IA...du POC à la mise en production : comment vraiment passer à l'échelle ?
Alors que les annonces se multiplient et que les expérimentations fleurissent, seules 26 % des entreprises parviennent à transformer leurs projets d'intelligence artificielle en création de valeur.
Pourquoi un tel écart entre ambitions stratégiques et réalité opérationnelle ? La réponse est moins technologique qu’organisationnelle…
L’illusion du pilote isolé
La course à l’IA pousse nombre d’entreprises à « faire de l’IA » pour cocher une case – souvent sous la forme de projets pilotes ponctuels, non reliés véritablement aux enjeux métiers prioritaires. On expérimente un chatbot ici, une automatisation de processus là… sans cap clair ni alignement stratégique avec des initiatives coûteuses, cloisonnées, qui peinent à passer à l’échelle. Un constat qui démontre clairement qu’une approche efficace commence par l’identification rigoureuse des points de friction. Où perd-on du temps, de la productivité, de la qualité ? C’est à partir de ces irritants que l’IA doit être mobilisée, non l’inverse. Ce pragmatisme opérationnel est la seule voie vers un ROI mesurable.
Sans gouvernance de la donnée, pas d’IA utile
Le deuxième obstacle majeur est celui de la donnée. Même les modèles les plus puissants sont inopérants si les informations sont éparpillées, stockées dans des silos, ou inaccessibles. La structuration et la centralisation des connaissances, via des outils collaboratifs adaptés, ne sont pas un luxe, mais un prérequis.
Certaines entreprises l’ont d’ailleurs bien compris : une fintech européenne en hypercroissance, par exemple, a bâti son système de gestion interne sur une architecture modulaire inspirée des blocs Lego, facilitant la connexion entre données, processus et collaborateurs. Elle a ainsi pu construire un socle informationnel unifié, gage de performance et d’agilité.
Le facteur humain, levier négligé de la transformation
Le troisième frein, souvent sous-estimé, est humain. 70 à 80 % des projets IA échouent non pour des raisons techniques, mais faute d’adoption. Derrière la résistance des équipes se cachent des inquiétudes légitimes : manque de clarté sur les objectifs, absence de formation.
Impliquer les collaborateurs dès les premières phases du projet est fondamental. Identifier des ambassadeurs métiers, former des utilisateurs clés, miser sur l’acculturation continue : autant de leviers pour transformer l’IA en opportunité plutôt qu’en menace. Il est également essentiel d’identifier des ambassadeurs du changement au sein de l’organisation. Ces « architectes du changement » — des utilisateurs précoces et engagés — joueront un rôle clé pour démontrer des cas d’usage concrets et instaurer la confiance auprès de leurs collègues.
Piloter par l’usage, pas par l’effet d’annonce
Autre aspect trop souvent négligé : déployer un outil ne suffit pas : encore faut-il mesurer son impact réel. Combien d’employés l’utilisent ? À quelle fréquence ? Pour quels bénéfices ? Croiser données d’usage et retours qualitatifs permet d’affiner la stratégie, de corriger les trajectoires, et surtout d’identifier les bons cas d’usage à répliquer.
Les entreprises commencent souvent par des usages simples, comme l’assistance à la rédaction, avant d’élargir progressivement le champ d’application de l’IA à la gestion de projet ou à des tâches sur mesure. Ce dialogue constant avec le terrain permet de faire émerger de nouveaux cas d’usage et d’ajuster la stratégie en continu. Ce cheminement progressif, nourri par l’expérience, s’avère plus efficace que les approches descendantes.
L’IA comme système vivant
L’IA ne doit pas être pensée comme une solution figée, mais comme un système évolutif. Les entreprises qui gagneront cette course à l’IA sont celles qui adoptent une logique d’apprentissage continu, avec une gouvernance agile, centrée sur les usages réels.
La promesse de l’IA est bien réelle — mais elle ne se concrétise pas automatiquement. Combler le fossé entre expérimentation et adoption à grande échelle demande plus que de tester les derniers outils ou suivre les tendances. C’est en définissant une stratégie claire, en s’appuyant sur des bases de données solides, en adoptant une mise en œuvre inclusive et en cultivant une culture d’amélioration continue que les entreprises pourront passer de l’expérimentation à une création de valeur tangible.