TRIBUNE 
PAR MARIE-EMMANUELLE HAAS
Le .eu, exemple de la régionalisation du Web
Pour communiquer efficacement sur le Web, une seule extension, le .com, ne suffit pas. Pour preuve : le succès du .eu. Explication de l'accélération de la régionalisation des extensions avec Marie-Emmanuelle Haas.   (21/04/2006)
 
Avocate au Barreau de Paris
Chargée de cours à l'Université Paris I (Sorbonne)
 
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Le succès du .eu, devenu la huitième extension en quatre mois démontre le dynamisme du Web. Avec plus d'un million d'enregistrements, l'objectif fixé par Eurid pour la première année est déjà dépassé. Les pays leaders de l'Internet y ont cru et se sont engagés, accompagnés des autres pays.

La fin de la suprématie du .com ?
Internationalisation, délocalisation, globalisation sont aujourd'hui scandés avec inquiétude. Mais où est le "village global" né des réseaux, annoncé en 1962 par le canadien Herbert Marshall McLuhan ? Chacun sait que ce village est un mythe. La complexité du Web est à l'image de la complexité du monde réel. La question est alors : si un seul nom de domaine permet techniquement d'être présent sur la toile, l'enregistrement en .com ne suffit-il pas pour, techniquement, économiquement culturellement et juridiquement, avoir une présence efficace sur le Web ? L'enregistrement en .com doit-il être associé à une protection sous d'autres extensions, en particulier sous des extensions nationales ?

Pour répondre, deux données peuvent être prises en compte. Premièrement, l'Internet d'aujourd'hui, le World Wide Web n'a été créé qu'en 1991, par Tim Berners-Lee. Même si l'on a coutume de dire que les années Internet sont des "années canines" [Ndlr : elles comptent pour 7 ans], la révolution de l'Internet n'est pas terminée et il s'agit de continuer à explorer cette nouvelle frontière. L'Europe, la France ont les infrastructures techniques qui doivent permettre de dépasser ces frontières. Il leur appartient de saisir cette chance pour améliorer leur visibilité et leurs potentialités sur le Web.

Deuxièmement, l'Internet n'est pas un monde uniforme et communiquer efficacement sur le Web oblige à prendre en compte tout simplement les différences, entre les cultures, les langues (même si l'anglais est la langue de l'Internet) ainsi qu'entre les systèmes juridiques. Cela se traduit par la régionalisation du Web, avec l'apparition d'extensions à vocation géographique, ainsi que par le développement des extensions à vocation sectorielle. L'objectif est identique : améliorer la visibilité, mieux communiquer.

Conséquence : la suprématie du .com est remise en cause et ce, pour plusieurs raisons. Cette extension est surchargée et très peu de noms sont encore disponibles. Son image est atteinte par des difficultés techniques d'accès, liées à la mauvaise configuration d'un grand nombre de noms de domaine en .com, ainsi que par des difficultés juridiques liées au piratage particulièrement développé sous cette zone. Economiquement, tous les types de sites sont accessibles à partir d'adresses en .com. Il en résulte pour les internautes un manque de visibilité sur leur contenu.

Les scores du lancement du .eu
Dans ce contexte, il est alors intéressant de constater que les américains ont clairement misé sur le .eu : parmi les 1.091 registrars accrédités par Eurid, 224 sont américains. Cette donnée officielle mérite d'être citée. Elle sera suivie d'autres données relatives à l'engagement du pays de naissance de l'Internet pour le .eu. Au 12 avril 2006, 1.454.552 noms de domaine en .eu ont été enregistrés. L'objectif fixé par Eurid du million d'enregistrements en une année est déjà largement dépassé ! Lancé le 7 décembre 2005 et ouvert sans restriction autre que le lieu de résidence depuis le 7 avril 2006, le .eu est devenu en quatre mois la huitième extension, derrière le .com (50 millions), le .de (9,5 millions), le .net (7 millions), le .org (4,6 millions), le .co.uk (4,7 millions), le .info (2,4 millions), le .nl (1,7 million), sur un total de 80 millions de noms de domaine.

Le classement par pays d'origine des candidats au .eu
Au 12 avril, si l'on considère le classement du nombre d'enregistrements en .eu par pays d'origine du titulaire, la France apparaît en septième position avec 62.443 enregistrements. En première position figure l'Allemagne (466.232), suivie du Royaume-Uni (293.178), des Pays-Bas (172.393), de l'Italie (86.878), de Chypre (73.507) et de la Suède (63.555). Le cas de Chypre s'explique probablement par le fait que de nombreuses entreprises étrangères sont établies sur ce territoire et peuvent demander l'enregistrement d'un .eu (règlement CE n° 733/2002 art. 4.2 a). Un phénomène qui contribue à démontrer l'attrait du .eu et sa pertinence.

La création de nouvelles extensions géographiques
Le succès du .eu s'inscrit donc dans un phénomène global de création d'extensions à vocation géographique, que ce soit le .asia, dont la création a été acceptée par l'ICANN, ou encore le .cat, qui désigne la Catalogne, lancé en février 2006. D'autres projets de création sont en cours pour des zones plus ou moins grandes. Des villes comme Berlin (.berlin), Londre (.london), ou New-York (.nyc) sont sur les rangs ; mais aussi des régions, avec le .bzh pour la Bretagne, le .sco pour l'Ecosse ; des continents avec le projet de .lac pour l'Amérique latine, sans compter le poisson d'avril du .pc pour la région Poitou-Charentes ! Il s'agit pour ces candidats de proposer à l'ICANN la création d'extensions correspondant à un besoin de la communauté de l'Internet, cette communauté pouvant être locale.

Il s'agit de faire du Web un véritable espace de communication, pour amplifier et étendre à d'autres secteurs les succès déjà reconnus par exemple dans le domaine du voyage. Les coûts engendrés sont des investissements pour l'avenir, en privilégiant une gestion dynamique des noms de domaine, à partir de critères de protection, de visibilité et aussi, bien sûr, de rentabilité (Lire l'article du JDN du 23/11/05 de Loïc Damilaville). Le succès du lancement de la zone en .eu est de bon augure pour envisager l'avenir sous de bons auspices.
 
 

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