INTERVIEW 
 
Frédéric Joseph
Président
IAB France
Frédéric Joseph
"La situation du marché de l'e-pub est saine"
Directeur général des activités interactives de ZenithOptimedia, Frédéric Joseph est président de l'IAB France depuis février. Premier bilan de la saison 2004-2005.
(05/07/2005)
 
JDN. L'IAB organise ses premières universités d'été, entre le 5 juillet et le 30 août. En quoi consiste au juste cette manifestation ?
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 IAB France
 ZenithOptimedia Interactive
 Frédéric Joseph
Frédéric Joseph. Il s'agit de donner des clés de compréhension du média Internet aux annonceurs. Le principe consiste à inviter des annonceurs qui n'utilisent pas Internet, ou peu, à un déjeuner animé par un annonceur qui, lui, est initié. Ces déjeuners auront lieu tous les mardis de l'été, autour de thématiques couvrant les principales problématiques du Web aujourd'hui. L'idée, c'est de discuter de manière informelle et de continuer à évangéliser autour de ces thèmes. Chaque déjeuner est bloqué à six participants.

Cette opération d'été vient clore la saison 2004-2005. Quels phénomènes retenez-vous des douze derniers mois ?
Le phénomène le plus notable est à l'évidence la montée en puissance des liens sponsorisés, qui continuent de croître de façon exponentielle. Nous n'arrivons toujours pas à identifier les volumes d'investissements dans ce domaine, mais nous imaginons que c'est de l'ordre de 25 à 30 % des volumes apportés sur Internet. Aux Etats-Unis, ils représentent plus de 45 % des investissements, et les extrapolations atteignent 50 % à brève échéance. Leur potentiel de développement en France est donc encore important.

Et quel regard portez-vous sur cette tendance ?
Je pense que le média Internet marche sur deux jambes : le branding, qui sert à s'adresser à une cible, et le marketing relationnel, qui est l'une des richesses d'Internet. Il est naturel que cette partie là progresse. Cela dit, les outils de rendement ne fonctionnent à plein que lorsque le branding est efficace.

Branding, marketing direct… Il s'agit donc plus de complémentarité que d'opposition ? Internet peut-il servir les deux objectifs ?
Il existe une vraie complémentarité. On sait que le ROI progresse quand le branding est joué en parallèle. Internet est efficace à la fois pour le marketing relationnel et pour le branding, les études NetImpact, dont la troisième édition va sortir début juillet, le prouvent. On est peut-être allé un peu trop vite sur la partie marketing relationnel, en oubliant que la première chose à faire était de construire la notoriété de sa marque.

Cette poussée du marketing relationnel explique-t-elle que parmi les nouveaux membres de l'IAB, beaucoup sont des agences marketing ?
L'IAB a accueilli dix-sept nouveaux membres depuis janvier, dont pas mal d'agences, c'est vrai, mais aussi PSA. Renault ne nous a pas encore rejoint. En tout, l'IAB France compte soixante-dix membres.

La grande distribution commence vraiment à exploiter ce média"
Vous parlez de Renault. En termes de typologie des annonceurs, quelles sont les grandes tendances du marché ?
La grande distribution commence vraiment à exploiter ce média. Toutes les enseignes sont présentes aujourd'hui, Intermarché ayant commencé à annoncer depuis peu. A partir du moment où ce genre d'annonceurs vient sur le Web, cela démontre que le média est efficace, car ce sont des marques très tournées vers le ROI. Les marques de l'alimentaire vont donc certainement venir. Nous rencontrons régulièrement les Procter, Unilever ou Colgate, qui s'intéressent au Web et nous demandent un certain nombre d'informations.

Et au niveau des formats, où en est le marché ?
Nous avons aujourd'hui vraiment rationalisé l'Universal Ad Package, qui définit les standards publicitaires sur Internet. Les créations en rich media vont se développer, de même que les mini-sites intégrés dans les bannières, du fait de la progression du haut débit. La vidéo va également en profiter.

On assiste à une montée en puissance du Flash transparent. De par leur caractère intrusif, ces formats ne posent-ils pas des problèmes comparables à ceux soulevés par les pop-ups ?
Je ne pense pas, car ces formats ont l'avantage de disparaître au bout de quelques secondes, ce qui n'était pas le cas du pop-up. De plus, s'ils sont créatifs, ludiques et s'ils apportent une valeur ajoutée, ils sont positifs. Mais il ne faut pas tomber dans le Flash transparent au kilo.

Les annonceurs sont aussi beaucoup plus exigeants sur Internet"
Le côté créatif et ludique semble justement de plus en plus répandu. Comment jugez-vous la vogue de l'advertainment et du viral ?
C'est la magie de l'Internet. Dès que l'on communique en décalé et que cela a un intérêt pour l'internaute, l'effet est démultiplié par la viralité.

Au-delà de la création, un autre aspect sensible sur le marché de l'e-pub est celui de la mesure d'audience. Les outils qui existent aujourd'hui dans ce domaine sont-ils satisfaisants ?
Nous travaillons toujours sur le benchmark d'outils et les comparaisons entre panels et outils site centric. Les deux sont complémentaires. Avec le rachat d'eStat, Médiamétrie a d'ailleurs montré son intérêt pour le site centric. De manière générale, les niveaux de mesure d'audience sont au moins égaux, voire supérieurs, à ceux des médias traditionnels. Les annonceurs sont aussi beaucoup plus exigeants sur Internet. Quant au tracking, aujourd'hui, la plupart des ad-servers sont d'une qualité irréprochable sur ce point. Les outils majeurs du marché se valent.

Sur la mesure et le tracking, quelles sont les différences avec le marché traditionnel ?
Sur Internet, on ne mesure pas du potentiel mais du réel. Une impression n'est pas une occasion de voir, c'est bien plus que ça. On mesure l'exposition, la post-exposition par le biais des cookies, et au-delà.

L'intégration du Web dans une stratégie média est quelque chose d'irréversible"
Pour vous, Internet fait-il partie des médias ou du hors-média ?
La question ne se pose pas. C'est à l'évidence un média, car il permet d'exposer une cible identifiée à un message. Cette cible n'est pas passive quand elle le voit, elle surfe, et en outre le message apparaît à 30 centimètres de ses yeux. Que l'internaute regarde le message est une autre question. Qu'il le voit, c'est une certitude.

ll est donc naturel d'intégrer Internet à ses plans média. Quelle est la répartition des investissements, aujourd'hui ?
Internet représente 6,4 % des investissements des annonceurs au total, en comptant ceux qui ne l'utilisent pas. Si on les écarte, la proportion dépasse les 10 %. Aujourd'hui, l'intégration du Web dans une stratégie média est quelque chose d'irréversible.

Revenons sur la création. La France ne s'est pas distinguée aux derniers Cyber Lions. Qu'est-ce que cela vous inspire ?
J'en suis désolé. Mais je le comprends, car la création est encore d'un niveau moyen assez faible. Cela dit, j'ai une explication à cela. Le rapport coût de la création - coût de l'espace est encore incomparable avec le rapport existant sur les médias traditionnels. Le CPM net est encore faible, et donc les annonceurs ne sont pas prêts à dépenser un gros budget sur la créa. Si l'on considère que le ratio budget créa-achat d'espace est de l'ordre de 10 à 30 %, plus le budget achat d'espace est réduit, plus le budget créa est faible.

Le rapport entre l'offre et la demande d'espace va faire augmenter le CPM net"
Cette situation est-elle différente dans les autres pays ?
Cela doit être pareil ailleurs, et le niveau moyen des créations est aussi faible partout dans le monde. Nous en discutons beaucoup avec l'AACC Interactive. Nous essayons d'expliquer qu'il est nécessaire d'investir dans ce domaine. Mais aujourd'hui, les campagnes promotionnelles dominent. Or, les créas pour ces campagnes sont généralement moins originales.

La solution passerait donc par une augmentation des tarifs ?
On constate simplement que le ticket d'entrée est encore très faible sur Internet. Il va de toute façon arriver un moment où le rapport entre l'offre et la demande d'espace va faire augmenter le CPM net. Et les agences et les annonceurs savent où sont les espaces les plus rentables.

Quelles sont les perspectives du marché de l'e-pub ?
La situation du marché de l'e-pub est saine. Les tendances vont se poursuivre en 2005, et j'imagine aussi en 2006. Ce qui est sûr, c'est que les investissements vont augmenter par rapport à 2004.

Y a-t-il des directives européennes en préparation ou d'autres éléments réglementaires susceptibles d'avoir un impact sur le marché de l'e-pub ?
L'avenir du marché de l'Internet et de l'interactivité en général passe par la personnalisation. A partir de là, nous allons être amenés à travailler avec les pouvoirs publics pour savoir jusqu'où il est possible d'aller en la matière. Des travaux sont notamment en cours sur les limites du tracking. Il va falloir être vigilants. L'IAB contribue aussi à l'éthique du marché.

Quelles sont vos relations avec les autres organisations du monde de la publicité ?
Nous essayons d'être très ouverts. Nous avons par exemple ouvert le conseil d'administration à toutes les associations verticales qui traitent du média en tant que support publicitaire. Maintenant, nous avons aussi des relations avec la Fevad.

En dehors des universités d'été, quelle sont les autres actualités de l'IAB ?
Dans mon programme, je souhaitais mettre en place des partenariats avec les grandes écoles. C'est ce que nous avons fait avec HEC. Cela démarre en septembre prochain, au travers de cas et d'interventions de professionnels proposés aux étudiants. Nous avons lancé la refonte du site de l'IAB, qui doit sortir en septembre. Enfin, nous allons publier fin 2005 un booklet composé de témoignages d'annonceurs, avec une partie consacrée au branding et une autre au marketing direct.
 
 
Propos recueillis par Raphaële KARAYAN, JDN

PARCOURS
 
 
Frédéric Joseph est diplômé de Sciences Po Paris et titulaire d'une maîtrise de droit des affaires/droit fiscal à l'Université de Paris II Assas. Il a été élu à la tête de l'IAB France en février 2005.

De 1990 à 1995, il est chargé d'études puis chef de groupe média pour le groupe Havas (Euro Rscg/MPG). Entre 1995 et 1997, il est directeur média de Saatchi & Saatchi Paris, puis est nommé en 1997 directeur commercial de Zenith Media France.

A partir de 1999, Frédéric Joseph prend le poste de directeur de la communication Europe des marques du groupe Procter&Gamble chez Saatchi Londres et participe à la création de Zenith Interactive Solutions à Londres, qu'il dirige de 2000 à 2002.

De 2002 à septembre 2004, il occupe le poste de directeur général de ZenithOptimedia Interactive, puis prend en charge les activités interactives et la diversification de Publicis Groupe Media (ZenithOptimedia / Starcom).

   
 
 
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