Pour une généralisation du Visit Score

En tant qu'expert des Digital Analytics depuis de nombreuses années, je souhaite apporter à la communauté un certain nombre d'éléments de réflexion propres à améliorer la pratique quotidienne de cette profession promise au plus bel avenir.

Les outils de Digital Analytics "modernes" ont plus de 10 ans et sont maintenant très répandus. Quasiment aucun site professionnel ne nait sans avoir une solution en place. Toutefois, le fossé entre la théorie (j'ai une solution en place) et la pratique (je l'utilise à bon escient pour piloter le marketing digital) reste important.
En tant qu'expert des Digital Analytics depuis de nombreuses années, je souhaite apporter à la communauté un certain nombre d'éléments de réflexion propres à améliorer la pratique quotidienne de cette profession promise au plus bel avenir.
J'entreprends donc l'écriture d'une série de chroniques sur des sujets que j'estime essentiels.
Le premier d'entre eux traite du "Visit Score" ou comment comprendre que chaque visite de chaque internaute sur un site (web ou mobile) à une valeur.

Le pilotage à la conversion

A force de les utiliser, on ne se pose plus la question de leur pertinence, les rapports de performance mesurent les conversions, c'est à dire les Ventes pour un site de e-commerce, les demandes de devis ou de souscription (Leads) pour un grand nombre de sites (banque, assurance, intermédiation, B2B) ou d'autres types d'événements selon les modèles économiques des sites.
Le point commun est qu'on observe avant tout l'objectif principal du site - quoi de plus normal ? un site de e-commerce doit vendre des produits, un site de banque des ouvertures de compte ou des crédits etc.
Les marketeurs digitaux sont d'ailleurs bien aidés en ça par les rapports qui leurs parviennent des innombrables outils de reporting en place : outils de Digital Analytics en premier lieu mais également outils ou agences participant de près ou de loin à l'acquisition de clients : la performance est toujours mesurée à l'aune de la sacro-sainte Conversion.
D'aucuns diront que d'autres métriques ou KPIs sont présentés çà et là : des clics, taux de clics, taux de rebond etc. Certes, mais aucun n'est aussi commun et répandu que la Conversion !
Du coup, emporté par l'évidence et l'habitude, on en est réduit à diviser (ou segmenter, pour rester dans le métier) nos chers visiteurs en deux catégories bien distinctes : ceux qui ont converti et ceux qui n'ont pas. Les bons et les autres quoi !

Au fait, c'est quoi une Conversion ?

Le terme porte en lui-même ses limites car convertir - au sens que lui donne la science marketing - est précisément transformer le visiteur en client. Mais pour un Digital Analyst, il doit être beaucoup plus nuancé : convertir devrait plutôt être compris comme un changement d'état dans le cycle de vie du client.
Les commerciaux de terrain ont bien compris cette progressivité et utilisent des termes comme Suspect pour le contact non qualifié, Prospect pour suspect ayant été démarché, Approche quand on a commencé la démarche commerciale, Négociation quand on a fait une proposition et ainsi de suite jusqu'à l'état ultime de Client.

Ce cycle de vie est transposable au monde digital :

- Le visiteur qui ne connait pas une marque et qui arrive sur un site va visiter quelques pages pour comprendre l'offre de produits ou de services,
- Puis il va découvrir le catalogue produit plus en profondeur en navigant, en effectuant des recherches,
- Puis il ajoutera un produit au panier ou commencera à remplir un formulaire de souscription,
- Puis il créera un compte pour voir les frais de port ou les conditions commerciales,
- Et ainsi de suite jusqu'à ce que - ayant mûri son projet - il saute le pas et devienne
 « un Client ».
Ceci peut être fait sur une seule visite bien sûr mais aura le plus souvent lieu sur plusieurs visites successives, sur plusieurs jours.

Tous ces événements de navigation prennent, dans les outils de Digital Analytics, la forme d'événements mesurables comme :
- Les pages vues,
- Les recherches dans un moteur de recherche interne,
- Les ajouts au panier,
- Les commencements ou complétions de tel ou tel formulaire web (création de compte, simulation de crédit, devis ...).
L'ensemble de ces éléments sont eux-mêmes des conversions, certes moins importants que la conversion ultime que l'on cherche à faire accomplir aux visiteurs mais ils sont les marqueurs d'un engagement progressif de l'utilisateur. Pour les distinguer de la Conversion principale, j'aime les nommer "micro-conversions" ou événements d'engagement.

Valoriser les actions

A partir du moment où on accepte de considérer que ces micro-conversions - toutes ou seulement certaines - ont une valeur pour l'entreprise, il devient non seulement intéressant, et probablement nécessaire, de les prendre en compte dans le calcul de la performance du site ou des actions marketing.
Et pour que cette valeur ait réellement un intérêt, il faudrait qu'elle soit en rapport avec la conversion principale - qu'elle en représente une fraction.

Prenons le cas d'un site de e-Commerce et quelques événements assez communs :
- L'ajout au panier,
- La création d'un compte,
- L'achat?

Je donne une base 100 à l'achat (100 points), combien vaut un ajout au panier ou une création de compte par rapport à ce 100.
Le rapport dépend évidemment de multiples facteurs et pour arriver à quelque chose de réellement crédible, il faut une méthodologie stricte (que je ne livrerai pas ici) mais admettons que :
- L'ajout au panier est un élément faiblement engageant : donnons-lui un score de 5 (soit 5 % de l'acte d'achat),
- La création de compte implique de laisser ses coordonnées, notamment son email : un score de 20 (soit 20 % de l'acte d'achat).

Le Visit Score

A partir du moment où l'on a défini une valeur pour les différentes interactions, la création d'un Visit Score devient assez simple : le Visit Score est la somme pondérée de l'ensemble des interactions effectuées par un utilisateur lors d'une visite.
Les outils de Digital Analytics mesurant avec précisions les différentes interactions d'un visiteur, cela sera assez simple de créer ce nouveau KPI et de l'appliquer à diverses dimensions :
- Les campagnes par exemple : pour apprécier l'efficacité globale d'une campagne
- Une journée ou une période de temps : pour comparer des périodes

Si je reprends l'exemple ci-dessus :


La journée du 13 mai me donne les résultats suivants :
Ajouts au panier     100
Créations de compte     30
Ventes 10

La journée du 14 mai :
Ajouts au panier     50
Créations de compte     20
Ventes 10

J'applique ma formule :
Visit Score = Ajouts au panier*5 + Créations de compte*20 + Ventes * 100

J'obtiens donc :
13 mai : Visit Score = 2100
14 mai : Visit Score = 1650

Le Visit Score me permet donc de comparer assez facilement la "valeur" d'une journée par rapport à une autre alors que si je n'avais regardé que les ventes, j'aurai eu une journée totalement identique en termes de performances.

En conclusion

On voit assez facilement l'intérêt de construire un KPI de ce type, cela évite aux marketeurs digitaux de se focaliser sur une métrique (important mais trop réducteur), cela permet aussi aux équipes marketing de valoriser leur travail sur le long terme.
Enfin et surtout, cela va décharger les analystes ou l'ensemble des personnes impliquées dans la lecture des tableaux de bord d'un travail fastidieux de comparaison des différentes métriques pour évaluer l'efficacité de leurs efforts.
Si elle est essentielle, la mise en place d'un tel KPI n'est pas triviale. Évaluer le rapport et la hiérarchie entre les différents événements doit suivre une méthodologie propre à rendre le Visit Score représentatif et accepté au sein de l'organisation.
Si vous désirez en savoir plus sur cette méthodologie, je vous invite à me contacter pour en discuter.