Industrie 5.0 : passer du fantasme technologique à la réalité industrielle

Dernière révolution industrielle ou prolongement plus humain et durable de l'industrie 4.0 ? L'industrie 5.0 fait rêver.

 Mais derrière cette idée, l’écart entre la réalité et les promesses technologiques se creuse. Entre des décideurs déconnectés des contraintes du terrain et des opérateurs qui ne voient pas les bénéfices des nouveaux outils, l’enjeu n’est pas d’aller plus vite mais de faire mieux en s’adaptant aux besoins métier et surtout en plaçant l’humain au cœur de la transformation.

L’industrie 5.0 : un modèle qui arrive trop tôt ?

Tout va très vite. Alors que l’industrie 4.0 n’est pas encore pleinement adoptée, on se projette déjà sur la suivante. L’industrie 5.0, décrite comme plus connectée, plus intelligente, plus autonome mais surtout, plus humaine et durable ; c’est la promesse d’un nouveau modèle de rupture. 

Cependant, nous devons faire face à un défi de taille au sein duquel deux réalités s’opposent. D’un côté, nous avons les technologies qui se renouvellent sans cesse : robots collaboratifs, IA prédictive, agents IA, réalité augmentée…Tout cela porté par un marketing de l’innovation toujours plus ambitieux. De l’autre, les industries qui fonctionnent sur un temps long. Chaque décision s’amortissant sur plusieurs années. Le challenge ici est de réconcilier ces deux temporalités.

C’est là que se situe le paradoxe de l’industrie 5.0. On souhaite fluidifier les processus, mais on risque au contraire de renforcer les silos. L’important n’est pas la vitesse à laquelle on va, mais la trajectoire qu’on prend. Repenser l’industrie 5.0 commence par une exigence : se recentrer sur l’essentiel.

Reconnecter la technologie au métier

Avant d’entamer un projet de transformation digitale, il faut déjà s’assurer de prendre en compte le contexte qui entoure ses activités. Dans certains secteurs comme l’agroalimentaire, la priorité sera réglementaire, avec notamment des exigences de traçabilité à respecter. Ailleurs, l’enjeu peut être financier, pour éviter des pénalités liées à des engagements non tenus. L’amélioration continue arrive ensuite : qualité, performance, fiabilité. L’IA peut agir sur chacun de ces leviers, mais il faut choisir où, comment et pourquoi l’appliquer.

L’usage des outils doit être construit avec et pour les équipes qui les utilisent au quotidien. Ce sont les opérateurs qui feront vivre la transformation. Encore faut-il leur donner les moyens de le faire : inclusion des collaborateurs dès la phase de pré-projet, priorisation des besoins selon les réalités du terrain, mais surtout la contextualisation. Cela passe par une communication claire et transparente pour expliquer le « pourquoi ». Aujourd'hui, le principal obstacle aux projets de transformation digitale est l’adoption, celle-ci ne se décrète pas, elle est le fruit d’un travail collectif.

Mais comment rendre l’outil vraiment fonctionnel ? D’abord, il doit être facile d’utilisation et accessible, peu importe le niveau de compétences numériques requis. Ensuite, il doit réduire les tâches répétitives. La finalité étant d’être capable d’aider l’opérateur à anticiper et à prendre des décisions. 

Il n’y a pas de modèle unique. L’industrie 5.0 ne doit pas être un label ou un copier-coller. Car aucune entreprise ne se ressemble et de nombreux facteurs varient d’un site à l’autre (taille de l’entreprise, objectifs, secteur d’activité…). Il est donc nécessaire de faire des choix raisonnés afin d’éviter les transformations de façades, et favoriser l'interopérabilité. Réconcilier IT, OT et terrain, est une condition de réussite.

Ce n’est pas la technologie qui fera l’industrie 5.0, mais ce que nous en ferons. La digitalisation ne doit pas être une fin en soi, mais un moyen de rendre les entreprises plus fiables, agiles, et résilientes. L’industrie 5.0 sera celle qui saura combiner le meilleur de la technologie et l’intelligence humaine. Celle qui place les équipes au cœur de la transformation.