Avec le Mode Étudier, OpenAI bouscule une fois de plus l'enseignement
L'entreprise américaine veut repositionner son chatbot ChatGPT comme outil pédagogique. Mais l'enjeu de l'adhésion des élèves et des enseignants reste entier.
En lançant le “Mode étudier et apprendre” pour son interface ChatGPT en juillet 2025, OpenAI poursuit sa mue stratégique vers le secteur éducatif. L’entreprise entend dépasser l’image d’un outil de triche numérique pour proposer un cadre d’apprentissage structuré, centré sur la réflexion critique et l’autonomie intellectuelle.
Cette nouvelle fonctionnalité, désormais accessible à tous les utilisateurs, y compris ceux de la version gratuite, vise à remplacer les réponses toutes faites par un accompagnement socratique, basé sur des questions guidées, des pistes de raisonnement et un soutien progressif.
Un outil conçu pour “tutoriser” plutôt que répondre
Développé en collaboration avec des chercheurs en sciences cognitives et des enseignants, le Mode Étudier repose sur le principe de la productive struggle, ou “difficulté utile” : l’idée selon laquelle l’apprentissage est plus efficace lorsqu’il exige un effort mental soutenu. Concrètement, ChatGPT ne donne pas immédiatement la réponse, mais amène l’utilisateur à la construire par lui-même.
le nouveau mode « étudier » de chatGPT - Image générée par IA
« Lorsqu’on demande à ChatGPT d’enseigner ou de jouer le rôle de tuteur, cela peut considérablement améliorer les performances académiques », affirme Leah Belsky, vice-présidente en charge de l’éducation chez OpenAI.
Une offensive assumée sur le terrain de l’éducation
OpenAI ne cache plus ses ambitions dans le domaine éducatif. Après avoir conquis les entreprises avec ses offres “Team” et “Enterprise”, l’entreprise cible désormais les universités, lycées et plateformes de formation. Elle a multiplié les partenariats : aux États-Unis, l’Arizona State University teste déjà une intégration de ChatGPT dans ses environnements pédagogiques. En Europe, Mistral AI, pépite française, tente elle aussi de séduire les établissements d’enseignement en valorisant une approche plus transparente et souveraine.
Un outil qui interroge la place de l’enseignant
L’arrivée de ce mode dans les classes ne se fera toutefois pas sans débats. Si certains y voient une opportunité pour mieux accompagner les élèves en difficulté ou différencier les parcours, d’autres s’interrogent sur l’impact sur la dynamique pédagogique. La crainte d’un contournement du rôle enseignant ou d’une perte de contrôle sur les méthodes d’apprentissage demeure.
Son efficacité dépendra donc de l’usage qui en sera fait, mais aussi de l’adhésion du corps enseignant, de plus en plus sollicité pour intégrer les technologies numériques dans les pratiques quotidiennes.
Un pari pédagogique, mais une adhésion incertaine
Le Mode Étudier est activable manuellement par l’utilisateur. Rien n’empêche donc un apprenant de contourner l’intention pédagogique pour revenir à un usage plus direct et passif de l’outil. Dans un système académique où la performance et les contraintes de temps sont fortes, combien d’étudiants accepteront volontairement de “réfléchir plus” quand l’IA peut répondre plus vite ? C’est là que peut se jouer l’avenir de ce tuteur numérique. Pour limiter cette tentation, il faudrait faire du mode Étudier une étape attendue et valorisée dans le parcours d’apprentissage, où l’effort compte autant que la réponse.
Reste à savoir comment les enseignants percevront ce nouveau mode… et si les étudiants auront la volonté de s’y engager durablement.