TRIBUNE 
PAR DENIS FAILLY
Objets Intelligents Non Identifiés
Les objets, munis de puces RFID et d'une adresse IP, vont créer un vaste réseau intelligent, faisant fusionner réel et virtuel, organique et informatique, homme et machine.  (14/03/2006)
 
Consultant chez NextModernity, cocréateur de La bibliothèque NextModerne
 
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Qu'ils soient portables, nomades, "mettables" sur soi à l'échelle macro-, micro- voire nanoscopique, la plupart des objets de la vie courante pourront demain héberger des puces du type RFID. Elles leur permettront d'agir soit comme de simples relais d'information, soit comme des capteurs, soit comme des agents de traçabilité ou un peu tout cela à la fois.

La supériorité des puces RFID, et leurs équivalents à venir à l'échelle "nano", est notamment leur capacité à enregistrer une quantité d'information supérieure au classique code barre. A l'échelle de l'encore visible (micro), et de plus en plus de l'invisible (nano), le champs des applications communicantes est immense, à la fois enthousiasmant et angoissant.

Des raisons d'être enthousiaste
Grâce aux puces, ces objets seront capables de vous informer sur leur parcours et leur origines, de faire de l'auto-diagnostic, de l'auto-régulation, de communiquer entre eux et de " pré-décider " en amont de toute intervention humaine, d'envoyer par eux même des alertes à un autre objet ou à un humain... Les objets deviendront aussi "cliquables".

Imaginez que les objets deviennent cliquables : il devient possible d'interagir avec eux, par exemple avec un téléphone portable qui devient scanner et souris. Ce téléphone permet aussi de capter des informations issues des objets dans la rue (affiches, monuments, pièces dans un musée, etc...) et de les recevoir par SMS par exemple (horaires et emplacements de cinéma délivrés par l'affiche scannable d'un film).

 
"Tout ce qui est personne, espace, objet, flux, stock... devient potentiellement traçable"
 

A l'ère où tout peut être stock ou flux, et au vu de la traçabilité rendue plus facile par ces puces, la liste des secteurs d'activités impactés peut facilement être envisagée. Il est d'ailleurs difficile de distinguer ceux qui pourraient y échapper.

Tout ce qui est personne, espace, objet, flux, stock... devient potentiellement traçable, notamment dans les domaines suivants : logistique, surveillance, géolocalisation des espaces des personnes, des biens, des animaux, suivi et actes médicaux à distance, merchandising distributeur, analyse de données clients, traçabilité des denrées périssables, des produits frais ou vivants, système de paiements, espaces actifs d'ambiances régulables et interchangeables (maison, bureau intelligent), électroménager intelligent (le frigo qui gère vos stocks et réapprovisionne on-line), textiles intelligents (régulation thermique, émission de parfum, changement de couleur...).

La pervasivité pourrait bien devenir la règle, la communication inter-objet est alors continue.

Quelques motifs d'inquiétude
Il faut bien reconnaître que certaines avancées sont de moins en moins l'apanage de scénarios cinématographiques ou de romans de science fiction. La frontière entre purs fantasmes, risques de dérive et espoirs / progrès réels pour l'humanité est naturellement une œuvre ouverte à écrire.

Les possibilités des applications biométriques en gestation permettent de déclencher de multiples actions chez soi (ouverture / fermeture de portes, stores, allumage de lumières, changement d'ambiance...) ou au bureau (accès systèmes sécurisés, ouverture de salles, de session informatiques...). Ce sont plus les applications à vocation sécuritaire (jusqu'où peut-on ou doit-on aller) qui interpellent.

 
"Et l'individu "silico - greffable",
c'est pour quand ?"
 

Les chercheurs sont capables aujourd'hui de produire des poussières intelligentes (Smart dust : grains de silicium de l'épaisseur d'un cheveu) aptes à manifester certaines propriétés physico-chimiques porteuses d'informations. Par exemple : servir à la sécurité civile pour détecter la présence de produits dangereux en cas de fuite chimique ou de gaz.

S'il paraît concevable que bientôt ces grains pourront à cette échelle réduite et discrète, communiquer entre eux ou avec d'autres objets, interfaces ou réseaux, on imagine leur intérêt en termes de tracabilité pour les services de renseignements de toutes ordres.

Et l'individu "silico - greffable", c'est pour quand ? Le fantasme de la puce intégrée au corps humain n'en est plus un. Récemment, une discothèque espagnole a mis en place un système de paiement des boissons réservé à un public "électroniquement taggé". Une puce, placée sous la peau du bras, permet de payer la note par simple scan.

Si ce n'est pas déjà le cas, notamment dans les pays où l'enlèvement d'enfants est légion, on peut imaginer que certains enfants de familles aisées se feront implanter une puce pour être géolocalisable à tout moment...

On peut également imaginer - demain - disposer de puces "téléphoniques" intégrées sous la peau.

 
"Récupérer l'influx nerveux d'un réseau de neurones pour se connecter à une interface informatique"
 

Enfin, parmi d'autres événements, les chercheurs en biotique (alliance de l'informatique et de la biologie) ont réussi à greffer un neurone sur une puce de silicium ou, plus récemment, de récupérer l'influx nerveux d'un réseau de neurones (cultivés en laboratoire) pour se connecter à une interface informatique et modifier par exemple, l'assiette d'un simulateur de vol vidéo.

S'il s'agit de trouver des applications permettant de faciliter la vie des handicapées, par exemple, c'est enthousiasmant. Pour le reste, je vous laisse imaginer la portée et le champs des possibles.

La liste des applications envisageables serait encore longue mais elle nous fait dire que face à cette omni/multi connectivité, le luxe de demain pourrait bien être de pouvoir se déconnecter.

Le système des objets intelligents
A l'instar du DNS (Domain Named System) qui permet de faire correspondre à une adresse IP un nom intelligible et mémorisable par l'internaute, tout objet pourra se voir attribuer une adresse du type IP, devenant ainsi interconnectable, repérable, accessible et traçable sur la toile des objets. Évidemment, les activités privatives ou confidentielles de ces objets devront être protégées.

Sachant qu'il y a plus d'objets que d'êtres humains sur la planète, on imagine la gigantesque cotte de maille d'objets communiquants interconnectés qui va recouvrir la planète. Cependant on peut raisonnablement se poser les questions suivantes :

 
"Quelles instances attribueront et géreront
les Object Name System ?"
 

- Comment définir et gérer l'existence d'un ONS (Object Name System) ?
- Quelles instances attribueront et géreront les ONS ?
- Comment s'assurer de leur indépendance et éviter les dérives (traçabilité) ?

Par ailleurs, ces questions d'ordre technique - voire juridique - ne nous dispenserons pas d'élargir notre interrogation à l'Ethique, quand on sait que des (dia)logiques que l'on isolait les unes des autres par habitude, confort ou ignorance, sont en train de converger : réel / virtuel, organique / informatique, homme / machine... Face à ce paradigme en gestation, où et comment nous positionnons nous ?


Denis Failly
 
 

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