JURIDIQUE 
PAR ARNAUD DI MEGLIO
Mail bombing : les FAI veillent
Le mail bombing, envoi massif de mails vers une même adresse, est non seulement une plaie pour le destinataire mais aussi pour son fournisseur d'accès. Différentes lois permettent de punir les auteurs de ces pratiques.  (23/03/2004)
 
Avocat à la Cour, docteur en droit
 
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Le mail bombing consiste dans l'envoi, simultané et massif, de courriers électroniques à un même destinataire, de façon à faire exploser son système de messagerie. Il s'agit d'une forme de terrorisme électronique, d'autant plus préoccupante qu'elle est facile à réaliser, et qu'elle crée un préjudice important. L'explosion est susceptible de porter atteinte à trois types de victimes : Les fournisseurs d'accès, les serveurs de messagerie, et le destinataire des messages.

Les fournisseurs d'accès
La bombe confectionnée par l'expéditeur du message est " transportée " de son fournisseur d'accès, à celui du destinataire. Le nombre de messages envoyés (parfois plus de 300 000) constitue un poids important qui encombre la bande passante des fournisseurs d'accès. Ce qui peut se traduire, soit par un blocage de l'accès, soit par un ralentissement.

Pour se prémunir contre ce type d'attaque, la quasi-totalité des fournisseurs d'accès interdisent, dans leurs conditions générales, la pratique du mail bombing. L'abonné qui viole cette interdiction est alors, à l'instar de ceux qui pratiquent le " simple " spam, susceptible de voir son contrat résilié, et d'être condamné à des dommages et intérêts (TGI Rochefort sur mer, 28 février 2001, Monsieur Christophe G. contre SA France Télécom Interactive ; TGI Paris, référé 15 janv. 2002 Liberty Surf et free ).

Mais c'est surtout sur le fondement des infractions d'atteinte à un système de traitement automatisé de données (STAD), visées par les articles 323-1 et s. du Code pénal, que le mail bombing est condamné. Le 20 février 2001, le Tribunal correctionnel de Lyon a ainsi condamné un mail bombeur à 8 mois de prison avec sursis, 20 000 francs d'amende, et 300.000 francs de dommages et intérêts (TGI Lyon, 20 fév. 2001 Claranet c/ Patrice C.).

Dans une autre affaire, le bombeur a été condamné à 4 mois de prison avec sursis, et 20 000 euros de dommages et intérêts (TGI Paris, 24 mai 2002, Noos c/X). En l'espèce, l'expéditeur avait, par vengeance personnelle, envoyé plus de 300 000 messages à un abonné de la société Noos.

Les serveurs de messagerie
La bombe est " livrée " via des serveurs de messagerie. Ces serveurs peuvent être ou non liés au fournisseur d'accès du destinataire. Le serveur de messagerie du destinataire est alors saturé. Il ne peut plus " servir " les courriers électroniques non seulement au destinataire de la bombe, mais aussi à ses autres abonnés.

Dans l'affaire Noos précitée, l'opérateur a été ainsi obligé de fermer son serveur de messagerie pendant plus de 10 heures. Le mail bombing constitue donc une entrave au fonctionnement des serveurs de messagerie, laquelle est condamnée au même titre que l'atteinte à la bande passante des fournisseurs d'accès, sur le fondement des articles 323-1 et s. du Code pénal (Cf. jurisprudence précitée).

Le destinataire des messages
L'explosion de la bombe crée des dommages non seulement à son destinataire direct, mais également aux autres abonnés. Le destinataire de la bombe ne peut plus ouvrir son logiciel de messagerie, ou s'il y arrive, doit supprimer tous les messages indésirés. De plus, le mail bombing condamne l'utilisation de l'adresse électronique du destinataire. Quant aux autres abonnés, ils pâtissent également de l'explosion en ce que le serveur de messagerie peut être inopérant pendant plusieurs heures, ne plus recevoir, ni émettre de message.

Dans l'affaire Smith et Nephew, l'entreprise victime d'un mail bombing a dû faire intervenir des prestataires externes pour faire fasse à cette invasion de mail, et permettre à l'ensemble de ses membres de retrouver l'usage de leurs boîtes aux lettres. L'auteur du mail bombing a été condamné, sur le fondement de l'article 323-2 du code pénal, à une peine de dix mois de prison avec sursis, et plus de 30 000 euros de dommages et intérêts (TGI Mans, 7 novembre 2003, Procureur de la République, et Sté Smith et Nephew c/ L).

Dans une autre affaire, ce sont les syndicats SNES, FSU, UNSA et un particulier qui ont obtenu, en référé, la condamnation de l'association " La droite libre " à supprimer son appel à leur envoyer des mels (TGI Paris, référé, 26 mai 2003, SNES c/ Droite Libre).

Cette dernière forme de mail bombing est " intéressante " en ce qu'elle montre que celui-ci peut être effectué non seulement par l'utilisation d'un logiciel, mais aussi par l'appel du public à envoyer des courriers à une même personne. Le mail bombing est donc susceptible de porter atteinte à un grand nombre de victimes. A défaut d'avoir réussi techniquement à éviter l'attaque, elles pourront déposer plainte avec constitution de partie civile, afin d'obtenir, outre la condamnation de l'auteur de l'infraction, la réparation de leur préjudice. 

 
 

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