Frédéric Pujol (Idate) "Le LTE ne peut faire que de la voix sur IP"
Alors que vient de s'ouvrir le DigiWorld Summit, qui se déroule à Montpellier en partenariat avec le JDN, le directeur de la practice Haut débit mobile de l'Idate revient sur les modalités d'attribution des licences 4G.
JDN. A quel process d'attribution des licences LTE doit-on s'attendre pour la France ?
Frédéric Pujol. L'Arcep va l'annoncer avant la fin de l'année. Il s'agira d'arbitrer entre deux objectifs : maximiser les revenus des enchères, ou maximiser la couverture des zones rurales. En France, les opérateurs peuvent faire du refarming dans la bande de fréquence de 800 MHz, c'est-à-dire utiliser d'autres technologies que le GSM, HSPA et HSPA+ en particulier. Le process est un peu lourd, mais il peut permettre de couvrir plus rapidement les zones rurales. Plus généralement, la France s'en sort bien, car l'Arcep a décidé d'allouer la même quantité de spectre à tous les opérateurs. La situation est donc moins complexe qu'au Royaume-Uni par exemple. De plus, les opérateurs collaborent sur les zones blanches. Cela permet de jouer sur la valorisation du spectre du dividende numérique.
Finalement, la France n'est donc pas en retard par rapport aux autres pays d'Europe. L'Allemagne sera le premier pays à commercialiser une offre LTE, mais la France sera peut-être le deuxième. Sans compter bien sûr la bande de 2,6 GHz, déjà attribuée en Europe du Nord.
A quel niveau de prix soit-on s'attendre pour les licences LTE en France ?
En Allemagne, le prix était de 70 centimes d'euro par MHz par habitant pour le dividende numérique, comme d'ailleurs aux Etats-Unis (pour leur bande 700 MHz, ndlr). En France, tout dépendra des critères retenus par l'Arcep, qui font actuellement l'objet de négociations avec le gouvernement. Mais on sera a priori plus proche de 70 centimes que de 5 ou 6 euros, valeur atteinte pour les licences 3G en 2000-2001 en Allemagne et au Royaume-Uni. Ce plafond ne sera plus jamais atteint.
Qu'en est-il de la bande de fréquence de 2,6 GHz ?
Elle permettra d'apporter plus de capacité dans les villes. Sur cette bande de fréquences, il y aura plus de place pour tous les opérateurs, donc le prix sera plus faible. En France, a priori, les deux bandes - 800 MHz et 2,6 GHz - seront vendues ensemble. Mais il est possible qu'un plafond soit fixé pour chaque opérateur. C'est peu probable, mais cela pourrait influer sur la valorisation finale.
Le LTE ne permet pas de faire passer de la voix. Est-ce un problème pour les opérateurs ?
Actuellement, le LTE ne peut faire que de la voix sur IP. Aujourd'hui, les opérateurs acheminent donc la voix sur leurs réseaux 3G. Le premier opérateur qui proposera de la voix sur LTE devrait être AT&T en 2013. Mais cela nécessite d'avoir un sous-réseau qui supporte l'IMS, or cette technologie est assez peu répandu en Europe.
Pour les opérateurs qui ont déjà une bonne couverture 3G, cette particularité du LTE n'est pas gênante, d'autant que d'importants progrès ont été réalisés sur le codage de la voix en mode circuit. Elle est plus embêtante en revanche pour les nouveaux entrants du LTE, comme on en voit aux Pays-Bas et aux Etats-Unis, puisqu'ils sont obligés de passer des accords de MVNO.
Le LTE est très majoritairement utilisé en tant que réseau data. Le système est efficace spectralement et offre en outre du spectre supplémentaire : c'est avant tout une façon de résoudre le problème de l'explosion du trafic data.
Quels autres moyens existent pour absorber l'essor du trafic data ?
Le femto-cell, le HSPA+ à double porteuse, l'offloading sur Wi-Fi, une combinaison de ces solutions... Ou plus simplement des solutions marketing de plafonnement des offres data.