JDN. Vous avez mis en vente deux
titres de musique sans DRM, pouvez-vous expliquer les raisons
de cette initiative ?
Franck
Leprou. Nous voulons donner au consommateur une plus grande
liberté dans sa consommation de musique. Cette offre de deux
titres de musique en téléchargement payant sans DRM permet en
effet un transfert et une écoute sur tous les supports. Car
aujourd'hui, force est constater qu'il existe un nombre important
de contraintes liées d'une part aux différents formats des titres
musicaux, et d'autre part, aux transferts de l'ordinateur au
baladeur numérique. En outre, nous nous trouvons dans un contexte
où chacun des acteurs essaye de tirer la couverture à soi, avec
un certain nombre de formats propriétaires. Les DRM ont été
développées à l'origine pour protéger les ayants droit du piratage,
mais aujourd'hui nous constatons que le piratage n'a pas diminué.
En revanche, les DRM ont d'une certaine manière constitué des
freins à l'achat de musique sur les sites de téléchargement
légal.
Mais nous ne sommes cependant pas anti-DRM, nous proposons d'ailleurs
l'album complet avec DRM et les deux titres sans DRM, étant
donné qu'il ne s'agit pas de la même maison de disque. Une parfaite
coexistence entre les deux offres est tout à fait possible sur
notre site. Ces deux titres sont mis en vente au prix de 0,99
euro, et nous assurons la rémunération de la maison de disque,
de l'artiste, et des sociétés d'ayants droit telles que la Sacem
et la SCPP. Nous indiquons donc aux internautes que ces titres
offrent la possibilité d'être téléchargés et transférés librement
sur tous les baladeurs et les ordinateurs, ainsi que gravés
dans le cadre de la copie privée. Nous nous inscrivons donc
totalement en accord avec la loi existante.
Quel
a été l'accueil de cette offre par les consommateurs ?
Ce débat n'est-il pas un peu complexe pour eux ?
Nous ne souhaitons pas communiquer de chiffres
précis, mais nous enregistrons un nombre de téléchargements
très encourageant : les consommateurs viennent bien sur
notre site pour acheter et télécharger ce titre. Nous savions
que les consommateurs étaient demandeurs de ce type d'offres,
car nos télé-agents qui assurent la relation client du site
nous remontaient que les problèmes de standards et de DRM étaient
très difficiles à comprendre pour nos clients et représentaient
un problème majeur.
Quant au débat sur les DRM, il était en lui-même très
peu clair : cette complexité préexistait déjà pour les
consommateurs avec la coexistence de plusieurs formats numériques,
de lecteurs compatibles ou non, un nombre limité de gravages
qui diffèrent d'un titre à l'autre
Cette initiative répond
justement à un souci de simplification de l'offre. Désormais
les internautes n'ont pas plus de problème que s'ils avaient
acheté leur CD en magasin. D'autre part, l'encodage au format
MP3 nous a également permis de les proposer en 256 Kbits/s ce
qui représente une qualité de son supérieure, par rapport à
l'encodage de Kbits/s pour le format WMA qui comprend la DRM
de Windows.
Comptez-vous progressivement enrichir
votre offre de titres proposés sans DRM et notamment convaincre
les majors ? Avez-vous eu des retours de leur part ?
Nous avons travaillé plusieurs semaines au développement de
ce projet. Pour mener à bien cette initiative, il nous fallait
trouver un partenaire qui veuille bien se lancer avec nous,
sur un titre très visible, et la maison de disque Believe a
notamment été très dynamique dans ce projet. Les deux titres
musicaux "U-Turn" de Lili et "Mister K" de AaRON, extraits
de la bande originale du film "Je vais bien, ne t'en fais pas",
bénéficient d'un très grand succès radiophonique. Mais il ne
s'agit pas d'une action ponctuelle, nous espérons développer
l'offre et promouvoir ce marché. Nous sommes ouverts à toutes
les maisons de disques qui voudront proposer la vente de leurs
albums et de leurs titres sans DRM.
Nous discutons actuellement avec toutes les majors, mais nous
n'avons pour l'heure pas encore de proposition concrète de leur
côté, ce qui est plutôt logique, car elles sont pilotées hors
de France et le processus d'obtention d'un accord pour nous
accompagner dans cette initiative peut être plus long.
Elles s'interrogent sur la pertinence de cette offre, du nombre
de téléchargements payants, et ont besoin d'être rassurées sur
le fait qu'elles percevront une rémunération juste.
Mais nous sommes également nous-mêmes confrontés au problème
du piratage, aux questions de diversité culturelle et de création
artistique. Le nombre des téléchargements que nous enregistrerons
pourra ainsi répondre à ces interrogations. J'espère bien que
nous aurons à moyen terme des hits et des albums de musique
des majors. Nous connaissons le nombre de fichiers téléchargés
illégalement, et nous pourrions imaginer multiplier par 10 ou
par 100 le nombre de titres de musique que nous vendons actuellement
en téléchargement légal.
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