JURIDIQUE 
PAR MAXENCE ABDELLI
Du bon usage des méta-tags
Pivots originels du référencement naturel, les méta-tags demeurent une source de contentieux, entre parasitisme et contrefaçon. Comment leur usage est-il réglementé ? Les réponses de la jurisprudence.   (19/07/2005)
 
Avocat à la Cour et directeur d'Actoba, éditeur juridique spécialisé en droits des médias, communication électronique et propriété intelectuelle
 
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Le référencement, activité au coeur de la communication électronique, est l'une des conditions essentielles de la visibilité des entreprises sur Internet. Les tribunaux ont eu l'opportunité de se prononcer sur l'un des aspects du référencement : l'usage des "méta-balises" ou "méta-tags".

Usages illicites et protection multiple
Le contenu des méta-tags ("mots-clés" ou "titre") bénéficie d'une protection multiple. Si le droit d'auteur peut être une protection efficace lorsque le choix des méta-tags est original, le droit commun de la responsabilité se révèle nettement plus adapté (1). Dans les situations de concurrence, la reproduction servile de méta-tags peut fonder une action en concurrence déloyale ou parasitisme (2).

Sur le terrain des signes distinctifs, l'usage non autorisé d'une marque à titre de méta-balises "mots-clés" ou "titre" a été sanctionné à de nombreuses reprises sur le fondement de la contrefaçon de marque (3). Les condamnations civiles sont d'autant plus tranchantes que la bonne foi, en matière de propriété intellectuelle, est inopérante. Outre des dommages et intérêts, le contrefacteur s'expose également à une peine d'amende et/ou d'emprisonnement si une action pénale a été initiée.

Partant du constat qu'un méta-tag peut contenir tous types d'instructions-textes, une pléthore de dispositions légales trouvera à s'appliquer : le dénigrement (4), les délits de presse (ex : injure, diffamation), la publicité mensongère etc.

En raison du temps de réindexation des moteurs de recherche, on notera que l'interdiction de faire usage de certaines méta-balises ne sera pas d'effet immédiat. Une demande de dommages et intérêts devra donc prendre en considération cet élément.

Ailleurs, des solutions comparables mais plus souples
Aux Etats-Unis et au Royaume-Uni, les juges ont eu l'opportunité de sanctionner une utilisation contrefaisante de marques par méta-tags (5). L'application des principes est toutefois plus souple dans les pays anglo-saxons en raison de l'exception de fair use (usage raisonnable). Ainsi, une ancienne playmate de la société Playboy a été autorisée, en raison de son "rattachement identitaire" à la marque, à utiliser les méta-tags "Playmate" et "Playboy" pour référencer son site personnel (6).

La problématique plus vaste du référencement
En dehors de la question des liens promotionnels, les méthodes traditionnelles de référencement, notamment par méta-tags, influent de moins en moins dans le positionnement des sites Internet. Avec le marché porteur du référencement payant, le position squatting, qui consiste à user de la marque d'un tiers afin d'obtenir un référencement étendu sur les moteurs de recherche, et d'autres techniques de référencement n'ont pas échappé à l'emprise du droit.

Face aux actions contentieuses déjà citées (responsabilité de droit commun, action en contrefaçon de marques, etc.), des sanctions contractuelles sont organisées par les moteurs de recherches. Certaines pratiques nuisibles telles que le cloaking et les doorway (création et référencement de pages Internet dont le titre reproduit des expressions saisies dans les moteurs de recherche), se trouvent prohibées, sous peine de déréférencement. Si ces sanctions contractuelles sont admises dans leur principe, leur mise en œuvre est toutefois juridiquement délicate.

Du contentieux à l'autorégulation ?
La mise en place de programmes de certification (ex : "Google Advertising Professional") et de codes de bonne conduite manifeste clairement une volonté d'autorégulation des acteurs du marché. Il s'agit d'une voie à explorer pour limiter une inflation du contentieux dans un domaine qui évolue rapidement.

(1) Tribunal de Grande Instance de Paris, 4 février 2005, Louis Vuitton Malletier c/ Google ; Cour d'appel de Paris, 13 mars 2002, Société de Fabrication et d'Outillage de la Brie (S.F.O.B) c/ Société Notter GMBH ; Cour d'appel de Paris, 14 mars 2001, SARL Distrimart c/ SA SAFI.
(2) Cour d'appel de Paris, 12 janvier 2005, Société Dreamnex c/ Société Kaligona.
(3) Tribunal de Grande Instance de Paris, 29 octobre 2002, Emmanuel Odin c/ Sarl Le Ludion ; Tribunal de Grande Instance de Nanterre, 25 juin 2002, S.A Louis Vuitton Malletier c/ François D., SA Free ; Tribunal de Grande Instance de Paris, 5 avril 2002, Société Bouygues Télécom c/ SARL Nomad ; Cour d'appel de Paris, 14 mars 2001, SARL Distrimart c/ SA Safi ; Cour d'appel de Paris, 3 mars 2000, S.A Citycom c/ S.A Chanel.
(4) Tribunal de Grande Instance de Nanterre, 25 juin 2002, S.A Louis Vuitton Malletier / François D., SA Free.
(5) Playboy Entreprises Inc. v. Calvin Designer Label, United States District Court, 8 septembre 1997 (US) ; Road Tech Computer Systems v. Mandata, Limited Chancery Division, 25 mai 2000 (UK).
(6) Playboy Entreprises Inc. v. Terri Welles, Cour du 9ème District de Californie, 20 octobre 1998.
 
 

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