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Dégroupage : cinq clés pour comprendre ce mode d'accès Internet |
Partiel ou total, le dégroupage de la boucle locale est aujourd'hui au coeur des stratégies de tous les FAI français. Définition, économie, réglementation, chiffres-clés : retour sur les fondamentaux du dossier.
(23/03/2006) |
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Qu'est-ce que la boucle locale ?
La boucle locale est le nom donné à la partie d'un réseau de
télécommunications située entre la prise téléphonique de l'abonné
final et le central local ou répartiteur de l'opérateur. Physiquement,
il s'agit de tous les câbles urbains que l'on peut voir dans
les rues, des câbles souterrains et même de la paire de fils
arrivant chez l'usager. En France, la boucle locale est la propriété
de l'opérateur historique France Télécom. Il n'est pas possible
économiquement, pour un nouvel opérateur, de le répliquer intégralement.
Pourtant, y avoir un accès direct est d'une importance stratégique
pour un opérateur de télécommunications nouvel entrant :
il lui permet de construire des offres différenciées en maîtrisant
ses coûts, donc en offrant des tarifs plus compétitifs. Depuis
2000, les opérateurs historiques des pays membres de l'Union
européenne ont obligation de proposer une offre d'accès direct
à cette boucle locale : c'est ce qu'on appelle le
dégroupage.
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En quoi consiste le dégroupage de la boucle locale ?
Rappelons que la technologie ADSL permet d'utiliser la paire
de cuivre classique simultanément pour le téléphone et une connexion
Internet haut débit. Pour l'accès Internet, elle tire
parti des fréquences de la ligne téléphonique non utilisées
par le téléphone, à savoir les fréquences supérieures
à 4.000 Hertz.
Il existe deux possibilités de dégrouper :
Le dégroupage partiel, qui consiste à mettre
à disposition de l'opérateur alternatif la bande de fréquences
hautes de la paire de cuivre, sur laquelle ce dernier peut construire
un service ADSL. La bande de fréquence basse, utilisée traditionnellement
pour le téléphone, reste gérée par France Télécom qui continue
de fournir le service téléphonique à son abonné, donc de lui
facturer l'abonnement correspondant.
Le dégroupage total consiste, lui, à mettre à
disposition de l'opérateur alternatif l'intégralité des bandes de fréquence de la paire
de cuivre. L'utilisateur final n'est alors plus relié au réseau
de France Télécom, mais à celui de l'opérateur alternatif. Dans
ce cas, l'abonné n'a plus aucune relation contractuelle avec
France Télécom puisque ce dernier est rémunéré directement par
l'opérateur tiers.
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Cadre réglementaire et régulation française
Le dégroupage de la boucle locale est un dossier initié et placé
sous l'égide de l'Union européenne. Adopté le 18 décembre 2000,
le règlement (CE) n°2887/2000 du Parlement européen et du Conseil
européen constitue la base réglementaire de l'accès à la boucle
locale, et s'applique dans tous les Etats Membres. Il rend obligatoire,
à partir du 30 décembre 2000, l'accès dégroupé à la boucle locale
des opérateurs historiques. Le rôle de la Commission consiste
à contrôler et à adapter la mise en uvre du dégroupage par
les Etats Membres. Les autorités de régulation nationales disposent
en la matière d'un pouvoir de surveillance conféré par l'article
4 du règlement communautaire : elles veillent à ce que
la tarification et les conditions opérationnelles de l'accès
à la boucle locale favorisent l'établissement d'une concurrence
loyale et durable. Elle sont en particulier habilitées à imposer
des modifications de l'offre de référence des opérateurs historiques
pour le dégroupage.
Par un décret du 12 septembre 2000, l'ART (Autorité de régulation
des télécommunications, devenue Arcep en mai 2005), fixe l'entrée
en vigueur du dégroupage au 1er janvier 2001. France Telecom
publie sa première offre de référence d'accès à la boucle locale
le 22 novembre 2000. Suivra, entre 2001 et aujourd'hui, une
sucession de nouvelles offres de référence initiées par l'évolution
des travaux d'analyse du marché de l'accès à la boucle locale
de l'Autorité. La dernière offre de référence de France Télécom
vaut depuis le 19 janvier 2006. Elle a été établie en application
de la décision de l'Arcep n° 05-0277, en date du 19 mai 2005,
portant sur l'accès dégroupé à la boucle locale cuivre et à
la sous-boucle locale cuivre.
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Tarifs du dégroupage
L'usage du réseau local de France Télécom est rémunéré par
l'opérateur utilisateur. Dans cette optique, l'opérateur historique
publie une offre de référence contenant une description des
prestations d'accès et des modalités, conditions et prix qui
y sont associés. L'Arcep a le pouvoir d'en imposer des modifications,
en fonction notamment de la méthode économique retenue pour
définir le coût de l'accès à la boucle locale. Le 15 décembre
2005, l'Autorité a publié sa décision définitive définissant
la méthode de valorisation des actifs de la boucle locale cuivre,
ainsi que la méthode de comptabilisation des coûts applicables
au dégroupage total (décision n° 05-0834). La méthode retenue
est celle des "annuités" ou "coûts courants économiques".
Cette méthode dépend d'un choix de variables comme le taux de
progrès économique en matière de génie civil ou le niveau des
coûts financiers. En schématisant, le coût de location d'une
ligne dégroupée totalement est de 9,5 euros par mois. Un tarif
que contestent les opérateurs alternatifs qui, s'appuyant sur
une autre méthode de calcul et des études indépendantes, réclament
un prix variant entre 7 et 7,5 euros par mois (lire l'article
du 16/06/05).
En réponse, l'Arcep, appuyée par France Télécom, souligne que
le prix du dégroupage total en France est sensiblement plus
bas que dans les autres grands pays d'Europe. En effet, selon
une étude réalisée par l'Idate, à paraître fin mars, le coût
moyen de location d'une ligne dégroupée totalement dans les
pays de l'Union européenne est de 11,28 euros par mois.
Les prix varient ainsi de 8,3 euros en Italie à 14,7 euros en
Irlande.
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Quelle est la situation du dégroupage en France ?
Pour pouvoir dégrouper, un opérateur de télécommunication doit
être titulaire d'une autorisation au titre de l'article L.33-1
du code des Postes et télécommunications, et doit par ailleurs
signer la convention d'accès à la boucle locale avec France
Télécom. A ce jour, une quinzaine d'opérateurs, grand public
ou positionnés exclusivement sur le marché des
entreprises, a signé la convention de dégroupage avec l'opérateur
historique, dont tous les fournisseurs d'accès grand public
présents sur le marché français du haut débit.
Au 31 décembre 2005, le parc de lignes dégroupées en France
est de 2,827 millions, dont 2.229 millions de lignes en dégroupage
partiel et 598.000 en dégroupage total (source : résultats
annuels 2005 de France Télécom). La France est ainsi restée
au cours de l'année 2005 le leader européen du dégroupage, totalisant
plus de 35 % du nombre total de lignes dégroupées dans l'Union
européenne, un parc estimé à 8 millions de lignes par l'Idate.
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