le cas"
L'association des petits porteurs actifs (APPAC), connue pour son face-à-face avec Vivendi Universal, se montre virulente vis-à-vis des pratiques de communication financière des grands groupes. Elle réclame davantage de repères communs et synthétiques en ligne.
(12/05/2004)
 
JDN. Dans quelle mesure l'Internet facilite la circulation de l'information financière ?
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Didier Cornardeau. Internet est le seul outil capable de transmettre en temps réel les documents dont nous avons besoin en tant qu'investisseur. Toutefois, il est de moins en moins utilisé à bon escient car nous assistons à un revirement de la stratégie de communication des grands groupes : il y a quelques années, ils disaient tout, voire beaucoup trop de choses. Maintenant, ils ne communiquent plus du tout pour éviter les critiques. Dans la pratique, nous rencontrons des difficultés avec des grands groupes comme Vivendi Universal ou Veolia. Ils omettent de nous transmettre des documents financiers que nous réclamons en toute légitimité. Par exemple, nous attendons toujours une plaquette pour l'assemblée générale de Veolia qui se tiendra le 12 mai [Interview réalisée le 4 mai, ndlr].

Pourtant, les groupes cotés au Cac 40 font des efforts en terme de communication financière en ligne. Ils ont mis en place des espaces "actionnaires" et/ou "investisseurs" sur leurs sites avec des boîtes mail dédiées...
Oui, c'est la version présentée par les groupes. Je vais prendre comme exemple le site de Vivendi Universal qui abrite un communiqué de presse évoquant une procédure judiciaire à l'encontre de l'avocat de l'Appac. De notre côté, je peux vous assurer que nous n'avons pas reçu de plainte dans ce sens. Le pouvoir de l'information qu'exerce les entreprises est important. Mais cela va dans les deux sens. Il faut reconnaître que nous l'utilisons également, notamment en communiquant avec les représentants de la presse.

Que recommandez-vous aux adhérents de l'Appac concernant la communication financière ?
Nous leur recommandons de ne pas prendre à la lettre les documents financiers disponibles sur les sites pour éviter la désinformation. Il est nécessaire pour les investisseurs de recouper les éléments par diverses sources d'informations. Nous sommes en faveur d'une diffusion claire de l'information financière lisible sous forme de tableaux et de graphiques, qui permet au profane petit porteur d'effectuer un décryptage facile.

Utilisez-vous Internet pour communiquer avec les adhérents de l'Appac ? Nous enregistrons 4.000 adhérents de l'Appac. Nous avons une lettre papier trimestrielle à destination des actionnaires membres et nous entretenons des correspondances par mail. Nous avions un site Appac pour discuter entre nous. Mais nous avons arrêté l'espace forum car la qualité des discussions se dégrade rapidement et cela finit dans la mélasse. Afin de préserver notre image, nous avons stoppé ce fil de discussion.

Du coup, quels services Internet de bourse utilisez-vous pour discuter entre investisseurs et vous informer ?
Nous discutons beaucoup sur le portail Boursorama.com et nous évitons de nous étendre sur le site de Nicolas Miguet [qui exploite Bourse.fr en lien avec son hebdomadaire Bourse Plus, ndlr]. Boursorama rencontre des problèmes également avec ses forums. Le portail boursier m'a rappelé à l'ordre car il souhaitait que je ne laisse plus mes coordonnées sur ses forums. J'ai accepté de le faire à condition que tous les participants respectent cette règle.

La vision se brouille avec la multiplication des critères financiers spécifiques."
Selon vous, quelles sont les limites de l'exercice de la transparence des comptes des entreprises ?
Mais, lorsqu'il y a profusion d'informations financières avec des critères spécifiques pour présenter ses résultats, la vision se brouille. Il est nécessaire d'instaurer des critères et des chartes de présentation en commun. On a l'impression que nous parlons pas le même langage. Qui peut m'expliquer de manière claire la notion d'Ebitda (Earning before interest tax depreciation and amortization) ? Ce critère existe dans la règlementation américaine. La COB (Commission des opérations de Bourse, intégrée dorénavant dans l'Autorité des marchés financiers, AMF) a laissé les sociétés françaises communiquer sur ce critère. Mais la notion d'Ebitda, vue par les groupes français, diffère de la version américaine.

Que pensez-vous du rôle de l'AMF dans la chaîne de diffusion de l'information financière ?
Mon souci principal est de savoir s'il existe réellement un gendarme de la bourse en France. La COB est au centre du scandale dans les enquêtes portant sur les comptes de Vivendi Universal. Et l'instauration de l'AMF n'a pas réglé les problèmes de fond. Que l'Etat donne un coup de balai dans ses services boursiers et financiers !

Dans votre portefeuille personnel, avez-vous beaucoup de valeurs Internet et télécom ?
J'en ai beaucoup. Par exemple, du Wanadoo, du Orange et du France Télécom.

Vous étiez favorable à l'intégration de Wanadoo et Orange dans la maison-mère France Télécom ?
Oui. Le produit est très bon. De toute façon, nous n'aurions jamais récupéré notre argent avec trois structures distinctes. D'ailleurs, Thierry Breton a contacté l'Appac avant de procéder aux opérations d'offres publiques de rachats de titres. Le PDG de France Télécom souhaitait demander notre avis sur le sujet. Ces discussions informelles sont une technique qui permet d'apaiser les polémiques publiques lors des assemblées générales des groupes.

Avez-vous acheté des actions du groupe Iliad lors de son introduction en bourse en février ?
Non mais cela ne veut pas dire que je ne suis pas intéressé. Je ne peux pas investir dans tout. Cela fait quatre ans que je pratique la bourse. J'ai récupéré mes pertes au bout du compte mais j'ai eu chaud. Par exemple, pour le cas de Vivendi, j'ai acheté 500.000 francs (environ 76.000 euros) de titres cotés à l'époque 27 euros. Au final, je n'ai perdu que 50.000 francs (environ 7.600 euros). Mais ce sont des risques inhérents à la bourse. Mais, comme dirait le Premier ministre Jean-Pierre Raffarin à son arrivée à Matignon, la bourse ne doit pas devenir un casino. Le problème de fond, c'est la confiance à rétablir.

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Quel est votre service financier en ligne favori ?
Le plus lisible reste Boursorama.com. Je consulte aussi Boursier.com parfois.

Utilisez-vous un service de courtage en ligne ?
Oui. Là aussi, je diversifie les outils qui sont mis à ma disposition. C'est plus rapide et les agences des réseaux bancaires n'ont pas la culture de la bourse.
 
 
Propos recueillis par Philippe GUERRIER, JDN

PARCOURS
 
 
Didier Cornardeau, 54 ans, diplômé d'une maîtrise de droit et d'études supérieures notariales (D.E.S.S.N.).

1979-1986 : Premier clerc de notaire. Etude de Maître Zenati, notaire à Clamart (92).

1987-1988 :
Responsable des services juridique et immobilier des sociétés Immobilière de l'Allier (gestion du patrimoine immobilier du groupe Perrier) et Compagnie Fermière de Vichy (gestion des thermes).
Administrateur et Gestionnaire de la S.A. Du Grand Casino de Vichy. Administrateur et Responsable des activités de la S.A. d'Exploitation d'Hôtels et du Casino du Grand Café de Vichy.

1989 :
Directeur général de la S.A. Thermalium

1991-2001
: Directeur juridique et contentieux des sociétés Sodecco (financement) et Baticentre (crédit bail), deux filiales du groupe C.I.C.

2001-2002. Responsable juridique du Groupe Georges V - Nexity

2002-2004. Président de l'association APPAC, association de défense d'actionnaires minoritaires

2004. Membre du Conseil de Surveillance d'EFI (Europe Finance Industrie)

   
 
 
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