Google Docs vs Word : à chacun son IA pour mieux rédiger

Google Docs vs Word : à chacun son IA pour mieux rédiger Auto-complétion, auto-correction et suggestions personnalisées... Microsoft et Google rivalisent d'innovations pour accélérer la rédaction de documents et rendre ces derniers plus lisibles.

L'intelligence artificielle gagne désormais les traitements de texte. Via la vérification orthographique et grammaticale, ces derniers déchargeaient déjà l'utilisateur d'un lourd fardeau. Grâce au machine learning, ils vont un cran plus loin en proposant de finir les phrases ou d'améliorer le style. Le terrain est massivement investi par Microsoft et Google. Tous deux ont commencé à intégrer des fonctions d'IA à leur application de traitement de texte respective : Word et Google Docs.

Dans cette bataille de l'IA, Google a tiré le premier. Lancée en version bêta en novembre dernier, sa fonction Smart Compose est disponible, depuis février, à tous les clients de G Suite. Déjà à l'œuvre dans Gmail, Smart Compose prédit ce que le rédacteur s'apprête à écrire en fonction de son historique d'utilisation. Le dispositif repose sur le principe de l'auto-complétion que tout un chacun a pu tester en rédigeant une requête dans un moteur de recherche. En tapant sur la touche de tabulation, vous acceptez les suggestions qui vous sont proposées.

Ecriture semi-automatisée

Démonstration de Smart Compose dans un document Google Docs au format mobile. © Google

Smart Compose complète non seulement les débuts de phrase mais corrige aussi rétroactivement les fautes d'orthographe et erreurs de grammaire éventuelles. Pour cela, il met en évidence le mot qui pose problème en le soulignant en pointillés. Afin de rendre la lecture plus fluide, Smart Compose fait également la chasse aux répétitions.

Plus vous utiliserez Smart Compose et plus celui-ci s'adaptera à votre style. C'est là la promesse du machine learning. A l'image de Smart Reply, le service de réponse automatique de Gmail, qui va jusqu'à reprendre les expressions propres à l'utilisateur pour proposer une réponse à un e-mail.

Pour l'heure uniquement disponible en anglais, Smart Compose devrait couvrir d'autres langages dans les prochaines semaines. La fonction est activée par défaut. Pour la désactiver, il faudra décocher la case "Afficher les suggestions de composition intelligente" dans le menu Outils > Préférences.

Autre brique de Google Docs bénéficiant du machine learning : le moteur de recherche (Explorer) que l'on retrouve dans le coin inférieur droit de l'interface graphique. Explorer propose des suggestions de contenus en se basant sur l'analyse du document en cours d'édition : des pages web, des images à insérer ou encore des documents connexes stockés dans l'espace Google Drive de l'utilisateur. Autant d'éléments permettant d'enrichir le texte.

Un coach dans Microsoft 365

Microsoft planche sur des fonctionnalités similaires. Le 21 avril, les abonnements grand public d'Office 365, rebaptisé pour l'occasion Microsoft 365, ont intégré Microsoft Editor. Jusqu'alors connu sous le nom d'Ideas, cet éditeur est conçu pour améliorer la lisibilité d'un document Word. Disponible dans plus de 20 langues dont le français, il fait des recommandations afin de rendre les phrases plus concises, claires et inclusives.

Editor indique le temps de lecture estimé et pointe les expressions qui peuvent présenter des difficultés de compréhension, un acronyme peu connu par exemple. En cas de doute sur une formulation, il suffit de mettre en surbrillance le mot ou la phrase en question et de cliquer sur le bouton droit pour bénéficier de suggestions.

 

L'éditeur de Microsoft peut aussi rendre service à des rédacteurs professionnels, journalistes ou écrivains, comme l'explique le groupe américain dans un billet de blog. Afin d'éviter toute forme de plagiat, un "vérificateur de similarité" pourra identifier, dans les prochains mois, les contenus potentiellement non-originaux. Les enseignants pourront, de la même manière, faire la chasse aux copier-collers.

Parmi les alternatives les plus sérieuses à G Suite et Office 365, Zoho Office intègre depuis février 2019 une assistante virtuelle. Baptisée Zia, cette IA évalue la lisibilité d'un document et suggère de nouvelles tournures de style, en évitant par exemple les formes passives.

Des entreprises encore plus captives ?

Pour Arnaud Rayrole, directeur général du cabinet de conseil français Lecko, cet apport de l'IA n'est qu'une évolution naturelle des suites bureautiques. Alors que, par le passé, ces solutions étaient dépourvues d'intelligence, le passage massif dans le cloud et la généralisation de la coédition de documents en ligne ont permis aux éditeurs d'accéder à l'historique des usages nécessaire à la mise au point des modèles d'apprentissage.

Dans ces apports de l'IA à la rédaction de documents, l'expert y voit un risque de formatage de la pensée. A ses yeux, le piège est d'autant plus séduisant que les utilisateurs seront enthousiastes à l'idée d'être assistés dans leurs tâches de rédaction. Arnaud Rayrole rappelle que les données secondaires, issues de la phase d'entraînement des algorithmes, appartiennent à celui qui les collecte, en l'occurrence l'éditeur.