La saga Netscape/Microsoft est
unique en son genre. Par l'ampleur du renversement du
rapport de force entre les deux acteurs, d'abord, par
son caractère emblématique, ensuite. Concernant
au départ les navigateurs Internet, l'opposition
Netscape/Microsoft il a pris une autre dimension à
cause des procès antitrust intentés au géant
de Redmond. La machine Microsoft, malgré une image
écornée et des procès à n'en
plus finir, s'est mis en branle et a écrasé
l'ex-géant Netscape. Ce dernier est aujourd'hui
extrêmement marginal sur le marché des navigateurs,
et son avenir est bien incertain.
Netscape,
le pionnier des navigateurs
Ce sont les travaux de
Tim Berners-Lee, en 1990, qui ont donné naissance au
Web. Le premier véritable navigateur fut créé
en 1992 par le NCSA (National Center for Supercomputing
Applications), un département de l'Université de l'Illinois.
Il s'appelait Mosaic. Le projet était dirigé par Marc
Andreessen. Ses études à peine terminées, ce dernier
se rendit dans la Silicon Valley, où il participa à
la création de l'entreprise "Mosaic Communications".
Le terme "Mosaic" étant la propriété du NCSA, l'entreprise
fut rebaptisée Netscape.
Au milieu de l'année 95, le navigateur de Netscape régnait
en maître, car il n'avait pas de concurrent sérieux.
Sa part de marché de l 'époque tournait autour
de 80 %. Microsoft prend alors conscience de l'importance
du Web et crée son propre navigateur, Internet Explorer.
La première version fut distribuée gratuitement avec
Windows 95. Netscape Navigator coûtait alors $ 39,95.
Une
lente descente aux enfers pour Netscape
Ainsi, dès 1996, la part de marché du navigateur de
Netscape commence à décroître, au rythme de 1 % par
mois environ. Selon la justice américaine, Microsoft
abuse alors de sa situation de monopole dans le domaine
du système d'exploitation pour imposer son navigateur
aux constructeurs de micro-ordinateurs. Mais il faut
également souligner que, à partir de la version 4, Internet
Explorer l'emporte sur le plan technique, et que cette
avance ne se démentira ensuite plus. Sa première
grande innovation est d'avoir permis un accès aux services
en ligne MSN (Microsoft Network) directement depuis
Windows, l'OS prenant toutes les opérations en charge.
Avec la mutation des services propriétaires en World
Wide Web, l'OS le plus répandu sur le marché devient
également le moyen le plus simple pour accéder à Internet.
Des liens vers Internet sont désormais présents sur
toutes les applications Microsoft, et Internet Explorer
4 est complètement intégré à Windows.
Lorsque Netscape publie ses résultats pour l'année 1997,
l'ambiance n'est pas à la fête, la société californienne
s'attend à une perte nette de 85 à 89 millions de dollars
pour 1998. Le chiffre d'affaires est inférieur à celui
de 1996, et les raisons invoquées par la société désignent
clairement le coupable : Microsoft. Le communiqué
évoque alors les "pressions exercées par la concurrence",
ou les "politiques de prix agressives adoptées par [les]
concurrents". Netscape reproche notamment à Microsoft
d'avoir totalement intégré Explorer à Windows.
Le long
procès intenté à Microsoft ne change
pas la donne
Netscape se focalise sur sa bataille contre Microsoft.
Pour le concurrencer, Netscape commence à fournir lui
aussi un navigateur gratuit, tout en faisant travailler
le maximum de développeurs dessus. Netscape court à
la faillite et se fait racheter par AOL en 1998, qui
utilise et fournit à ses clients un navigateur Internet
Explorer " habillé AOL " (seul l'icône AOL fait la différence).
La même année, Netscape décide de poursuivre Microsoft
en justice. Le procès est ouvert le 19 Octobre 1998,
Netscape accuse Microsoft de lui avoir proposé un accord
de non concurrence en échange d'un partage du marché
des navigateurs. D'autres sociétés (Apple, Intel) emboîtent
la pas à Netscape, et Bill Gates vient finalement témoigner
à la barre. Avec le rachat par AOL qui intervient à
la fin de l'année, Microsoft demande l'abandon du procès.
Reconnu coupable en Avril 2000 d'avoir violé la loi
antitrust. Bill Gates fait appel et un accord à l'amiable
est conclu entre Microsoft et la justice américaine
le 2 novembre 2001. Cependant, 9 des 18 Etats qui avaient
porté plainte auc côtés de Netscape rejettent
cet accord et continuent de poursuivre la société. Ils
veulent imposer une version allégée de Windows (sans
Explorer, Outlook ni lecteur multimédia). Le verdict
de ce "second procès" n'a pas encore été rendu.
Netscape
cherche son salut dans le libre
C'est aussi en 1998 que Netscape décide de suivre la
tendance logiciel libre. Le code du navigateur Netscape
est rendu public. Les logiciels libres et Netscape ont
en effet un ennemi commun : Microsoft. En donnant à
des bénévoles la possibilité de participer à l'évolution
de son navigateur, Netscape pense probablement pouvoir
accélérer et améliorer sa production. C'est tout le
contraire qui se passe. La version 5 du navigateur ne
verra jamais le jour, et la version 6 fut, à ses débuts,
très décevante et surtout très tardive. Dès 1999, les
parts de marché de Netscape et Microsoft sont respectivement
de 29 et 69 %, selon Statmarket.
Au début de l'année 2000, la part mondiale de marché
du navigateur de Netscape était de 18 %. Au milieu de
l'année 2001, elle descend vers les 12 %, mais qu'elle
était stabilisée. Cette dernière baisse coïncide avec
l'apparition de la version 6 du navigateur de Microsoft.
La chute va alors s'accélérer de manière exponentielle.
Une étude sur l'année 2001 crédite Navigator de 4,5%
de parts de marché, contre 94,2% à Explorer.
La dernière version du seul,
et pourtant en mauvaise posture, concurrent de Microsoft
est Navigator 6.2. Netscape a misé sur la différence,
en concevant son produit selon les standards du W3C (World
Wide Web Consortium). Netscape a abandonné les technologies
propriétaires (JavaScript) au profit de technologies standardisées
(ECMAScript). Microsoft est, quant à lui, complètement
en marge des recommandations du W3C.
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