 JDN Solutions. A quoi faut-il être vigilant lors du déploiement d'un ERP ?
Christophe Deshayes : Quand vous déployez un ERP au sein d'une entreprise, il y a deux grandes écoles, deux approches différentes. La première façon de concevoir les choses est de prendre l'ERP comme un véritable outil d'entreprise - un outil pour l'entreprise - mais aussi comme un outil de questionnement, qui va amener les dirigeants à se remettre en question et à réfléchir sur la manière dont leurs processus sont structurés.
La deuxième approche est de voir l'ERP comme un outil informatique mais aussi comme un outil d'organisation. Le progiciel devient alors une plate-forme de négociation et de remise à plat de l'organisation avec, comme corollaires, une volonté d'appliquer avec rigueur ce que fait l'outil et un discours ambigu sur les bonnes pratiques intégrées au sein de l'ERP.
Si l'outil est vu comme un outil de questionnement, l'entreprise adopte selon moi la bonne démarche. Peu d'entreprises vont au bout de cette logique, car c'est très long, mais celles qui y parviennent ne le regrettent pas. Certaines constatent même parfois que l'ERP ne leur convient pas mais elles ont pris conscience de sa richesse et sont satisfaites d'avoir mené une réflexion autour du sujet. Si, à l'inverse, vous calquez quelque chose qui vient d'ailleurs et si vous faites du paramétrage complexe que seul le consultant comprend - ou du spécifique -, alors c'est le fiasco.
Quels autres facteurs d'échec avez-vous identifiés ?
| "Il faut être très vigilant à ce que j'appellerais les usages" |
Il faut ensuite être très vigilant à ce que j'appellerais les usages. Est-on sûr que les personnes chargées de travailler sur l'outil ont été correctement formées ? Prenez par exemple la notion de portée des données. Il est souvent demandé aux entreprises d'encoder des éléments qui vont être réutilisés ailleurs, le principe étant que plus la donnée est captée tôt, mieux elle pourra être exploitée dans une logique intégrée.
Il n'est ainsi pas rare que les services commerciaux captent 60% des données du système d'information. Est-ce à dire que les forces commerciales doivent saisir 60% des données ? Non, ce travail revient le plus souvent à leurs assistants ou assistantes, à qui on n'a pas expliqué correctement la démarche...
Tôt ou tard, confrontés à des transactions qui ne passent pas
faute de remplissage de données, ils en arrivent à "remplir pour remplir". Le système est alors biaisé par les utilisateurs.
Ceux qui recherchent des données agrégées auront ensuite des doutes sur la pertinence des chiffres fournis. Ici surgit la problématique du retraitement des données où aucun trou, aucun doublon n'est accepté, mais pour cela, il faut impérativement former les utilisateurs ! Les quelques cas vraiment réussis de déploiement d'un ERP sont ceux qui ont réussi l'organisation et l'apprentissage...
Dans le choix d'un PGI, quels éléments prendre en considération ?
Pour une grande entreprise, il ne faut pas hésiter à regarder autre chose que l'ERP en place, par exemple pour gérer une comptabilité spécifique. Certaines entreprises ont souvent plusieurs ERP et modules qui cohabitent. La boîte unique est selon moi un leurre pour ce type de société.
Pour les PME, dont les besoins sont parfois aussi sophistiqués que les grands comptes mais dont les moyens et les consultants ne sont pas aussi nombreux, la boîte unique la plus complète permet ne pas avoir trop de problèmes d'interfaces, à condition bien entendu d'être dans une activité qui le permet. Sinon, les PME peuvent se contenter d'un progiciel de comptabilité / finance interfaçable avec la paie, sans forcément rentrer dans une logique d'ERP.
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