Recrutement automatisé : des algorithmes pour détecter les softs skills

Recrutement automatisé : des algorithmes pour détecter les softs skills

Pour recruter, les DRH peuvent se baser sur l'utilisation de données, y compris sur les compétences humaines des candidats. Des entreprises ont investi ce créneau.

Trier des CV à la main ne suffit plus pour trouver de bons candidats. Face à des besoins massifs ou quand les candidats manquent sur un poste, les entreprises doivent trouver d'autres méthodes. C'est là que l'usage des données peut être pertinent. Si un robot ne va évidemment pas faire passer un entretien ou négocier le salaire, le passage par le big data ou l'intelligence artificielle peut aider à faire un premier tri.

C'est ce que propose Jobijoba avec le CV catcher, produit lancé début 2017. Le CV catcher est une application qui s'intègre au site carrières d'une entreprise ou d'un cabinet de recrutement. Le candidat importe son CV qui est lu par l'algorithme. Ce dernier procède alors à une extraction de données : les coordonnées et le nom du candidat, son parcours, ses diplômes et ses compétences. Ces données sont ensuite croisées avec les offres disponibles et le candidat se voit directement proposer des annonces pouvant lui correspondre.

Pour extraire les compétences du candidat, l'algorithme ne se base pas que sur celles explicitement marquées sur le CV (logiciels ou langages de programmation maîtrisés par exemple), il va aussi détecter les softs skills. Une  détection possible car l'algorithme va "s'attacher aux concepts pas aux mots", explique Thomas Allaire, CEO de Jobijoba. Par exemple, si un candidat indique qu'il a occupé plusieurs postes à responsabilités, il lui sera attribué des compétences en leadership. "L'algorithme va aussi tenir compte du contexte sémantique", complète Thomas Allaire.

Comme sur Spotify

Le CV catcher de Jobijoba. © Jobijoba

Autre atout pour Thomas Allaire, le CV catcher "permet aux candidats de trouver des offres auxquelles ils ne pensaient pas". Le CEO de Jobijoba fait en cela le parallèle avec les suggestions  d'artistes sur Spotify. Vous pouvez écouter différents artistes mais être plus fan de rock que de rap. En étudiant tout votre historique, Spotify le comprend et vous fait découvrir de nouveaux groupes de rock. Jobijoba fonctionne de la même manière. "L'algorithme va regarder toutes les compétences et faire une synthèse de tout ça", résume Thomas Allaire. Par exemple, si vous avez travaillé dans des ESN comme commercial puis comme assistant RH, l'algorithme va comprendre que le fil directeur de votre carrière est votre connaissance des ESN et va vous proposer des postes dans ce secteur plutôt qu'un poste de commercial dans l'agroalimentaire. Ce tri permet ainsi de tenir compte des CV atypiques. "Ce qui est frustrant, c'est de choisir entre deux métiers quand on fait une recherche. Ici, on s'affranchit de tout ça", souligne Thomas Allaire.

Débusquer les bons candidats, c'est aussi le créneau de Yatedo Talent, lancé en avril 2017. Yatedo Talent se présente comme le "Google du recrutement" d'après son CEO Amyne Berrada. C'est un moteur de recherche basé sur les sources ouvertes du web. Le recruteur tape un profil déterminé (exemple : développeur javascript à Paris avec 3 ans d'expérience) et le moteur va examiner le web en particulier les CV en ligne et les profils Linkedin pour trouver les profils pouvant correspondre. Le recruteur n'aura alors plus qu'à contacter la personne concernée. Ce moteur est particulièrement destiné aux entreprises peinant à recruter dans leur secteur.

Les données extraites par Yatedo Talent sont de deux types. Bien évidemment, le nom ou le parcours du candidat. Mais aussi des "données à forte valeur ajoutée que l'intelligence artificielle trouve par déduction", selon Amyne Berrada. Ces données à valeur ajoutée proviennent de la brique Yatedo Talent Intelligence, une option du moteur Yatedo Talent.

Détecter les softs skills

Les résultats de recherche de Yatedo Talent. © Yatedo

Cette option va pouvoir rechercher des candidats sur des compétences ou des qualités bien précises. Par exemple, la brique, définie par le CEO de Yatedo comme un "filtre pour les softs skills", va détecter les candidats "passionnés". Pour ce faire, l'IA va étudier le CV en ligne d'un candidat et mettre en rapport les métiers exercés, les tâches accomplies et sa formation. A partir de là, "l'IA va voir si le candidat a des compétences supérieures aux autres et si ces compétences ont été acquises en dehors des cursus scolaires", détaille Amyne Berrada. Par exemple, si une personne a fait du développement web et n'a qu'un diplôme d'histoire, elle sera considérée comme "passionnée" car autodidacte.

Avec Jobijoba et Yatedo Talent, l'analyse de données va donc bien plus loin que recueillir les identités des candidats. Cela dit, ces outils ne remplaceront pas un entretien physique. Thomas Allaire estime que le CV catcher sert surtout à "faire gagner du temps à tout le monde". Au recruteur, en faisant une "présélection" des candidats en les dirigeant vers les offres les plus pertinentes et au candidat, en examinant pour lui la base des offres "en une fraction de seconde". Un avantage déterminant pour les entreprises ayant de grands besoins en recrutement.

Yatedo Talent permet aussi de gagner du temps en facilitant le repérage des bons candidats. Et si le moteur de recherche "ne s'occupe que du sourcing", son utilisation peut toutefois "prémâcher l'entretien", puisque le recruteur connaît déjà une partie des qualités du candidat ajoute Amyne Berrada. Ce dernier conclut en indiquant que le manager reste au final le seul décideur : "L'IA ne crée pas de données, elle les valorise pour aider le recruteur dans sa décision".