Vers une ubérisation de la santé en France ?

La téléconsultation, seule, ne permet de résoudre qu'un faible nombre de besoins des personnes. Pour pleinement jouer son rôle, elle doit d'être couplée à une intelligence artificielle médicale.

Nous – entreprises, individus, politiques – faisons face collectivement à une crise sans précédent dans l'histoire moderne. Personne n'aurait pu imaginer son ampleur -de même que la crise sociale et économique-, et l'impact qu'elle aurait sur l'équilibre de nos vies. Penser que la crise a pu être aggravée par les actions des décideurs politiques d'hier et d'aujourd'hui est concevable mais cette crise est là. Il nous faut impérativement agir sur ses conséquences sanitaires sociales et économique. De nombreuses questions demeurent et il nous faut rester humbles devant cette menace et continuer à lutter tous ensemble. En effet, nous ignorons beaucoup des aspects de ce virus. Nous constatons la gravité variable de sa virulence, avec des facteurs qui interviennent indépendamment du profil des personnes touchées, qu’elles soient en bonne santé ou non, jeune ou moins jeune.

Limiter la propagation virale est aujourd’hui possible grâce à la mise en place des gestes barrières, au port du masque et au confinement. La démonstration est désormais évidente. C’est un effort collectif qu’il est nécessaire de poursuivre. Ensemble nous luttons contre le Covid-19

Dans ce contexte, l’accès généralisé à la santé doit être renforcé. Chacun doit avoir la possibilité de bénéficier de la médecine augmentée. En s’appuyant sur des dispositifs médicaux de santé connectée, il s’agit d’associer son médecin, à distance, au "Médecin Virtuel". C’est là la chance et l’opportunité de retrouver l’accès au bon médecin. Quand il le faut. Qu’il y ait eu on non la présomption du Covid-19 dans les symptômes éprouvés par les personnes.

L’accès à la santé ouvert à chacun, dans tout territoire, de l’ultra-urbain à l’hyper-rural, suppose une véritable re-mutualisation des Français. Le constat est en effet sans appel : un Français sur quatre admis en réanimation a dû assumer personnellement ses frais d’hospitalisation. Ceci ne doit plus jamais se reproduire, jamais ! Nous l’observons, des barrières de natures diverses se sont dressées devant nous sur le chemin de la santé. Barrières induites par l’opacité du système.

Il nous est promis le remboursement à 100% par la sécurité sociale lorsque nous sommes pris en charge à l’hôpital. Mais il peut nous rester à payer des sommes de l’ordre de 5 000 euros ou de 10 000 euros à la sortie des services de réanimation. Si nous ne sommes pas couverts pour ces dépenses par une assurance santé, comment faire ?

Barrières générées par une promesse non tenue :  comment continuer à accorder sa confiance en un système autrefois admiré par tous pour son caractère universel mais qui ne permet plus de se soigner vraiment ? Malgré la somme de nos cotisations sociales acquittées régulièrement, les sommes à payer pour les soins augmentent tout aussi régulièrement. Quand bien même pourrions-nous assumer ces coûts, nous n’avons aucune certitude quand à la possibilité d’être pris en charge par le bon professionnel de santé quand il le faut.

Barrières générées par la disponibilité des professionnels de santé : près d’un Français sur deux n’a pas de médecin référent, et un médecin sur deux ne prend plus de nouveau patient. Comment s’y retrouver lorsque le système de santé et son financement reposent sur un parcours de soins qui repose lui-même sur le médecin référent, alors qu’il n’y a plus de médecin derrière la porte ?

Barrières générées par un conflit d’intérêts de plus en plus perceptible : les géants de l’assurance et du e-commerce semblent décider graduellement de qui a et qui aura le droit ou non de se soigner malgré toutes les précautions apparentes du législateur,

La crise sanitaire a mis en lumière cette réalité. Mais elle a aussi mis en exergue de nouveaux points d’accès à la santé, qui promettent de lever ces barrières, au moins en  partie.

Plus de transparence, une re-mutualisation nécessaire, un développement de plateformes d’accès de proximité à la santé pour tous(tes), doivent aujourd’hui s’inscrire dans une nouvelle stratégie de la santé en France. 

L'e-santé s’offre comme un sésame

Le digital est un outil de facilitation. Il s’adapte bien à la relation patient-praticien. Cependant il nous faut être vigilant à ce que son emploi soit bien un gage de médecine augmentée, et non pas de marge augmentée pour des acteurs centraux.

Dans cette phase d’évolution de l’offre de soins, le péril est de basculer vers une "ubérisation" de la santé. Cette "ubérisation" serait un facteur de dégradation de la qualité de prestations de santé. En effet, la téléconsultation, seule, ne permet de résoudre qu’un faible nombre de besoins des personnes. La téléconsultation, pour pleinement jouer son rôle, doit d’être couplée avec l’assistance du médecin virtuel - une IA médicale - et doit aussi s’appuyer sur des dispositifs médicaux connectés pour leur utilisation à distance.

Durant le confinement de ce printemps 2020, nous avons collectivement eu accès aux différentes offres de téléconsultation proposées par des plateformes. Et certaines sont sérieuses et engagées pour une qualité de soins exemplaire. Les Français ont découvert à travers elles la possibilité de télé-consulter comme l’on peut accéder à l’eau par un robinet.

Cependant quelle en est la pertinence si la téléconsultation doit nous renvoyer systématiquement vers un médecin en ville, pour former un diagnostic ?

Nous le voyons, en tant qu’utilisateur, nous devons nous adresser aux plateformes de télémédecine offrant la médecine augmentée, celles qui s’appuient sur le médecin virtuel et la santé connectée pour répondre au plus près aux besoins de chacun d’entre nous. Il est nécessaire, voire crucial, de permettre toute la transparence sur la réalité des offres des différents acteurs de télémédecine.

La télémédecine et l’usage que les Français en ont fait à l’occasion du confinement ont ouvert de grands espoirs. Toutefois, le risque est grand d’avoir généré un profond effet déceptif du fait d’un service rendu, limité, et d’un niveau, réduit, des soins qu’elle a délivrés.

Les Français se sont engagés sur de nouveaux chemins d’accès à la santé. Pour autant que nous leur apporterons toute la transparence nécessaire, ils emprunteront un parcours confortable et adapté à chacun.

Les nouveaux comportements des Français induits par la crise sanitaire sont amorcés. Le digital est un outil qui s’impose comme facilitateur. Ne trompons pas les chances d’une santé augmentée offertes par ces nouveaux chemins d’accès. Il faut les rendre lisibles par la transparence, solides et pérennes par la mutualisation des moyens.