Avec la 5G, Orange entre dans l'ère du cloud réseau hyperautomatisé

Avec la 5G, Orange entre dans l'ère du cloud réseau hyperautomatisé L'infrastructure sans fil de cinquième génération de l'opérateur repose sur Kubernetes. Objectif : évoluer vers un environnement intelligent capable de se reconfigurer automatiquement en fonction des besoins et amplitudes de trafic.

D'après les derniers chiffres de l'Arcep, Orange compte 1 872 sites couverts par la téléphonie mobile de cinquième génération au 30 juin 2021. En ligne avec le standard défini par le consortium 3GPP, l'infrastructure 5G de l'opérateur historique sera cloud native. Elle s'adossera à l'orchestrateur open source Kubernetes. Pour l'heure, les briques cœur de réseau, signalisation et base de données reposent chacune sur une solution logicielle d'un fournisseur télécoms différent. Les trois providers en question apporteront également le cloud sous-jacent. Une première étape. L'ambition ? Aboutir à terme à un découplage complet des deux couches (applicatives et cloud) pour gagner en flexibilité. Autre perspective : injecter une touche d'IA pour rendre le réseau auto-adaptable en temps réel.

Pour concrétiser cette vision, Orange a lancé en juillet 2021 un réseau 5G expérimental à Lannion dans les Côtes-d'Armor. Il s'articule autour d'une distribution Kubernetes faite maison et opérée directement par le groupe français. Une architecture qui découple cette fois logiciel et matériel. Elle permet à l'opérateur de recourir à des serveurs standard fournis par Dell pour déployer les principales briques applicatives du réseau : le cœur de réseau, ainsi que les unités centralisées et décentralisées, supportant respectivement les protocoles réseau de haut et bas niveau.

Une distribution Kubernetes de classe opérateur

"Kubernetes est un enjeu stratégique pour Orange", confie Arnaud Vamparys. "Nous avons des discussions approfondies avec les opérateurs européens et les équipementiers dans l'optique de converger vers une distribution Kubernetes commune orientée telco cloud." Et le vice-président radio networks et 5G champion d'Orange d'ajouter : "Cette convergence permettra de bénéficier d'un effet d'échelle plus important et de favoriser l'intégration entre les opérateurs 5G." Ce projet prend une nouvelle dimension suite au rachat par Microsoft du cœur de réseau 5G d'AT&T. Une technologie qui doit être intégrée à l'offre cloud Azure Telecom du groupe de Satya Nadella d'ici fin 2023. Reste que cette feuille de route ne cadre pas avec celle d'Orange qui avance beaucoup plus rapidement sur le sujet.

Le mouvement des télécoms en faveur d'une infrastructure 5G ouverte a déjà commencé. En janvier 2021, Orange annonçait son ralliement à une initiative Open RAN (pour radio access network) européenne aux côtés de Deutsche Telekom, Vodafone et Telefónica. Portée par l'O-RAN Alliance et soutenue par le Telecom Infra Project, elle définit des interfaces ouvertes et interopérables visant à favoriser l'émergence d'un écosystème de fournisseurs autour de la 5G. Amazon Web Services, Google et Microsoft ont également ralliés le mouvement. Conçu pour supporter des solutions de cloud indépendantes des fonctions et équipements réseau, Open RAN est d'ailleurs l'un des piliers du réseau expérimental de Lannion.

"Dans le cas de véhicules autonomes par exemple, le slicing garantira un temps de latence optimisé"

Jusqu'ici, Orange déploie son réseau 5G sur des sites 4G existants. Mais à partir de 2023, l'opérateur prévoit de mettre en place un nouveau cœur de réseau 5G SA (ou 5G standalone). "La 5G standalone va nous permettre de passer au slicing", anticipe Michaël Trabbia, CTO et chief innovation officer d'Orange. Le principe du slicing ? Il consiste à découper le réseau en tranches et leur allouer différents niveaux de service (SLA) en fonction de l'usage. "Il s'agit par exemple de s'assurer que les appels des pompiers et de la police restent pris en charge, y compris en cas de saturation, ou encore de maintenir un temps de latence optimisé pour les véhicules autonomes", argue Michaël Trabbia. Pour gérer ces SLA de bout en bout, Orange a engagé en parallèle des discussions avec les fabricants de terminaux.

"Nous ne partons pas de zéro dans le slicing", précise Arnaud Vamparys. "Sur le réseau mobile, on différentie déjà les usages en mobilité des usages fixes. De même, les services conversationnels font l'objet d'une gestion différente de la qualité."

Une reconfiguration réseau à la volée

Dans la foulée du slicing, Orange ambitionne de faire évoluer son environnement 5G vers l'IA. Une solution que son réseau expérimental Pikeo met déjà en œuvre via l'offre de machine learning MAVair de Mavenir. Adossée à sa distribution Kubernetes, elle adapte en temps réel le réseau d'accès sans fil en fonction des situations. "Il peut d'agir de répondre à un afflux d'utilisateurs à un moment et à un endroit donné, lors du passage d'un train par exemple, ou encore de faire face à un site qui tombe", explique Michaël Trabbia. "Face à ces situations, le réseau va automatiquement se reconfigurer. Les cellules adjacentes seront immédiatement sollicitées pour absorber le trafic." Preuve de la réussite de l'initiative Open RAN, MAVair s'appuie sur ce standard tout comme Casa Systems, la solution logicielle de cœur de réseau motorisant la plateforme pilote d'Orange.

L'opérateur compte généraliser Open RAN à l'ensemble de son réseau mobile de cinquième génération à horizon 2025. La finalité étant de parvenir, à terme, à déployer massivement l'infrastructure 5G cible qui aura été éprouvée à travers le projet Pikeo.

Pikeo : le réseau G5 expérimental d'Orange en bref

  • Casa Systems : cœur de réseau cloud 5G standalone,
  • MAVair (Mavenir) : RAN, IA et automatisation réseau,
  • Hewlett Packard Enterprise : système de SDM (pour subscriber data management),
  • Dell Technologies : infrastructure standard supportant les fonctions réseau,
  • Amdocs : gestion du provisionnement et de la facturation des clients,
  • Plateforme cloud : distribution Kubernetes développée en interne,
  • GitLab et ONAP : intégration et livraison continues.
  • Coût du projet : plusieurs dizaines de millions d'euros