L'adoption de l'IA en entreprise : entre promesses et réalité

Les entreprises françaises adoptent l'IA mais font des erreurs : partir de la tech au lieu du problème, négliger la qualité des données et oublier les métriques de succès.

L'intelligence artificielle fait désormais partie du quotidien des entreprises françaises. Mais derrière l'enthousiasme ambiant se cachent des écueils que révèlent les retours d'expérience des premiers adopteurs. 

Oublier l'IA pour se concentrer sur le problème

" Forget about AI, what is your biggest problem?" Cette question de Rick Rioboli, CTO de Comcast, devrait être gravée au fronton de chaque direction informatique. Trop d'entreprises françaises commencent par la technologie – "nous devons faire de l'IA" – plutôt que par le besoin réel. Résultat : des projets gadgets qui impressionnent en démonstration mais n'apportent aucune valeur métier et surtout ne produisent aucun ROI.

L'approche la plus logique consisterait, dans un premier temps, à identifier un problème à fort impact business, puis à déterminer quelle solution IA peut effectivement le résoudre. Une inversion de perspective qui semble évidente mais reste minoritaire dans les faits.

La donnée, nerf de la guerre

Le message est clair : tout commence par une base de données ordonnée avant de rêver d'IA, commencez par auditer vos données : " Sans données unifiées et accessibles, même les initiatives d'IA générative les plus avancées peineront à délivrer de la valeur réelle. " 

Les modèles d'IA générative, formés sur Internet, ne connaissent pas vos données propriétaires. D'où l'importance cruciale du RAG (Retrieval Augmented Generation) pour contextualiser l'IA avec vos informations métier. Mais gare aux enjeux de sécurité et de gouvernance que cela implique, souvent sous-estimés par les équipes projet.

Métriques et garde-fous : les oubliés de l'IA

Définir dès le départ, il faut définir des indicateurs de succès quantifiables : NPS, temps de réponse, taux de résolution... Sans métrique claire, impossible de distinguer le vrai succès du mirage technologique. Et surveiller en continu : 74 % des entreprises utilisant l'IA générative constatent un retour sur investissement, mais uniquement parmi celles qui suivent leurs indicateurs de près.

Gouvernance, gestion des risques, conformité réglementaire... Avec l’entrée en vigueur progressive de l’AI Act européen, mieux vaut anticiper que subir. Sinon, les organisations risquent de multiples problèmes de conformité si elles ne comprennent pas comment les données de leur IA ont été générées.

Le défi français de l'IA

Ces enseignements résonnent particulièrement en France, où nos entreprises accusent souvent un retard dans l'adoption technologique ( 10% des entreprises implantées dans l’Hexagone utilisent une technologie liée à l’IA contre 13% en moyenne en Europe, et même 28% aux Pays-Bas, selon une étude de l’Insee). Mais ce retard peut devenir un avantage : celui d'apprendre des erreurs des pionniers.

Les entreprises qui adoptent l'IA “intelligemment” revendiquent 1,5 fois plus de croissance. Mais "intelligemment" implique de dépasser l'effet de mode pour construire une stratégie IA solide, éthique et durable.

L'IA n'est pas une course, c'est un marathon. Et dans un marathon, mieux vaut partir avec la bonne stratégie que le plus vite. Nos entreprises françaises ont cette opportunité : celle de créer des programmes IA scalables, transparents et adaptés à leurs besoins spécifiques.

Il est temps de passer de l'IA spectacle à l'IA utile. Nos dirigeants sauront-ils saisir cette chance ?