"En
pleine forme". "Toujours dynamique".
"Accusant le coup". "Fatigué".
Malgré
un parterre d'invités issus des technologies,
ce n'est pas à la Nouvelle économie que
faisaient référence lundi soir, ces qualificatifs
variés. Mais bien au chef de l'Etat, Jacques
Chirac qui recevait à l'Elysée, des mains
de Sylvain Forrestier, le dernier livre blanc de l'association
Croissance Plus. Et en période pré-électorale,
le discours du chef de l'Etat n'a guère surpris.
Par petite touches, il a ainsi stigmatisé pêle-mêle
le "poids des 35 heures", l'"environnement
réglementaire et lourd pour les entreprises"
ou "la fiscalité personnelle et celle de
l'outil de travail".
Mais
le souci actuel des "techies" français
ne réside pas vraiment dans ces problèmes
domestiques. "On souffre surtout de l'environnement
économique mondial en ce moment, c'est peu de
le dire", confiait ainsi, les lèvres serrés,
un intermédiaire financier. A l'image de Nicolas
Gaume, le président de Kalisto, obligé
de raconter pour la énième fois son montage
financier pour sauver sa société de la
faillite. Autre enseignement : la start-up internet
n'a plus vraiment la cote. Thomas
Legrain, PDG du fonds d'amorçage Coach Invest,
avoue ainsi n'avoir plus que deux projets purement Internet
en portefeuille. "Le reste concerne de l'économie
traditionnelle, comme notre dernier investissement en
date, une société de climatisation."
Même écho chez ce business angel, qui trouve
désormais trop coûteuse la technologie.
"C'est le casino en ce moment et en plus il faut
beaucoup d'argent pour rentrer. On préfère
laisser cela aux fonds de capital-risque, c'est leur
métier."
Tout
le monde se renvoie donc la balle et seul Christophe
Chausson, le président de Chausson Finance,
tempère un peu ce pessimisme en tressant une
couronne de lauriers à quelques unes des start-up
qu'il conseille. "Evidemment, personne ne fera
100 millions de francs de chiffre d'affaires comme c'était
prévu l'an dernier. Mais une société
comme Notrefamille.com avance et fera tout de même
un chiffre d'affaires qui permettra d'être à
l'équilibre." Pascal
Lorne, le PDG d'Ismap, qui a frôlé
le dépôt de bilan avant l'arrivée
d'un investisseur providentiel, opine du chef : "On
n'embauche pas mais on ne licencie plus".
Pour
oublier ces difficultés financières du
moment, le remède de certains était en
tout cas tout trouvé. Il consistait à
aller, comme un enfant devant le père-noël,
serrer la main au chef de l'Etat. "C'est plus facile
que de présenter son business plan à un
investisseur et en plus ça fait des souvenirs",
souriait un entrepreneur. Alignés sagement, une
centaine d'invités ont attendu, près d'une
heure pour pouvoir approcher "le Président".
Car Jacques Chirac n'expédie pas sa poignée
de main, il prend son temps, glisse un mot à
l'oreille, se redresse, et part le plus souvent dans
un éclat de rire. D'autant que, selon certains,
il a visiblement fait des efforts de compréhension
des nouvelles technologies depuis ses premières
incursions. Le temps "du mulot", qui a fait
la joie des Guignols, semble révolu, même
si des lacunes subsistent. Un participant s'en amuse
même et y voit une lueur d'espoir. "On dit
que c'est mort mais même le président prononce
le mot Internet désormais. Ce n'est donc pas
si désespéré que cela."
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