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Jacques Gérault
Directeur
adjoint du cabinet de Nicolas Saroky
Ministre
de l'Intérieur et de l'Aménagement du territoire
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Jacques
Gérault
"Nous allons obliger les FAI à filtrer l'accès aux sites de jeux d'argent illégaux"
Un mois après l'annonce d'un plan d'action interministériel, le ministère de l'Intérieur poursuit la lutte contre les sites de jeux en ligne en introduisant deux mesures phares dans le projet de loi relatif à la prévention de la délinquance : le contrôle de l'accès et des flux financiers. Le projet de loi sera discuté le 21 novembre prochain.
(14/11/2006) |
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JDN.
Pourquoi les activités de jeux sont-elles si fortement
encadrées en France ?
Jacques Gérault. Le jeu n'est pas une activité
comme les autres car elle comporte, par nature, de nombreux
risques. Dans ce secteur d'activité, volatil et très difficilement
contrôlable, interviennent des éléments du crime organisé,
des pirates ou des escrocs. Les trois principales menaces
concernent le blanchiment d'argent, la corruption, et
les phénomènes d'addiction chez les mineurs et les personnes
vulnérables. C'est la raison pour laquelle les jeux d'argent
sont soumis à un contrôle spécifique de la part des pouvoirs
publics en France.
Quel est le cadre juridique
actuel français pour les jeux d'argent ?
En France, les jeux de hasard et d'argent font l'objet
d'une interdiction qui remonte au XIXème siècle. Ce principe
d'interdiction a subi des dérogations dans trois secteurs :
les paris sur les courses de chevaux, les casinos et les
jeux de loterie. L'organisation des jeux a ainsi été confiée
à un nombre limité d'opérateurs : le groupement
d'intérêt économique Pari Mutuel Urbain (PMU) pour les
courses hippiques, la Française des Jeux en matière de
loterie et de pronostics sportifs, et les casinos pour
les jeux de table et les machines à sous. L'ouverture
d'un casino en France est soumise à l'autorisation du
ministère de l'Intérieur sur avis de la Commission supérieure
des jeux. Ce système permet de contrôler étroitement les
conditions d'enregistrement et d'exploitation des activités
de jeux d'argent.
Est-ce le même cadre juridique
pour la sphère Internet ?
Oui, les mêmes règles s'appliquent aux jeux d'argent sur
Internet. Tous les sites proposant des jeux d'argent sont
en principe interdits. Le cadre juridique actuel n'autorise
pas les casinos à exploiter les jeux de hasard sur Internet.
Néanmoins, malgré cette interdiction de principe, force
est de constater que les sites de jeux d'argent existent
quand même. Ils se sont multipliés ces dernières années.
Ils sont actuellement près de 2.000, dont une centaine
en langue française. Leur chiffre d'affaires est estimé
à 12 milliards d'euros en 2005, avec des projections à
23 milliards d'euros en 2009 et 125 milliards dans une
dizaine d'années. Or les jeux en ligne constituent un
support nouveau qui renforce et multiplie les risques
et dangers inhérents au jeu.
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Le
cyberespace facilite le blanchiment d'argent
à travers les casinos virtuels." |
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C'est-à-dire ?
L'observatoire français des drogues et toxicomanie souligne
les dangers de l'utilisation du cyberespace par les auteurs
de trafic de stupéfiants, attirant plus particulièrement
l'attention sur les casinos virtuels qui échappent à toute
réglementation. Selon le GAFI [Groupe d'Action Financière,
organisme intergouvernemental de lutte contre le blanchiment
de capitaux et le financement du terrorisme, ndlr],
le blanchiment d'argent est facilité par l'anonymat des
joueurs ainsi que l'absence de traçabilité des sommes
jouées. Les risques d'escroquerie sont également multiples.
Sans oublier les dangers liés aux mineurs et aux personnes
vulnérables, encore plus prégnants sur Internet de par
l'anonymat du joueur. C'est pourquoi le gouvernement français
est déterminé à renforcer la lutte contre ces sites, à
travers un plan d'action interministériel.
Quelles sont les mesures mises
en place par le gouvernement pour lutter contre les jeux
d'argent sur Internet ?
Un observatoire des jeux d'argent liés aux nouvelles technologies
a été mis en place. Piloté par le ministère l'Intérieur,
il se compose de policiers et gendarmes qui ont la charge
d'effectuer une veille des activités de jeux illégaux
sur Internet. Des poursuites judiciaires systématiques
seront entreprises contre les personnes se livrant à de
la publicité en faveur de sites de jeux illégaux. Les
poursuites judiciaires engagées contre les dirigeants
de Bwin et de 888.com en sont l'exemple. D'ailleurs, un
renforcement des sanctions financières contre de telles
publicités sera examiné très prochainement dans
le cadre du projet de loi relatif à la prévention de la
délinquance à l'Assemblée nationale, le 21 novembre prochain.
D'autres mesures de lutte contre les sites de
jeux d'argent sont d'ailleurs prévues dans le cadre de
ce projet de loi.
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Contrôler
l'accès aux sites de jeux illégaux
et interdire les versements des gains." |
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Pouvez-vous nous révéler la
teneur des autres mesures qui seront discutées ?
Nous en discutons actuellement avec la Commission des
lois de l'Assemblée nationale. L'idée est de prendre le
problème à la source : contrôler l'accès aux jeux d'argent
en ligne. Nous allons obliger les fournisseurs d'accès
Internet à signaler aux internautes le caractère illégal
de ces sites, sous la menace de sanctions pénales.
Le deuxième point consiste à s'attaquer aux problèmes
de transfert de fonds et de blanchiment d'argent. Comme
la plupart des sites de jeux d'argent ne sont pas localisés
en France, il est impossible de contrôler l'origine licite
de l'argent qui est transféré sur les comptes des citoyens
français. S'il est impossible de contrôler l'argent qui
part vers des comptes étrangers, en revanche, nous allons
obliger les banques françaises à contrôler les flux financiers
entrants, c'est-à-dire à refuser les sommes d'argent versées
sur des comptes de citoyens français en provenance de
sites de jeux illégaux.
Ces mesures sont-elles conformes
à la législation européenne ?
Le droit européen laisse l'encadrement de l'activité des
jeux d'argent à l'initiative de chaque Etat membre dès
lors que les mesures prises sont justifiées par la protection
de l'intérêt général. Les jeux d'argent sur Internet,
notamment, sont exclus de la directive sur le commerce
électronique, de même que la prochaine directive sur les
services.
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La
France souhaite une législation européenne
homogène sur les jeux." |
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La plupart des Etats membres de l'Union européenne ont
une position prohibitive comme la France, à l'exception
notoire de Malte et du Royaume-Uni. A Malte, les licences
des sites de jeux d'argent sont accordées par la chambre
de commerce de La Valette sans vérification approfondie
du demandeur et avec peu de contraintes fiscales. Le Royaume-Uni
est sans doute le pays le plus libéral en matière de jeux
d'argent, mais notons que le gouvernement britannique
a adopté le Gambling Act en 2005, dont l'entrée en vigueur
est prévue en septembre 2007, qui prévoit la création
du commission du jeu chargée de délivrer des licences
couvrant l'ensemble de l'activité commerciale des jeux,
y compris via Internet et la téléphonie mobile. Le dispositif
prévoit la prévention des activités délictueuses et la
protection des personnes vulnérable.
Pourtant, le système de monopole
accordé à la FDJ et le PMU sur les jeux d'argent sur Internet
est dans la ligne de mire de Buxelles ?
En effet, la Commission européenne a engagé en octobre
une procédure d'infraction, suite à des plaintes déposées
par des sociétés de jeux en ligne. A l'Etat français de
démontrer la menace que constituent ces sites de jeux
d'argent et de justifier notre système de contrôle du
blanchiment d'argent et de la corruption via le monopole
accordé à un nombre limité d'opérateurs. Cette procédure
ne devrait pas aboutir avant plusieurs mois. Toutefois,
la France souhaite que cette affaire aboutisse le plus
rapidement possible afin de clarifier les choses. Le souhait
de la France est d'ailleurs de voir instituer une législation
européenne dans le sens de la législation française. Nous
allons pour cela saisir nos voisins européens afin d'accélérer
les procédures et présenter un projet de texte commun
devant la Commission européenne. |
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Propos recueillis par Rédaction JDN & JDN Solutions |
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PARCOURS
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Jacques Gérault, 55 ans, Directeur
adjoint du cabinet du ministre d'Etat, ministre
de l'Intérieur et de l'Aménagement du Territoire
depuis le 9 juin 2005.
En 1996, Jacques Gérault a été
titularisé préfet et a exercé
successivement depuis les fonctions de préfet
hors cadre, chargé de mission au commissariat à
la réforme de l'Etat, préfet délégué pour la sécurité
et la défense auprès du préfet de la Gironde
, préfet de la Charente et préfet
de l'Oise.
Entre 1979 et 1995, il a exercé diverses
fonctions d'administrateur civil, directeur de
cabinet et sous-préfet.
Et aussi Jacques Gérault est diplômé
de l'E.N.A. (promotion Michel de l'Hospital),
détient une licence en droit. D.U.E.L.
d'allemand à l'I.E.P. Paris. Il est Chevalier
de la Légion d'honneur et de l'Ordre National du
Mérite. |
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