TRIBUNE 
PAR ARNAUD DASSIER
L'e-marketing citoyen, nouvelle réalité pour les marques
Les consommateurs devenant de plus en plus versatiles, complexes, politisés et puissants, les marques devront demain, avec Internet, entretenir des conversations avec des communautés de consommateurs. Explication et implications avec Arnaud Dassier.   (24/02/2006)
 
Arnaud Dassier,
Directeur associé, L'Enchanteur des Nouveaux Média
 

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L'Enchanteur des Nouveaux Média

Les doutes existentiels qui habitent le monde la publicité et du marketing depuis quelques temps en sont la conséquence : les consommateurs sont des êtres de plus en plus versatiles, complexes, politisés et puissants (conscients de leur pouvoir individuel et collectif, en réseau). Ils effectuent leurs choix de consommation sur des critères multiples qui traduisent leur vision du monde, en fonction des avis collectés sur internet ou du "buzz" transmis par leurs réseaux sociaux.

Derrière ce phénomène, une réalité toute bête. Les gens se sont émancipés des tutelles institutionnelles (les politiques, les intellectuels, les marques…) et des mirages des discours marketing ou politique. Ils se réapproprient progressivement le pouvoir. Ce phénomène s'est accéléré avec l'Internet, qui donne accès à une base de connaissances et de partage d'expérience extraordinaire, mais aussi une capacité d'action citoyenne et consumériste dont les marques peuvent être les victimes de manière foudroyante (Danone, Total, Orange, l'industrie musicale…).

La domination du sacro-saint 30 secondes appartiendra bientôt au Jurassic Park de la communication
Disons le tout net, en sachant que le trait est évidemment forcé, le modèle de la communication publicitaire et marketing telle que nous la connaissons aujourd'hui est condamné à terme. Avec des consommateurs de plus en plus distanciés, voire publiphobes, de moins en moins devant leur TV, et équipés d'outils anti-pub comme TiVo, la domination du sacro-saint spot de 30 secondes, suivi de la promo de 5 euros à aller chercher dans la grande surface locale, appartiendra bientôt au Jurassic Park de la communication au côté du "Y a bon banania" et de "Groquick" (tous les deux victimes du marketinguement correct, équivalent du politiquement correct, et tout aussi inefficace).

Seule l'inertie des agences et des annonceurs permettra à la domination de la séquence TV-promo-grande surface de se maintenir encore quelques temps. Je sais, on vous a déjà fait le coup en 1999, mais cette fois-ci, il est bien possible que ce soit vrai.

Une révolution copernicienne est nécessaire pour passer d'une communication de masse sur des média de masse, à une communication plus communautaire et affinitaire sur des nouveaux média hyper diversifiés. Il s'agit de passer d'un message conçu autour d'un produit pour un segment marketing d'autant plus inopérant qu'il est large, à une communication qui s'adresse à une communauté virtuelle rassemblée opportunément autour d'un critère affinitaire commun auquel un produit donné prétend répondre.

Demain, les marques devront investir davantage dans la transformation et la fidélisation et moins dans la conquête et la visibilité
Les marques doivent apprendre à entamer des conversations avec des communautés qu'elles auront constituées autour de leurs produits, ou des communautés existantes qu'elles auront intégré, en rendant des services et en participant de manière positive à la vie de ces communautés.

La puissance des nouveaux réseaux sociaux, relayés par la capacité virale du média, a déjà permis le succès considérable et rapide de nombreux modèles économiques sur Internet, avec un minimum d'investissement publicitaire (skype, vente-privee.com, hotmail…).

Ce mode de communication multi-canal, multi-forme et multi-cible sera plus complexe à gérer pour les agences et les annonceurs. La persistance / résistance du modèle publicitaire et marketing actuel s'explique d'ailleurs largement par sa confortable simplicité (et la force des habitudes).

Les conséquences dans la manière de gérer les budgets de marcom sont évidemment considérables. C'est tout le modèle économique des agences de publicité et des agences média qui sera remis en cause par ces nouvelles pratiques marketing. Demain, les marques devront investir davantage dans la transformation et la fidélisation et moins dans la conquête et la visibilité. La valeur du marketing d'une marque dépendra davantage de son savoir-faire CRM et moins de la puissance de son plan média. Les annonceurs devront accepter de consacrer une part beaucoup plus importante de leur budget aux charges liées au travail de l'agence, et moins à l'achat d'espace.

Le marketing de demain sera interactif, opportuniste, communautaire et citoyen.
Les marques vont devoir également faire de la politique, comme les politiques sont de plus en plus amenés à faire du marketing, dans la mesure ou le consommateur se comporte de plus en plus en citoyen et réciproquement. Elles ne pourront pas intégrer des communautés sans en adopter les codes culturels, sociaux ou politiques. Elles devront exprimer une certaine vision du monde à travers la manière dont elles communiqueront sur leurs produits.

Du fait de la capacité du média à créer de la transparence, elles devront également assurer un minimum de cohérence entre la réalité des produits et le discours marketing, comme on le demande aujourd'hui aux politiques. Tout en préservant une part de rêve, dernier bastion du discours publicitaire, au sens classique du terme. Une belle part, mais pas la plus grosse.

Intégrer ou créer des communautés pour des produits (et réciproquement), échanger avec ces communautés, participer et contribuer à leur vie en leur apportant de la valeur ajoutée sous différentes formes, s'engager, exprimer une vision du monde, réagir rapidement à toute nouvelle opportunité ou à un risque, en mobilisant les "militants" fidèles de la marque, voilà ce que sera aussi, et peut être surtout, le marketing de demain : un marketing interactif, opportuniste (au bon sens du terme), communautaire et citoyen (au sens d'intégré dans la vie de la Cité).

La famille des nouveaux médias interactifs, à commencer par Internet, sera au cœur de cette nouvelle pratique du marketing car elle seule permet de créer et d'animer cette relation vivante entre les marques et les communautés de consommateurs-citoyens (acteurs de la consumer-democracy ou consocratie). Un défi ô combien complexe, exigeant et parfois risqué, mais passionnant. A.D.

 
 

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