E–COMMERCE 
 
Stéphane Loire
Directeur des études
Benchmark Group
Stéphane Loire
"L'e-commerce a maintenu une croissance de 44 % en 2005"
En progression annuelle de 44 % en 2005, le e-commerce maintient son niveau de croissance de 2004, portant le volume d'affaires à près de 7 milliards d'euros. Stéphane Loire, directeur des études au Benchmark Group, éditeur du Journal du Net, livre les tendances du marché.
(24/04/2006)
 
(article modifié le 25/04/2006)

JDN. Dans votre nouvelle étude sur le e-commerce en France, à combien estimez-vous le marché de la vente en ligne en 2005 ? Quelle est sa progression ?
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L'étude Benchmark Group (sommaire)
Stéphane Loire. Le marché du e-commerce en 2005 a enregistré un volume d'affaires de près de 7 milliards d'euros, soit une croissance annuelle de 44 %, identique à celle de l'an passé. Pour donner une image, la croissance du volume d'affaires de l'e-commerce en 2005 équivaut à la création d'une quinzaine d'hypermarchés de taille moyenne, tandis qu'en 1999, elle en représentait seulement deux. Le maintien de cette croissance s'avère donc exceptionnel.

Cette croissance n'est pourtant pas homogène pour l'ensemble des secteurs. Qu'en est-il des secteurs historiques ?
Force est de constater que cette croissance masque des disparités notables d'un secteur à l'autre. Si l'on prend l'exemple des produits high-tech et d'électronique grand public, la croissance de ce secteur historique passe de 41 % en 2004 à 35 % sur 2005. En effet, cette année a été un peu plus tendue pour certains acteurs. Le ralentissement dans ce secteur a sans doute contribué à accélérer les mouvements de restructuration, avec notamment le rachat de GrosBill par Auchan en juin 2005, celui de MisterGoodDeal par M6 en novembre dernier. Cette consolidation se poursuit en ce début d'année, à l'instar de Nomatica repris par eXpansys, de Top Achat / Clust racheté par Alapage, et tout dernièrement de Pixmania absorbé par Dixons.

En revanche, le tourisme semble bien se maintenir sur Internet. Quelle est sa croissance sur l'année ?
Le e-tourisme enregistre, comme l'an dernier, 51 % de croissance, et pèse sur 2005 plus de 3 milliards d'euros. Son poids au sein du e-commerce continue de s'accroître d'année en année, passant d'environ 42 % en 2004 à 45 % en 2005, ce qui témoigne du fait que le tourisme en ligne continue de gagner des parts de marché sur les autres réseaux de distribution. Le e-tourisme bénéficie donc pleinement de la croissance du nombre d'internautes, du nombre de cyberacheteurs et de la confiance dans l'achat en ligne. Il est vrai que ce marché n'est pas confronté à des problèmes de logistique. La substitution d'un canal de réservation - le téléphone par Internet par exemple - est donc plus aisée. Nous constatons d'ailleurs que les acteurs spécialisés, comme les compagnies aériennes, les hôteliers ou les centrales de réservation hôtelière, se sont globalement développés très vite, car l'achat de billetterie et la réservation d'hôtels s'avèrent sans surprise pour les clients, et de fait Internet se trouve parfaitement adapté. En revanche, la vraie complexité dans la vente en ligne dans le secteur du tourisme porte plus particulièrement sur les voyages sophistiqués, dont le développement s'avère plus lent. Les voyagistes qui cherchent à se diversifier au-delà de la billetterie se trouvent confrontés à des freins plus importants, du fait qu'ils touchent à des comportements d'achat plus difficiles à faire évoluer.

Quels sont les facteurs qui ont permis de reconduire cette croissance globale en 2005 ?
Les biens d'équipement, la cosmétique et les ventes privées sont en pleine expansion."
Cette croissance générale est portée par de nouveaux secteurs qui accusent une forte montée en puissance en 2005, comme les biens d'équipement de la personne, de la maison, ainsi que la parfumerie/cosmétiques. Le boom de ces nouveaux secteurs correspond en partie à une féminisation des acheteurs en ligne, ainsi qu'à l'arrivée de nouveaux profils, plus proches de ceux de la VAD traditionnelle. Les acteurs qui profitent pleinement de cette croissance sont les grandes enseignes de distribution "click and mortar", tels que les Lapeyre, Ikea, Conforama, qui œuvrent sur Internet depuis un certain nombre d'années, mais commencent à enregistrer des performances intéressantes en ligne, que ce soit en termes de business direct comme indirect. En effet, Internet leur permet d'étendre leur zone de chalandise, mais également de préparer l'ouverture de magasins dans de nouvelles zones. Les stratégies multicanal se révèlent être un choix tout à fait judicieux pour ces enseignes. Un autre phénomène est à l'origine de ce dynamisme du e-commerce en 2005. Il s'agit de l'explosion des revenus générés par les ventes privées. Vente-Privee.com, l'initiateur du modèle, est devenu en quelques années l'un des leaders du e-commerce en France et il ne cesse de faire des émules sur le marché.

En 2005, le profil socio-démographique du cyberacheteur s'est quelque peu démocratisé. Les motivations concernant l'achat en ligne ont-elles également évoluées ?
La recherche de la bonne affaire demeure une constante."
En effet, le nombre d'acheteurs en ligne passe de 10,6 millions d'internautes à 13,4 millions entre le quatrième trimestre 2004 et celui de 2005, selon Médiamétrie. Cependant, si les clientèles CSP- et seniors se développent, le profil du cyberacheteur reste encore typé avec une surreprésentation de CSP+ et de jeunes. Pour les anciens cyberacheteurs, comme pour les nouveaux, la motivation de la bonne affaire dénichée sur Internet reste une constante. Mais une "bonne affaire" ne signifie pas forcément comme auparavant, le prix le plus bas. Les cyberconsommateurs se montrent plus prudents et sont sensibles à la bonne expérience en ligne, ainsi qu'à la notoriété de la marque ou de l'enseigne. Les critères de praticité, de confort de recherche et d'accès à des produits qu'il ne peut pas trouver à proximité constituent autant de facteurs motivants au-delà du prix pour le cyberacheteur. Par ailleurs, les cyberacheteurs se montrent intéressés par les différents services proposés en ligne. Les trois services jugés les plus intéressants sont la garantie satisfait ou remboursé, la livraison express et le paiement fractionné, notamment pour les achats conséquents comme pour les sites de vente de meubles, de bijouterie ou même la high-tech. La possibilité de retirer les articles en magasin est un autre service que les internautes apprécient beaucoup, ce qui témoigne une fois de plus du succès des politiques multicanal.

Pour les cyberacheteurs achat en ligne et achat en magasin ne sont donc pas antinomiques ?
D'après les résultats de notre enquête, il ressort que pour une grande majorité des acheteurs en ligne, le shopping reste un goût, et que le plaisir d'aller en magasin ne diminue pas. Seulement 36 % des cyberconsommateurs les plus réguliers s'avèrent réfractaires au shopping. Ce constat met en lumière le fait qu'un important travail en termes d'ergonomie et d'animation commerciale doit être réalisé sur les sites de e-commerce, pour leur donner cette capacité de recréer en ligne le plaisir de consommer. C'est très certainement ce que les ventes privées, pour leur part, arrivent à réaliser, avec cette dimension d'achat impulsif, d'animation commerciale, et via une présentation particulière des produits.

En 2006, le e-commerce atteindra près de 10 milliards d'euros."
Quelles sont vos estimations pour 2006 ?
Sur la base d'une hypothèse prudente, le volume d'affaires du e-commerce devrait se situer autour des 10 milliards d'euros. La majorité des cybermarchands anticipent un ralentissement de leur croissance.

Quels sont les impératifs pour les cybermarchands face à ce ralentissement ?
Ils devront mettre l'accent sur la fidélisation, s'ils l'ont négligée à un moment donné, ce qui est en réalité un peu normal, dans un marché où la croissance est considérable. Cette fidélisation ne passe pas prioritairement par les actions de fidélisation au sens strict, comme les cartes de fidélisation et les prix préférentiels. Pour fidéliser le cyberacheteur, les e-commerçants doivent en priorité tenir leurs promesses et maîtriser leurs fondamentaux, ce qui signifie qu'ils doivent se maintenir, voire progresser, en termes de qualité, de logistique, de disponibilité des produits et de services. La qualité est de plus en plus importante, qui plus est dans le contexte du développement d'un Web plus participatif sur lequel les rumeurs peuvent se propager rapidement et faire perdre la crédibilité d'une enseigne.

Quelles seront les menaces auxquelles se trouveront confrontés les acteurs du e-commerce et le marché en général ?
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L'étude Benchmark Group (sommaire)
Les acteurs du e-commerce se préparent dans les mois à venir à la poursuite des mouvements de fusions-acquisitions dans les secteurs les plus concurrentiels, tels que la high-tech et le tourisme en ligne. En ce qui concerne le marché du e-commerce, en dehors d'éléments exogènes ou de ralentissements conjoncturels, peu de menaces paraissent se mettre véritablement en travers de sa croissance. Celle-ci sera portée par un fort effet de génération. Selon notre étude réalisée en partenariat avec Médiamétrie, au troisième trimestre 2005, les 18-25 ans étaient environ 50 % à avoir acheté en ligne, contre 26 % des internautes tous âges confondus. Si pour l'instant son pouvoir d'achat reste faible, cette génération qui a le réflexe de l'achat sur Internet, entretiendra durablement la croissance du e-commerce et apportera une généralisation de la vente en ligne.

 

 

 
 
Propos recueillis par Solveig Emerard-Jammes

PARCOURS
 
 
Stéphane Loire, 37 ans, a commencé sa carrière au cabinet d'études Crédoc en 1994 où il devient chef de projet au département dynamique des marchés.

En 2001, il rejoint le Benchmark Group, en tant que directeur de projets. En 2005, il prend le poste de directeur des études.

Et aussi Stéphane Loire est diplômé d'un magistère d'économie industrielle réalisé à Paris XIII.

   
 
 
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