L'open banking en péril ? Bruxelles abandonne FiDA sous la pression des lobbys financiers

L'open banking en péril ? Bruxelles abandonne FiDA sous la pression des lobbys financiers Prévu pour renforcer la transparence et améliorer l'accès aux services financiers, le règlement FiDA ne sera finalement pas mis en œuvre.

La Commission européenne a décidé d'abandonner le règlement FiDA (Financial Data Access), un texte qui devait encadrer le partage des données financières au sein de l'Union européenne. Face aux pressions des banques et des assureurs, Bruxelles renonce à cette réforme qui visait à ouvrir davantage le marché à la concurrence, notamment en faveur des fintechs.

Un projet conçu pour favoriser l'accès aux données financières

Le règlement FiDA, présenté en juin 2023 par la Commission européenne, devait permettre aux consommateurs de partager leurs données financières avec des prestataires tiers dans le cadre de l'open finance. Contrairement à la directive DSP2, qui régit déjà l'accès aux comptes bancaires, FiDA visait à inclure des données issues de d'autres services financiers, tels que les assurances, crédits et produits d'épargne.

L'objectif affiché était d'accroître la concurrence entre les acteurs du marché et de faciliter le développement de nouveaux services personnalisés. "L'open finance pourrait offrir de meilleures options pour le financement des PME, les prêts personnels, l'épargne, l'assurance et la banque privée - tout en facilitant l'entrée de nouveaux acteurs sur le marché", déclarait Sasha Maksymenko, porte-parole de Revolut, cité par Les Échos.

La proposition faisait partie d'un paquet de mesures destiné à moderniser le secteur financier européen. Elle devait compléter la révision de la directive sur les services de paiement (DSP2) et l'introduction du règlement sur les services de paiement (PSR). Initialement, la Commission espérait une mise en application en 2027 après des négociations avec les États membres et le Parlement européen.

Un front commun des banques et des assureurs contre FiDA

Dès sa présentation, le projet a suscité une vive opposition du secteur financier. Les banques et les compagnies d'assurance ont critiqué un texte jugé trop vague et contraignant, générant une "charge et une complexité significatives", selon un document interne de la Commission révélé par Politico, et relayé par L'Echo.

Les assureurs étaient particulièrement hostiles à cette réforme, redoutant une pression sur les prix et l'arrivée de nouveaux acteurs susceptibles de capter les segments les plus rentables. En France, les fédérations bancaires et assurantielles ont multiplié les interventions auprès des décideurs européens. "Le partage massif de données financières soulève des questions cruciales quant à la protection des données personnelles et à la souveraineté numérique de l'Union européenne", alertait le gouvernement français dans une note transmise à Bruxelles.

L'un des principaux arguments avancés par les opposants était le risque de voir les GAFAM s'imposer sur le marché financier européen grâce à l'accès facilité aux données. Des acteurs traditionnels craignaient également un effet d'aubaine pour les fintechs, sans garantie que ces nouvelles règles bénéficient réellement aux consommateurs.

Face à ces critiques, la Commission a progressivement réévalué sa position. Ursula von der Leyen, présidente de la Commission, a inscrit cette décision dans une volonté plus large de réduction des contraintes réglementaires pour les entreprises européennes.

Une décision qui enterre l'ambition européenne de l'open finance

En décembre 2024, les États membres avaient donné un accord de principe sur FiDA, mais le lobbying des banques et assureurs a renforcé les doutes sur sa mise en œuvre. Finalement, la Commission a décidé d'abandonner ce projet dans les six mois à venir.

Le secteur financier a salué cette décision, notamment la fédération belge des assureurs, Assuralia, qui estimait que FiDA "soulevait plus de questions qu'elle n'apportait de réponses" et aurait mené à une guerre des prix.

En revanche, pour les fintechs, cette décision représente un sérieux revers, car elles espéraient pouvoir s'appuyer sur FiDA pour se renforcer face aux acteurs historiques du marché. Le débat sur l'open finance reste toutefois ouvert.