Sans cartographie, point de 5G
C'est au mètre près que le déploiement des antennes 5G est calculé. Ces dernières ont une portée plus faible que celles en 4G, il est donc nécessaire d'en installer davantage sur le territoire pour couvrir un nombre identique de personnes. Pour maximiser les bénéfices de la 5G, les opérateurs doivent donc déterminer le bon emplacement. Leur solution : s'appuyer sur les logiciels de cartographie. "Les opérateurs ont l'habitude de faire appel aux éditeurs de cartographie dans la planification de leurs réseaux. Nous travaillons déjà ensemble depuis plus de 25 ans, sur leurs réseaux cellulaires mais aussi pour le déploiement de la fibre", rappelle Christophe Tourret, PDG d'Esri France, éditeur de systèmes d'information géographiques.
Pour établir leur plan de déploiement, les opérateurs doivent recueillir un maximum d'informations sur l'environnement afin de réaliser un ciblage de l'emplacement adéquat où installer leurs antennes. Ensuite, ils analysent les contraintes sur place et font des modèles de radio-propagation pour orienter au mieux leurs antennes. "Selon l'une de nos études, utiliser nos données réduit leurs coûts de 40% car cela leur évite de se rendre sur place pour recueillir des informations. Nous avons 400 voitures dans le monde pour capter des données sur les infrastructures afin d'en créer des modèles et déterminer virtuellement le meilleur emplacement, au lieu d'envoyer des techniciens faire des rectificatifs après l'installation", souligne Bruno Le Clerc, head of customer solutions chez Here Technologies.
L'éditeur de la plateforme de données et de services de localisation a notamment travaillé avec Verizon aux Etats-Unis sur ses déploiements 5G. Selon Nokia, qui numérise les déploiements 5G, ce procédé réduit les visites sur site et améliore la qualité de l'installation de l'ordre de 30%. Le constructeur finlandais, partenaire de Here Technologies, a précisé dans un communiqué que son système "fournira intelligemment des commentaires sur la disponibilité de l'espace pour placer des équipements spécifiques, sans avoir besoin d'une visite sur place".
"Nous pouvons offrir une précision au mètre près et une modélisation 3D des bâtiments, ce qui est précieux pour la 5G"
Car de nombreux paramètres sont à prendre en compte pour le bon fonctionnement du réseau : le mobilier urbain, la démographie, les contraintes techniques et réglementaires… "Auparavant, les opérateurs pouvaient recourir à l'imagerie satellite pour déterminer où placer leurs antennes. Mais avec la 5G, ce n'est plus possible car ces images ne permettent pas de connaître la canopée des arbres ou les lampadaires, trop fin pour être visibles", observe Bruno Le Clerc, qui échange par ailleurs avec un industriel français pour estimer l'impact des vitres sur la propagation du réseau 5G.
Pour Christophe Tourret, PDG d'Esri, la simulation 3D est un véritable "game-changer" dans la planification des réseaux 5G. "Nous pouvons offrir une précision au mètre près et une modélisation 3D des bâtiments, ce qui est précieux pour la 5G en raison du caractère point à point de la communication entre une antenne et un mobile", affirme-t-il. Bouygues Telecom et SFR utilisent notamment les logiciels d'Esri pour cet usage. La simulation est par ailleurs un moyen pour les opérateurs de travailler sur la 5G sans se rendre sur le terrain. Orange a affirmé que le second confinement ne retardera pas le déploiement de la 5G en France.
Au-delà de la simulation destinée à l'installation, les opérateurs recourent à la cartographie pour évaluer la qualité de services de leur réseau selon les bandes de fréquence. "La visualisation des données de couverture est stratégique pour eux", confie Christophe Tourret. La cartographie leur permet d'anticiper les nouveaux usages, notamment pour le développement des véhicules autonomes. "En connaissant précisément la qualité du signal sur chacune des routes, les constructeurs automobiles peuvent sélectionner le meilleur opérateur pour les services connectés et pourront offrir des services à forte valeur ajoutée dans leurs futurs véhicules autonomes", indique Bruno Le Clerc. Enfin, avec la 5G, les opérateurs ciblent aussi une clientèle d'industriels et ils doivent être en mesure de simuler et visualiser l'essor des objets connectés pour prévoir l'augmentation du trafic sur leur réseau.