Société Générale : comment la banque d'investissement passe au digital

Société Générale : comment la banque d'investissement passe au digital Cloud privé, clouds publics, réseau social d'entreprise, Big Data... Voici les grands axes de transformation digitale de la Société Générale Global Banking & Investor Solutions.

Depuis quelques mois, la Société Générale multiplie les coups d'éclat sur le terrain de la transformation digitale. En septembre dernier, le groupe annonçait déployer pas moins de 90 000 tablettes tactiles au niveau mondial. Dans le cadre de ce vaste projet, chaque collaborateur va se voir remettre une tablette courant 2015. Permettant d'accéder à la messagerie, la bureautique, voire d'autres applications non-critiques (pour la réservation de salles, le réseau social d'entreprise...), elle pourra également être utilisée pour des besoins personnels... dans l'optique d'accompagner le salarié vers le numérique. Courant 2014, la banque a aussi organisé plusieurs évènements qui ont pu marquer sa présence dans l'écosystème de l'innovation IT (un hackaton en lien avec l'école 42, des "Meetups" technologiques...). Elle s'est impliquée dans le cadre de plusieurs grands rendez-vous du secteur (par exemple Devoxx). Le groupe a par ailleurs commencé à communiquer sur ses premiers déploiements de cloud privé

Une gouvernance digitale intégrée au business

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Carlos Goncalves est DSI de la Banque de Grande Clientèle et Solutions Investisseurs de la Société Générale. © Société Générale Banque de Grande Clientèle et Solutions Investisseurs

Il semblait bel est bien qu'un vaste mouvement de fonds était en train d'être initié à la Société Générale en faveur du numérique. Acteur central de ce chantier, nous avons pu interroger Carlos Goncalves, DSI de la Banque de Grande Clientèle et Solutions Investisseurs (GBIS), pour en savoir plus.

GBIS est l'un des principaux pôles de la Société Générale. Il regroupe la banque de financement et d'investissement, la gestion d'actifs, la banque privée et les services aux investisseurs. Fait intéressant, le sponsor principal de la transformation au sein de GBIS est un représentant métier. Il en dessine les principales orientations au sein d'un comité dont fait partie Carlos Goncalves ainsi que le COO de GBIS, Christophe Leblanc.

Ce sponsor n'est pas associé à une division digitale isolée - comme c'est le cas par exemple chez Schneider Electric. Pourquoi ce choix ? "Car c'est l'activité actuelle qu'il faut transformer, et surtout pas créer une démarche parallèle. Nos clients évoluent en effet progressivement vers les usages digitaux, et nous devons les accompagner en faisant évoluer notre offre, sans rupture", explique Carlos Goncalves.

D'où cette volonté de se doter d'une gouvernance digitale intégrée aux métiers. Quant à Françoise Mercadal-Delasalles, la directrice des ressources et de l'innovation de la Société Générale, elle joue le rôle de responsable du digital au niveau du groupe. C'est d'ailleurs elle qui porte le chantier des 90 000 tablettes.

Un cloud hybride pour plus de souplesse

Parmi les axes majeurs de la transformation digitale pour GBIS : le déploiement continu. Pour réussir dans le numérique, et éviter de voir ses clients rallier des concurrents qui seraient plus rapides, la banque d'investissement sait en effet qu'elle doit être dans les premières à commercialiser ses produits digitaux. D'où l'importance pour elle du Continuous Delivery. "Cette démarche, basée sur les méthodes Agiles et les pratiques de DevOps, nous permet aussi d'avoir un retour immédiat des utilisateurs finaux, et ainsi d'adapter l'analyse des besoins en permanence pour, in fine, tirer les meilleurs bénéfices des technologies au service des métiers", insiste Carlos Goncalves. Une philosophie qui s'inspire de celle des géants du Web qui, à la manière d'un acteur bancaire comme GBIS, adossent d'ailleurs eux aussi leur activité à des usines informatiques.

Pour outiller sa démarche de déploiement continu, Société Générale GBIS s'est dotée d'un cloud privé. "La volonté était de viser une infrastructure sur les mêmes principes que celles des grands clouds publics comme Amazon Web Services ou Google Cloud, et de contraindre les applications à standardiser leurs consommations de services d'infrastructure", explique Carlos Goncalves. "Nous sommes en production, et de plus en plus de nos applications consomment des environnements dans ce cloud."

Cap sur un broker de clouds, donnant accès à plusieurs clouds publics

La prochaine étape ? "Nous nous orientons vers un broker de clouds pour avoir le choix", confie le DSI, qui précise étudier dans cette perspective plusieurs technologies, dont OpenStack. Combinant cloud privé et clouds publics, ce guichet unique permettrait de répondre avec souplesse à des besoins multiformes (en termes de fonctionnalités, de localisation, de sécurité...). Des tests avec Amazon Web Services et Microsoft Azure sont déjà au programme. En ligne de mire : se donner les moyens de faire jouer la concurrence sur les prix, entre clouds publics, et éviter d'être technologiquement attaché à un fournisseur. Pour Carlos Goncalves, la réversibilité est un point clé de la démarche. C'est d'ailleurs l'une des raisons pour laquelle GBIS s'intéresse depuis plusieurs mois déjà aux conteneurs Docker, dont l'une des vocations est de faciliter les migrations de système d'un cloud à l'autre.

Des Web Apps 100% responsive design

Mais aux côtés du cloud, l'enjeu de la transformation digitale pour GBIS porte aussi sur les nouvelles interfaces graphiques. Pour répondre à ce défi, un framework web orienté responsive design (baptisé Easy Web) a été bâti. Il s'accompagne d'une politique d'architecture orientée services (ou SOA) visant à assurer la souplesse des développements en facilitant la réutilisation de composants IT. C'est à travers cette plateforme que la DSI construit les nouvelles applications destinées aux clients. Ce sont des Web Apps s'auto-adaptant à chaque taille d'écran, et qui sont également orientées Web 2.0. Elles donnent en effet la possibilité aux commerciaux de se connecter pour suivre le client au plus près, visualiser précisément ses toute dernières opérations...

Un réseau social d'entreprise en cours d'expérimentation

Côté outils de travail, le pôle GBIS étudie la piste du réseau social d'entreprise. Une première expérimentation a été réalisée. "Cette solution représente la transformation digitale de l'organisation par essence. Nous croyons beaucoup au potentiel d'une telle application en matière de gestion et partage de connaissances et d'expertises, pour mener à bien un projet ou répondre à un client", explique Carlos Goncalves, qui évoque notamment le montage de financement qui peut faire intervenir de multiples interlocuteurs sur des sujets parfois pointus. "Le réseau social d'entreprise permet d'aligner les meilleurs expertises internes sur une stratégie, et d'être plus efficace dans leur utilisation", résume Carlos Goncalves.

Le Big Data pour bâtir un moteur de recommandations financiers

Enfin, quelles sont les réflexions de GBIS en matière de Big Data : une problématique centrale dans un secteur comme la banque, brassant des quantités phénoménales de données ? Le pôle a commencé à développer des applications sur le terrain des mégadonnées. L'une d'entre elles permet d'alerter les clients sur leur tablette quand des conditions de marché propices se présentent, en leur poussant des propositions d'opérations. Une démarche proactive, basée sur une analyse de l'historique financier du client, qui contribuerait au final à favoriser l'acte d'achat. Autre piste expérimentée : proposer un service d'alerte notifiant un client quand un autre, présentant le même profil financier que lui, a réalisé un achat. En matière de technologie de Big Data, GBIS a notamment intégré la distribution Hadoop de MapR.