États-Unis vs Europe : quel marché privilégier lorsque l'on est une startup européenne ?
Les startups européennes pour accélérer leur développement ont-elles intérêt à opter pour le marché américain ou rester en Europe ?
Dans le monde parfois déroutant des startups, une question persiste : une fois le marché local conquis, vaut-il mieux s'adresser à un voisin européen ou traverser l'Atlantique pour s'aventurer aux États-Unis ?
De nombreuses études ont déjà sondé les startups européennes sur ce sujet. 32% considèrent les États-Unis comme leur marché prioritaire, tandis que 29% le voient comme un deuxième, voire troisième choix. Bien que la taille et le potentiel du marché américain puissent éblouir certaines startups rêvant de devenir les licornes de demain, la réalité est différente. S'attaquer au marché américain peut être un vrai défi.
Le marché américain est-il vraiment aussi attrayant pour les startups européennes ? Les pays européens pourront-ils retenir leurs futures licornes sur leur territoire ? Faisons le point.
Pourquoi les États-Unis sont sexy
C'est un fait : les États-Unis continuent d'attirer de nombreux entrepreneurs aspirant à devenir les stars de demain. Le marché américain présente plusieurs avantages indéniables :
Une taille de marché immédiatement plus grande. Avec 340 millions d'habitants et un PIB de 25 462 milliards de dollars, le pays le plus riche du monde offre naturellement une opportunité de cibler une base de consommateurs très étendue, avec un pouvoir d'achat élevé.
L'approche directe : Le "business mindset" américain est souvent franc et radical. Aux États-Unis, vous saurez rapidement si votre proposition séduit. Si au début tout semble "Awesome!", dès qu'il s'agit d'approfondir une relation commerciale, vos interlocuteurs américains sauront rapidement trancher sur un éventuel Go ou No-Go. Aux États-Unis, business is business, et le temps est essentiel !
De nombreuses licornes européennes réalisent aujourd'hui une part significative de leur chiffre d'affaires aux États-Unis. Spotify en est un exemple, avec 24% de ses utilisateurs sur le marché nord-américain, dont 15% aux États-Unis.
Un autre exemple intéressant est la startup française Pasqal, spécialisée dans l'informatique quantique, qui a levé 100 millions d'euros en 2023 grâce au fonds singapourien Temasek. Cette décision stratégique a été prise après avoir échoué à séduire des investisseurs français ou européens. La startup a choisi d'accélérer sa R&D et de développer son activité en Europe, au Canada et aux États-Unis, en raison du positionnement essentiel du marché quantique aux États-Unis.
En général, les États-Unis offrent un accès plus important aux financements pour les startups que les pays européens, en raison d'une mentalité d'investissement axée sur le venture capital plutôt que sur le capital-risque.
Il existe également un écosystème dynamique de venture capital, de fonds d'investissement et d'investisseurs providentiels aux États-Unis, avec des accélérateurs de renom, tels que Y Combinator et Plug and Play, attirant plusieurs startups européennes. Les startups européennes (et les autres) auraient tort de ne pas en profiter !
Néanmoins, il n'est pas forcément nécessaire de s'exporter aux États-Unis pour lever des fonds avec succès et enregistrer une croissance significative. Des success stories comme Revolut, Klarna, Adyen ou encore UIPath ont réussi à sécuriser des milliards de dollars en investissement auprès de fonds américains, directement depuis leur pays d'origine.
Selon Daniel Ek, PDG de Spotify: "Il est essentiel pour les entreprises de se développer en Europe avant de s'attaquer au marché américain. En se développant en Europe, les startups peuvent mieux comprendre les nuances et les spécificités du marché, et elles ont également la possibilité de lever les fonds nécessaires pour conquérir les États-Unis."
D'ailleurs, si vous souhaitez en savoir plus sur le développement de Spotify aux États-Unis, je vous recommande vivement d'écouter le podcast Destination USA avec Daniel Ek. Une interview passionnante qui offre une compréhension approfondie de nombreux aspects !
Barrières réglementaires et tailles de marchés variées
Naviguer à travers les réglementations de l'Union Européenne est déjà un défi, mais chaque pays ou région peut avoir ses propres règles, ajoutant complexité et coûts administratifs. Imaginez une startup française voulant conquérir la Belgique et le Luxembourg. Deux marchés modestes, des règles distinctes, et, cerise sur le gâteau, deux langues à maîtriser ! Être une startup ambitieuse à l'international n'est pas de tout repos.
Des histoires de startups en témoignent. Prenez Finovox, spécialiste de la lutte contre la fraude documentaire, qui s'internationalise. Marc de Beaucorps, leur CEO, a expliqué les critères de sélection des pays, comme la présence d'un solide écosystème financier, le niveau de fraude, la concurrence, la langue et la localisation géographique. BDEO, une startup espagnole révolutionnant l'optimisation des données, a également partagé les défis de leur internationalisation, soulignant l'importance de comprendre en profondeur chaque marché.
Le Potentiel Européen
Bien sûr, les États-Unis ont du charme pour les startups en quête de croissance rapide, mais l'Europe a également beaucoup à offrir. En fait, des facteurs tels que les changements politiques et économiques rendent l'Europe de plus en plus attrayante.
Les règles strictes d'immigration aux États-Unis compliquent l'embauche de talents étrangers, et le coût de la main-d'œuvre est plus élevé. Ainsi, de nombreuses startups européennes préfèrent établir leur centre de recherche et développement en Europe, où l'accès aux talents est plus facile et le coût de la main-d'œuvre plus abordable.
L'Europe a déjà produit des succès mondiaux en B2C, tels que Bolt, Supercell, et TransferWise, partis de l'Estonie, de la Suède et du Royaume-Uni respectivement. Les exemples abondent également en B2B, avec des entreprises comme Spotify, TeamViewer, et Adyen.
Développer sa startup en Europe avant de se tourner vers les États-Unis peut offrir une compréhension approfondie des marchés, évitant les pièges réglementaires et culturels. De plus, l'Europe offre un terrain fertile pour la croissance, des coûts opérationnels plus abordables, et une diversité de marchés. Alors, comment procéder ? La réponse réside dans une expansion stratégique, tirant parti des opportunités européennes avant de conquérir le rêve américain."
Aides financières, monnaie unique et réglementation Éthique : les atouts de l'Europe pour les startups
Lorsqu'il s'agit de soutenir les startups, l'Europe offre une gamme variée de programmes financiers publics. Des initiatives telles que Horizon Europe et l'EIE (European Innovation Ecosystem) sont des moteurs clés de la recherche, de l'innovation et du développement technologique dans la région. BpiFrance, aux côtés des banques publiques grecques, finlandaise et danoise, propose aussi l'initiative "Scale-up Europe" pour faciliter le passage à l'échelle des startups européennes.
L'euro, presque une monnaie unique, simplifie les transactions entre les pays de la zone euro, éliminant les incertitudes liées aux taux de change. Cette stabilité renforce la confiance des investisseurs et facilite les activités transfrontalières des startups européennes.
En matière de régulation, l'Europe s'engage à créer un cadre propice, notamment avec des régulations comme le RGPD, assurant une protection élevée des données personnelles des consommateurs.
Selon Ruth Puente, COO de BDEO, l'Europe brille en matière de protection des droits des citoyens, mais le marché du travail protectionniste rend le recrutement transfrontalier complexe. Une régulation paneuropéenne du travail pourrait faciliter ce processus.
Bonne nouvelle : les entrepreneurs européens obtiennent de plus en plus de financements auprès d'investisseurs américains sans avoir à s'installer aux États-Unis. Près de 50 % des investisseurs dans les licornes européennes ne sont pas européens, et 77 % d'entre eux viennent d'Amérique du Nord.
Des initiatives européennes, comme le projet "European Battery Alliance," visent à rivaliser à l'échelle mondiale. En collaborant, les pays européens ont réussi à mobiliser des milliards d'euros pour des projets innovants, comme la construction de gigafactories de batteries électriques en France.
Mais revenons à nos startups si vous le voulez bien. Une collaboration paneuropéenne pourrait-elle être la clé du succès ? Des acteurs tels que Startup Palace, Tenity, Startupbootcamp, et Beta-i favorisent la croissance des startups européennes via des dispositifs d'open innovation.
Un programme d'accélération paneuropéen, impliquant la collaboration des pays de l'Union Européenne, pourrait être une option à considérer. Seul, on va vite ; ensemble, on va plus loin !
Il est essentiel que l'Europe encourage l'open innovation pour maintenir les startups sur son sol. C'est la raison même derrière la naissance de l’association EURAFI ("European Alliance for Fintech Innovation"), qui ambitionne, via de nombreuses initiatives, d’accélérer l'écosystème de la fintech au niveau européen.
En conclusion, les défis de l'entrée aux États-Unis peuvent être compensés par les avantages de rester en Europe, établissant des bases solides et profitant des opportunités locales au sein de l'Union Européenne. À chaque startup donc d’évaluer ses objectifs, ressources, et secteur pour prendre une décision éclairée quant à son expansion géographique !