JDNet. Zebank a été lancée en février
dernier. Quel bilan tirez-vous après ces quatre
premiers mois d'activité ?
Philippe Jaffré.
Je crois
que l'on peut parler d'un succès commercial et
technique. Au 30 juin, nous allons atteindre 17.000
clients inscrits pour 35.000 comptes ouverts, le tout
avec un encours moyen de 4.000 euros par client. Nous
sommes donc en ligne pour atteindre notre objectif de
60.000 clients inscrits sur la première année
d'exercice. En ce moment, nous ouvrons quotidiennement
800 comptes pour 400 nouveaux clients par jour.
Comment
se caractérise aujourd'hui la clientèle
de Zebank ?
A
ce jour, les deux tiers de nos clients sont dans la
tranche d'âge des 25-49 ans. 44% sont des cadres
et 22% des étudiants. Nous sommes donc sur une
cible très dynamique et plutôt urbaine.
Un autre paramètre est également assez
remarquable : 17% des clients de Zebank n'utilisent
ni le mail ni le Web et s'appuient donc entièrement
sur le téléphone.
Quel
est l'objectif de rentabilité pour Zebank ?
Nous
restons sur la même projection, c'est-à-dire
260.000 clients inscrits à l'horizon 2004. Avec
nos 17.000 clients actuels, nous sommes sur le bon rythme.
Pour
atteindre cet objectif, Zebank va-t-elle continuer à
multiplier les opérations marketing, à
l'image des partenariats Amazon, Telemarket et bientôt
Shell ?
En
terme de communication, nous avons atteint notre premier
objectif : faire de Zebank une marque établie.
Maintenant, il s'agit de montrer les différents
avantages de Zebank en proposant des offres très
variables et renouvelées régulièrement.
Il faut être inventif dans le marketing. Pour
cette raison, nous avons décidé d'être
aussi bien présents dans les universités
que dans les stations services.
Nous croyons également beaucoup dans le bouche
à oreille. 10% de nos clients arrivent ainsi
grâce à notre opération de parrainage.
Certaines
banques traditionnelles soulignent régulièrement
que le modèle 100% Internet n'est économiquement
pas viable en raison des coûts marketing et des
taux proposés. Que cela vous inspire-t-il ?
C'est
une réaction assez humaine, le fameux "cela
ne marchera jamais". Ces mêmes banques expliquaient
il y a un an que techniquement, une banque en ligne
était impossible à mettre en place. Elles
se sont trompées. Puis, il y a six mois, elles
expliquaient que les banques en ligne n'auraient jamais
de clients. Elles se sont encore trompées. Maintenant,
elles s'attaquent à la rentabilité...
Quels
rapports entretenez-vous avec Dexia, qui dispose de
20% du capital de Zebank ?
Les
rapports sont extrêmement bons. Dexia a apporté
beaucoup d'expertise pour la mise en place de Zebank.
C'est aussi un partenaire très fort qui crédibilise
notre offre à la fois vis à vis de la
clientèle, du monde bancaire et des autorités
de tutelle. Dans le même temps, cette participation
permet à Dexia d'avoir un oeil sur les développements
Internet dans le monde bancaire.
Parmi
les concurrents de Zebank, ING et Bipop ont relevé
leur taux ces derniers mois. Allez-vous surenchérir ?
Le taux de 5,10% garanti que nous proposons nous
permet de gagner de l'argent. Nous ne voulons pas entrer
dans une compétition effrénée pour mettre au
point une simple offensive marketing. Mais il y a un
autre aspect à prendre en compte : ce qui
est scandaleux aujourd'hui, ce n'est pas le fait que
les banques en ligne proposent des taux supérieurs
à 5% mais que les
Livrets A soient rémunérés
à 3,5%.
En
décembre dernier, vous avez également
repris la présidence d'Europ@web. Quel vision
portez-vous sur son portefeuille ?
Le
portefeuille d'Europ@web est très riche. Il y
a des sociétés plus ou moins matures,
certaines étant encore en cours de développement.
Pour elles, cela reste parfois très difficile
de se construire, de savoir gérer à la
fois les ressources humaines, l'administratif et le
commercial. Surtout dans une période où
les financements sont plus délicats à
obtenir. Cela implique donc des arbitrages.
Et
selon quels principes ?
Il
y a tout d'abord des modèles qui démontrent
leur limite, soit parce que les coûts de production
sont trop importants, soit parce le modèle même
n'est pas viable. Je pense notamment aux places de marché
ou aux activités entièrement dépendantes
des ressources publicitaires. Aujourd'hui, l'Internet
se structure et ne peut supporter que des projets à
la rentabilité certaine.
A
quel horizon fixez-vous cette rentabilité pour
les participations Europ@web ?
Au
maximum sur un horizon de deux à trois ans.
Souhaitez-vous
privilégier les investissements technologiques
au sein du portefeuille ?
Le
plus important reste la viabilité du modèle
et le fait de se placer dans un investissement dans
la durée. Dans cette logique, les contenus et
les services peuvent également trouver une véritable
valeur ajoutée.
La
qualité des managers est souvent montrée
du doigt parmi la première génération
de start-up. Dressez-vous le même constat ?
Je
respecte énormément les chefs d'entreprises,
ceux qui ont été capables de créer
des sociétés. Ces créateurs ont
souvent affronté des milliers de problèmes
à la fois avec un véritable dynamisme.
C'est une expérience très enrichissante
mais dans laquelle il n'est pas toujours facile de savoir
manager.
En
mars, vous avez cédé certaines participations
à Vivendi Universal. Comment se sont déroulées
les négociations ?
Elles se sont très
bien déroulées. Ce sont des participations
qui intéressaient Vivendi Universal pour ses
propres activités multimédia
et pour certaines perspectives d'intégration.
Financièrement, ces cessions ont été
extrêmement rentables pour Europ@web.
Comment
fonctionne le tandem Europ@web-Suez ?
Suez
dispose aujourd'hui de 18% du capital d'Europ@web suite
à l'abandon de la licence UMTS. Y retourneront-ils
? Je ne le sais pas, mais cette participation leur permet
en tout cas d'avoir une veille dans les technologies
et le contenu.
Votre
prédécesseur, Chahram Becharat, indiquait en mars 2000
dans une interview
au JDNet qu'Europ@web était conçu comme
un "groupe industriel". Est-ce votre point
de vue ?
J'ai
un léger doute sur ce modèle industriel.
Il aurait fallu plus de cohérence dans le portefeuille
et un contrôle très majoritaire sur l'ensemble
des participations pour arriver à cette notion
de groupe industriel. Je pense plutôt qu'Europ@web
était plus proche de la notion d'incubateur.
Quelles
sont vos relations avec Bernard Arnault ?
Nous
nous voyons tous les quinze jours pour faire le point.
Bernard Arnault est toujours très présent
et très attentif sur Europ@web.
Avec
votre expérience, quel regard portez-vous sur
la Nouvelle économie ?
C'est
un sentiment très positif, une expérience
très enrichissante. Mais je ne suis pas de ceux
qui, à chaque évolution ou révolution
technologique, se laissent entraîner par un engouement
débordant avec pour seule optique de faire de
l'argent facile. Internet a d'abord été
victime des spéculateurs. C'est un mécanisme
assez classique quand un marché apparaît.
Maintenant, nous sommes dans une période de restructuration
avec de véritables projets.
En
novembre dernier, vous avez lancé à titre
personnel Stock-Option.fr,
un site dédié au conseil et à la
gestion des stock-options. Qu'en est-il aujourd'hui ?
Le
site fonctionne très bien et a réussi
à toucher sa cible. Nous enregistrons environ
800 visiteurs par jour. Le service d'intermédiation,
qui permet aux internautes d'entrer en contact avec
des banques pointues sur la gestion des stock-options,
est également très apprécié.
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