TOURISME 
 
Rachel Picard
Directrice générale adjointe
Voyages-Sncf.com
Rachel Picard (Voyages-Sncf.com)
"Le marketing, c'est le nerf de la guerre sur le marché du voyage en ligne"
2005 a été chargée en actualité pour Voyages-Sncf. Une refonte du site, une campagne d'image qui a fait grand bruit, un changement d'agence… Autant d'éléments qui ont influencé la prise de parole du troisième annonceur en ligne français. Rachel Picard, directrice générale adjointe en charge du marketing, des ventes et des opérations, dévoile la stratégie marketing et publicitaire de l'agence de voyages.
(05/10/2005)
 
JDN. Quelles ont été les grandes options stratégiques de Voyages-Sncf en 2005, en matière de marketing et de communication ?
  En savoir plus
 Voyages-sncf.com
Rachel Picard. 2005 était une année importante, que nous avons beaucoup préparée en 2004 à grands renforts d'études et de tests. Elle a tourné autour de trois objectifs : nous affirmer en tant qu'agence de voyages globale ; faire de la résistance sur un marché où de gros acteurs sont arrivés durant les deux dernières années, avec l'intention de prendre beaucoup de parts de marché ; et enfin travailler l'image et la notoriété du site.

Ce travail sur le positionnement est-il guidé par le fait que votre image sur le marché ne reflète pas votre positionnement théorique ?
Nous imaginions avoir franchi plus d'étapes concernant le décalage entre la réalité de notre offre et sa perception par le public. La diversité de l'offre n'est pas assez perçue, alors que notre catalogue comporte aussi bien des séjours thalasso que des treks au Maroc ou des hôtels en France. L'aspect prix est un autre problème. Nous faisons des efforts pour proposer des prix accessibles. Or, pour les internautes, Voyages-sncf n'est pas le site où l'on trouve les meilleures offres du marché. Enfin, l'offre reste très marquée "ferroviaire". Pour contrer cette image, jusqu'à présent, nous avions fait en sorte de ne pas trop parler du train. Mais aujourd'hui, notre souhait est de réconcilier le train et l'agence de voyages pour installer un cheminement de l'un vers l'autre. Nous avons donc travaillé sur tous les services, en considérant le train comme un atout. Nous avons voulu focaliser notre action sur ce qui était naturel pour nos clients : la France et l'Europe. Ce positionnement se lit dans nos ventes et dans notre image.

Si vous deviez exprimer votre positionnement en une phrase, que diriez-vous ?
J'utiliserais la signature trouvée par notre agence : plus loin que vous ne l'imaginez. Plus loin, en termes d'offres et de services. Cela signifie que nous sommes en avance par rapport à ce que les gens attendent de nous.

Quels moyens avez-vous mis en œuvre pour raccrocher votre image à votre positionnement ?
Nous avions besoin d'un électrochoc pour désancrer les a priori. Nous avons pour cela travaillé avec DDB sur la campagne Transatlantys, qui représente le point d'orgue de notre message et illustre nos objectifs. Cela nous permettait de reparler du train et de prendre le contre-pied des idées reçues. Nous avons également opté pour une identité visuelle forte. Grâce à cette campagne, nous avons gagné 10 points de notoriété top of mind. Un succès presque inespéré ! En termes de médias, nous conservons le parti pris d'être présent tout le temps et sur Internet, d'autant plus que notre offre de week-ends est assez importante. Nous ne nous sentons pas forcément légitimes pour aller chercher les clients offline. Pour progresser, nous avons remis en question l'ensemble de nos partenaires. Ce qui nous manquait, c'était de recruter des gens nouveaux. Or, le rôle de la publicité n'est pas de "racheter" des clients, ce que l'on risque de faire si on ne travaille que sur les taux de transformation. Enfin, nous avons tiré sur le levier du marketing relationnel, en mettant en application la LEN avant la date limite, en créant deux newsletters différentes, une pour le train et une pour le reste de l'offre, et en travaillant énormément le ciblage et l'optimisation du message.

Transatlantys a fait office d'électrochoc."
Vous affirmez conserver le parti pris du online, mais Transatlantys était justement votre première grosse campagne plurimédia ?
Nous avions déjà fait de la radio en 2004, et actuellement nous sommes présents en presse quotidienne, donc nous communiquons quand même sur le offline. En média pur, la part du offline s'élève à 15 % environ en 2005. Le fait est que notre taux de pénétration est déjà très élevé au sein de la population internaute. Les voyageurs en train représentent notamment un bassin de développement. Il faut trouver le bon complément offline/online, afin de donner de la visibilité à la marque. La partie online est la partie tactique de notre communication, car elle fournit des mesures immédiates.

Ce qui signifie que pour vous, Internet est un média tactique ?
C'est une question très intéressante d'un point de vue marketing. Internet est trop souvent utilisé comme un média purement tactique. Si on veut créer de la fidélité, il faut dépasser le stade tactique, qui appauvrit la communication.

C'est pour cela que la campagne Transatlantys était aussi votre première vraie campagne de branding, alors que, jusqu'à présent, votre communication était plus orientée sur le recrutement ?
Il s'agit effectivement d'arbitrer en permanence en faveur de la continuité et de la construction du message. Mais le recrutement reste très fort.

Vous dites avoir remis en question l'ensemble de vos partenaires. Quelle est votre nouvelle agence média, comment l'avez-vous choisie et quel était votre ancien partenaire ?
Nous avons choisi ZenithOptimedia pour notre communication online (groupe Publicis Media, ndlr) car nous avons estimé que ce sont eux qui nous accompagneraient le mieux, notamment concernant la recherche d'une meilleure rentabilité sur les achats de mots-clés. Nous voulions également qu'ils nous aident à recruter de nouveaux clients, et avons été séduits par leur technologie, permettant de lier notre base de données à des outils de tracking. Auparavant, nous travaillions avec Archi & d'Alembert (réseau Isobar, groupe Aegis, ndlr).

Quelles sont les agences média de SNCF et Expedia, présents au capital de Voyages-Sncf ?
La SNCF travaille avec MPG sur le offline (groupe Havas, ndlr) et Publicis sur le online, comme nous. Expedia est toujours partenaire du groupe Aegis.

Et pour la partie création, avec qui travaillez-vous ?
Avec DDB Paris. Lorsque nous avons refondu notre stratégie marketing, nous voulions trouver une grande agence disposant d'un vrai département online intégré, ce qui est rare. C'est le cas de DDB, qui s'occupe de nos créations online mais aussi offline. Ainsi nous maintenons une unité de communication.

Au premier semestre 2005, l'étude TNS-IAB plaçait Voyages-Sncf troisième du classement des plus gros annonceurs en ligne en France. Ce classement correspond-il à la réalité ?
Nous tournons toujours autour de la troisième place, ce avec quoi nous sommes d'accord. En revanche, on nous place souvent devant Opodo, qui communique beaucoup offline. Etant donné les différences de taux de négociation entre le online et les médias traditionnels, il convient de relativiser les classements... De même, quid des liens sponsorisés et des shopbots ?

En trois sites, l'internaute accède à l'ensemble de l'offre de voyages en ligne."
Restons cependant sur les classements construits sur la base des recettes publicitaires brutes online, les seuls dont nous disposons. Les acteurs du tourisme y sont très présents. La communication est-elle le nerf de la guerre sur ce marché ?
Oui, car l'offre est assez similaire d'un site à l'autre. Les critères de différenciation, qui permettent à chaque acteur de dégager un avantage concurrentiel, sont peu nombreux. Il y a les négociations, qui couvrent que 15 à 20 % de ce que l'on vend. Sur ce terrain, nous sommes bien placés. Sur la partie séjours packagés, ce sont les tour opérateurs qui disposent des meilleurs effets de levier. Ensuite, il y a les spécificités, comme la dernière minute, qui n'est pas notre fer de lance. Mais en gros, en visitant trois sites différents, on a accès à l'ensemble de l'offre. Le marketing est donc clairement un outil différenciateur.

Vu l'importance de la communication, les "tactiques arrière" (plan de communication mis en place en réaction à la campagne d'un concurrent) sont-elles fréquentes ?
Pas trop en ce qui nous concerne. Certains concurrents se placent beaucoup plus en réaction.

Difficile de faire entendre son discours sur un marché et un média où tout le monde communique en même temps. Envisagez-vous de prendre la parole en télévision ?
Ce n'est pas envisageable pour l'instant. La télévision est un média peu cher si on s'adresse à tout le monde, très cher sinon. Il représente un niveau de risque que nous ne sommes pas prêts à assumer. Nous ne sommes pas mûrs pour cela. Nous préférons travailler le média tactique avec une stratégie de branding derrière.

Plus de 50 % de nos visiteurs arrivent via les bannières, les liens sponsorisés et les newsletters."
Donc, vous cherchez plutôt à vous démarquer par la créativité des annonces et des formats en ligne ?
Oui, et surtout, la clé, c'est d'être présent tout le temps. Dans notre secteur, pas de trafic = pas de vente.

Faut-il en déduire que la majorité du trafic sur Voyages-sncf provient des clics sur les bannières et les liens sponsorisés ?
Plus de 50 % des visiteurs arrivent sur le site par ce biais. J'inclus dans ce chiffre les clics dans les newsletters.

A quelle fréquence ajustez-vous vos campagnes de liens sponsorisés ?
Toutes les semaines. Nous adaptons le nombre et le type de mots-clés en fonction de la saisonnalité et des résultats que l'on mesure. C'est de la remise en question permanente. On jongle sans arrêt entre le volume et la rentabilité.

Le montant des enchères doit être très élevé dans le secteur du voyage en ligne…
C'est pour cela qu'en général, nous ne suivons pas. Il y a des gens qui achètent très, très cher. Nous ne privilégions jamais la première position. Généralement, nous apparaissons en troisième ou quatrième place.

Allez-vous essayer MSN Keywords ?
Nous adorons essayer de nouveaux outils. Il n'y a pas de raison que nous n'essayions pas celui-là.

Revenons aux formats. Allez-vous mettre l'accent sur le rich média en 2006 ?
Nous en ferons un peu plus, mais n'allons pas tout bâtir là-dessus. Ce sont des emplacements beaucoup plus chers et cela représente aussi plus de coûts de conception. Or, nous vendons souvent du prix. Pour cela, les créations n'ont pas besoin d'être époustouflantes. Qui plus est, les compagnies ne s'engagent sur des tarifs que pendant trois semaines. Dans ces conditions, on ne dispose pas d'assez de temps pour rentabiliser la campagne.

Le choix du format s'effectue en fonction du produit ?
Pour le transport, par exemple, nous utilisons des bannières. Pour les hôtels et les séjours, plutôt des skyscrapers, des carrés, des bannières expand…

En moyenne, une campagne est présente sur 6 ou 7 supports."
En termes de supports, où êtes-vous présents ?
Nous avons des accords cadres avec les grands portails, qui sont de vrais bassins de recrutement. Ce sont des partenariats à l'année. Après, nous disposons en permanence d'un volant de sites tests et de thématiques nouvelles. En moyenne, une campagne est présente sur six ou sept supports.

N'y a-t-il pas des embouteillages de campagnes sur les grands carrefours d'audience ? Quel effet cela a-t-il sur les prix ?
Il y a une petite inflation des prix, un peu de tension. Et puis on sent bien l'arrivée des gros annonceurs plurimédia. Mais nous suivons une logique de rentabilité, qui nous conduit à remettre en question les emplacements ou les sites. En tout cas, tout cela est très bon pour l'Internet. C'est le sens de l'histoire.

Utilisez-vous le ciblage (socio-démographique, géographique, comportemental…) pour vos campagnes ?
On y va doucement. Cela fait partie des choses que l'on souhaite explorer, mais nous ne disposons pas de référent là-dessus. De plus, la consommation du voyage est très fragmentée.

Effectuez-vous des post-tests ?
  En savoir plus
 Voyages-sncf.com
Oui, mais pas énormément, seulement lorsque nous nous remettons en question. Nous l'avons fait par exemple sur Transatlantys, qui a surperformé sur tous les scores, d'après l'institut d'études. Le taux de mémorisation est ressorti à 71 %, ce qui apparemment est élevé. En dehors des post-tests, nous nous créons nos propres référents, en effectuant des points de mesure tous les trois mois.

Quelle est la dernière campagne en ligne qui a attiré votre attention ?
Ce que je trouve amusant, en termes de risque, ce sont les campagnes TV qui renvoient vers Internet, comme celle de Volvo. Ces annonceurs utilisent Internet pour sa richesse et pas pour son côté tactique.
 
 
Propos recueillis par Raphaële KARAYAN, JDN

PARCOURS
 
 
Rachel Picard, 37 ans, est directrice générale adjointe de Voyages-Sncf.com, en charge du marketing, des ventes et des opérations (pôles regroupant une quarantaine de personnes). Entrée en 2004 chez Voyages-Sncf au poste de directrice marketing & ventes, elle possède 15 ans d'expérience dans le secteur du tourisme.

Une carrière commencée au Chili en 1988, où elle devient adjointe à la direction des ventes de la station de ski Valle Nevado. De retour en France en 1991, elle rejoint l'équipe d'EuroDisney en tant que sales manager. En 1993, elle intègre Frantour (Groupe Accor) en tant que directrice marketing du tour opérateur et des agences de voyages. Puis elle met en place le pilotage des 9 filiales étrangères en qualité de directeur tour operating Europe. Enfin, elle crée le site Internet loisirs du Groupe Accor, Accortravel.com.

En 2000, elle crée et prend la direction générale de la filiale voyages des Editions Atlas, une activité de tourisme sur Internet spécialisée dans les courts séjours en vente à distance : Cvendredi.com.

Et aussi Rachel Picard est diplômée de HEC.

   
 
 
  Nouvelles offres d'emploi   sur Emploi Center
Chaine Parlementaire Public Sénat | Michael Page Interim | 1000MERCIS | Mediabrands | Michael Page International