Avocat à la Cour et directeur d'Actoba, éditeur juridique spécialisé en droits des médias, communication électronique et propriété intelectuelle |
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Les enchères électroniques inversées (EEI) consistent pour un acheteur à sélectionner,
sur une place de marché virtuelle, le vendeur ou prestataire acceptant de céder son produit
ou offrir son service au moindre coût. La loi en faveur des petites et moyennes entreprises
du 2 août 2005 codifie aux articles L. 442-10 et s. du Code de commerce le cadre
juridique applicable aux EEI dans le secteur privé. Favoriser le développement des EEI
tout en évitant les dérives (sélection inéquitable des participants,
participations financières abusives...), tel est le but du nouveau
texte.
Obligation de respecter un strict formalisme
Tout contrat d'EEI se doit de respecter les formes posées par la loi, sous peine de nullité.
En cas de dommage, une responsabilité civile de plein droit est endossée par
le prestataire qui n'aurait pas respecté les deux exigences de forme posées par la loi :
Avant les enchères, l'acheteur doit communiquer aux candidats de
façon transparente et non discriminatoire, certaines informations déterminantes
concernant le produit ou service (quantité, modalités d'achat,
critères de sélection etc.).
A l'issue des enchères, l'acheteur doit communiquer aux candidats qui en font la
demande, l'identité du prestataire sélectionné. Précisons que ces sous-enchérisseurs
n'ont aucun engagement d'acquérir en cas de défaillance du vendeur sélectionné.
L'idée de mettre en place un tiers certificateur, véritable "huissier" des enchères,
a été écartée au cours des débats parlementaires. Néanmoins, l'organisateur des enchères
doit procéder à un enregistrement du déroulement des opérations, qu'il doit conserver pendant
un an. Ce "procès verbal", éventuellement accompagné d'une signature électronique,
doit être présenté s'il est procédé à une enquête (par exemple, un contrôle de la DGCCRF).
Des sanctions pénales
Pour assurer la protection des parties aux enchères contre toute manipulation
des cours, des sanctions sont prévues. Ainsi, le fait notamment de diffuser de
fausses offres de vente sur une place de marché électronique
dans le but de troubler les cours ou de fausser les prix, est puni
de deux ans d'emprisonnement et de 30.000 euros d'amende.
Un cadre juridique plus vaste
On gardera à l'esprit trois points importants. En premier lieu, le cadre des EEI doit
s'articuler avec de nombreuses autres dispositions légales. Outre les règles expresses
qui excluent des ventes aux enchères électroniques certains produits (les produits agricoles bruts, par exemple),
d'autres éléments se trouvent naturellement hors du commerce ou font
l'objet de réglementations spécifiques (comme les médicaments).
En second lieu, la communication des informations concernant les produits et
services, les conditions ou modalités d'achat ainsi que la rédaction d'un règlement
des enchères demandent une certaine expertise contractuelle, la responsabilité étant,
en la matière, de plein droit.
Enfin, les EEI relèvent du commerce électronique, ce qui
suppose, là aussi, une parfaite connaissance de ce droit.
La loi fournit désormais aux fournisseurs soumissionnaires un cadre juridique clair,
basé sur des principes de transparence, d'information et de loyauté, pour permettre
le développement des EEI. On attendra avec intérêt les premiers retours
d'expérience, notamment dans le secteur clé de la grande
distribution.
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