Dette et nucléaire : la Cour des comptes alerte sur les fragilités d'EDF

Dette et nucléaire : la Cour des comptes alerte sur les fragilités d'EDF Entre prolongation des réacteurs existants, construction d'EPR 2 et modernisation du réseau, EDF fait face à des choix décisifs selon la Cour des comptes.

Dans un rapport publié le 23 septembre, la Cour des comptes tire la sonnette d'alarme sur l'avenir d'EDF. L'électricien public, déjà fortement endetté, doit engager des investissements considérables pour maintenir son parc actuel et lancer de nouveaux projets nucléaires.

Des besoins énormes pour moderniser le parc énergétique

Selon le rapport, EDF devra mobiliser environ 460 milliards d'euros d'ici 2040, soit près de 30 milliards chaque année. Ces sommes couvrent plusieurs volets : 90 milliards pour prolonger la durée de vie des 57 réacteurs nucléaires en activité, 115 milliards pour construire 14 nouveaux EPR 2, dont 75 milliards pour les six premiers, et 30 milliards pour moderniser les installations d'Orano.

Au-delà du nucléaire, EDF prévoit plus de 100 milliards pour le réseau d'Enedis, 15 milliards pour le parc hydraulique, 30 milliards pour ses activités au Royaume-Uni et 25 milliards pour sa filiale italienne Edison. La transition énergétique figure aussi au programme avec 30 milliards d'euros destinés aux projets éoliens et solaires via EDF Power Solutions.

Mais ces besoins colossaux se heurtent à une situation financière déjà fragile. Le Monde rappelle que la dette nette d'EDF atteignait 54,3 milliards d'euros fin 2024, en hausse de 23 milliards en douze ans. Cette dérive est intervenue malgré plusieurs augmentations de capital, des cessions d'actifs et l'absence de dividendes versés en numéraire depuis 2015. La rentabilité a aussi été pénalisée par les retards et surcoûts de chantiers emblématiques comme Flamanville ou Hinkley Point C.

Une équation financière encore incertaine

La Cour des comptes insiste sur un point : la capacité d'EDF à financer ses projets dépendra beaucoup du prix auquel il vendra son électricité. Jusqu'à fin 2025, une partie de la production est encore cédée à prix fixe grâce au dispositif Arenh. Mais à partir de 2026, EDF sera exposé aux variations du marché. Une incertitude majeure pour la viabilité de son modèle économique.

Le Figaro souligne que les magistrats demandent une répartition claire de l'effort financier entre l'État, EDF et les clients finaux. Ils recommandent aussi de définir, avant toute décision sur le programme EPR 2, les modalités de partage des risques entre l'État et l'entreprise. Le rapport invite en outre EDF à revoir son portefeuille de filiales et à envisager des cessions, totales ou partielles, pour dégager de nouvelles ressources.

A la tête du groupe depuis mai, Bernard Fontana devra également clarifier la politique de dividendes, alors que l'État a réclamé deux milliards d'euros en 2024. La Cour insiste enfin sur un suivi plus rigoureux de la rentabilité des projets, en particulier dans les énergies renouvelables.

Sans réforme claire et sans financement sécurisé, l'entreprise publique risque de ne pas disposer des moyens nécessaires pour assumer la relance nucléaire annoncée et la modernisation de ses infrastructures.