5G et réalité augmentée, la recette d'Eiffage pour assurer la qualité des chantiers

5G et réalité augmentée, la recette d'Eiffage pour assurer la qualité des chantiers Le groupe a déployé avec b<>com de la 5G privée sur un chantier pour détecter tout risque de défaut de construction grâce à la maquette numérique.

A Rennes, sur le chantier d'Eiffage, le BTP se digitalise et la réalité augmentée devient l'un des outils des techniciens. Au cours de la construction, ces derniers parcourent le site, tablette en main et casque Hololens 2 au visage. L'objectif : afficher en réalité augmentée, sur le coffrage en béton de la construction, sa maquette numérique afin d'identifier les risques de non conformités. Par exemple, dans un logement où le plancher a été réalisé, les techniciens peuvent s'assurer de manière fiable et précise, en superposant le jumeau numérique sur les matériels installés, que les portes et fenêtres sont placées au bon endroit sans qu'il y ait eu d'écart par rapport aux plans, tout cela avant que le béton ne soit coulé.

Ce projet est le fruit d'un travail de longue haleine. "Nous avons commencé à travailler sur le projet en 2018. Notre objectif était d'améliorer la qualité de nos ouvrages en réduisant les non-conformités. Pour cela, nous avons besoin de superposer la maquette numérique à l'existant, en réalité augmentée", raconte Eric Meril, directeur technique chez Eiffage Construction Bretagne, qui avait comme exigence la création d'une solution simple d'utilisation, mobile sur les chantiers, fiable et qui fasse gagner du temps aux opérationnels.

"Il fallait donc s'assurer que les ondes émises étaient bien directionnelles"

Eiffage a d'abord fait appel à l'agence de réalité augmentée Artefacto, qui a mis le groupe en relation il y a deux ans, en 2021, avec l'IRT b<>com pour le déport de calculs de réalité augmentée sur le cloud ou en edge computing, ce qui nécessitait une connectivité sans fil de qualité, d'où le déploiement d'une 5G privée. Pour que l'usage d'Eiffage fonctionne au mieux avec une faible latence et des débits très élevés, l'Institut de Recherche Technologique a mis en place avec sa solution Dome un réseau privé dans la bande millimétrique des 26 GHz, accordée par l'Arcep. Le challenge a été de trouver comment bien positionner les antennes à huit mètres de haut, mais aussi les serveurs 5G et les serveurs dédiés à la réalité augmentée. "Notre contrainte était que le site est face à une caserne militaire. Il fallait donc s'assurer que les ondes émises étaient bien directionnelles et qu'elles ne perturbent pas la zone de la caserne", précise Jérôme Royan, ingénieur spécialisé dans les technologies de réalités mixtes et cloud chez b<>com.

Pour Eiffage, le projet est trop récent pour en dresser un retour d'expérience mais Eric Meril en a déjà tiré des enseignements. Le premier conseil qu'il partage est de bien accompagner les équipes dans la conduite du changement. "La réalité augmentée est un usage nouveau. Il suffit d'un petit couac pour que les techniciens soient démotivés à y recourir", confie-t-il avant d'ajouter : "Aujourd'hui, le rendu est long mais fonctionne. Les équipes restent en attente de solutions qui leur apportent des gains de temps."

"Il faut faire fonctionner le jumeau numérique à l'échelle du bâtiment, alors que les modèles étaient jusqu'à présent à l'échelle d'une pièce"

Au niveau de la technique, le choix des tablettes est crucial. "Selon les marques, la qualité n'est pas au rendez-vous", confie Eric Meril, qui a mis du temps à trouver les appareils adaptés à ses besoins. De son côté, Jérôme Royan met en avant le défi technologique d'analyse sur le cloud : "Il faut faire fonctionner le jumeau numérique à l'échelle du bâtiment, alors que les modèles présentés sur tablette étaient jusqu'à présent à l'échelle d'une pièce. Les serveurs doivent permettre un calcul précis pour localiser le technicien précisément et aligner la maquette numérique avec le bâtiment réel."

La prochaine étape pour Eiffage est d'assurer la fiabilité de la solution et de la déployer plus largement. La maquette numérique représente de nombreuses opportunités à exploiter. Pour sa part, b<>com travaille en R&D à l'adaptation du jumeau numérique en temps réel afin de le remodeler selon les vœux du client, par exemple dans l'ajout de bornes de recharge pour véhicule électrique ou de panneaux solaires, et d'avoir "un modèle du bâtiment non plus comme conçu, mais comme construit, ce qui est rarement le cas aujourd'hui". Le succès de l'IA générative laisse présager de futures avancées dans le BTP. "L'analyse d'images, pour que le logiciel comprenne le monde environnant, exploite beaucoup d'intelligence artificielle, il s'agit donc d'un outil pertinent", confirme Jérôme Royan. Observateur du marché, Manuel Gomes, CEO et fondateur de Stereograph, confirme que l'IA générative appliquée au jumeau numérique va révolutionner le métier en apportant davantage de connaissances, par exemple pour anticiper, dès la construction, le choix des matériaux en vue de leur recyclabilité. Pour Eiffage, l'IA générative représente en effet un moyen d'automatiser plus d'actions, et de renforcer la digitalisation du groupe.