Watson Assistant, futur Alexa d'entreprise ?

Watson Assistant, futur Alexa d'entreprise ? Basée sur l'IA d'IBM, la plateforme est taillée pour motoriser des applications conversationnelles centrées sur la gestion de la relation client.

IBM érige Watson Assistant en assistant intelligent conçu pour gérer à la fois les interactions vocales et textuelles. Mais à la différence du positionnement grand public d'Amazon Alexa ou de Google Assistant, il s'agit d'une technologie avant tout BtoB. Une plateforme, basée sur l'offre de services cloud d'intelligence artificielle d'IBM (Watson), sur laquelle les entreprises peuvent bâtir et héberger leurs propres assistants de gestion de la relation client ou salarié. Bénéficiant des API de Watson, les applications conversationnelles qu'elle met en œuvre peuvent ensuite être délivrées via tout type de canal digital : sites web, apps mobiles, messageries instantanées, et même par le biais des assistants grand public comme ceux évoqués plus haut (où elles pourront venir se nicher sous forme de skills).

Dans une étude parue en avril 2018, Forrester classe Watson Assistant en tête des plateformes numériques conversationnelles les plus performantes du marché, reléguant celles d'Amazon, Google et Microsoft en deuxième ligne. Le cabinet d'études souligne notamment l'habileté d'IBM à combiner un environnement conversationnel robuste à des outils "developer-friendly". Pour Forrester, Watson Assistant revêt malgré tout une approche plus orientée vers les professionnels que la grande consommation. "Watson Assistant s'accompagne d'un analytics puissant qui permet aux développeurs de réagir en continu à l'évolution des échanges. Ceci, associé à l'expertise d'IBM dans l'entreprise et l'industrie, contribue à en faire une option idéale pour les solutions et environnements d'entreprise complexes", expliquent Rob Koplowitz et Michael Facemire, analystes au sein du cabinet américain.

Revers de la médaille, Watson Assistant serait relativement moins attrayant en dehors des murs de l'entreprise. "C'est un terrain où les fournisseurs d'appareils positionnés sur des marchés de masse et dotés d'expertises en solutions conversationnelles de grande consommation sont mieux placés", estiment Rob Koplowitz et Michael Facemire.

Une bibliothèques de skills

Côté usages, Watson Assistant cible deux secteurs privilégiés : la voiture connectée d'une part, la gestion de la relation client dans l'hôtellerie d'autre part. Deux déclinaisons de la plateforme ont d'ailleurs été dessinées pour chacun d'eux, Watson Assistant for Automotive pour le premier, Watson Assistant for Hospitality pour le second. Dans le sillage d'IBM, Amazon vient d'ailleurs tout juste de lancer une déclinaison de son propre assistant pour l'hôtellerie (Alexa for Hospitality), centrée elle-aussi sur les problématiques de CRM.

Le principal avantage de Watson Assistant ? Selon IBM, il résiderait dans sa capacité à s'adapter à la demande d'un interlocuteur via une personnalisation des réponses en fonction du contexte. "Une chaîne d'hôtels aura ainsi la possibilité d'envisager de nouveaux scénarios. Un client arrivant plus tôt que prévu à son hôtel pourra par exemple solliciter l'assistant sur mobile pour vérifier la disponibilité de sa chambre puis communiquer ses données d'enregistrement à distance. Une fois sur place, il continuera d'interagir avec lui par le biais d'une enceinte vocale installée dans sa chambre", détaille Christophe Borde, head of marketing for IoT chez IBM. "Il pourra commander d'allumer la télévision. Ses chaînes habituelles lui seront alors automatiquement proposées. S'il a coutume de demander un oreiller ou une couverture complémentaire, l'assistant lui indiquera proactivement dans quelle armoire les trouver. S'il a oublié d'apporter un nécessaire de toilette, il lui indiquera la boutique ou les boutiques les plus proches où dénicher l'article désiré."

Embarqués dans une voiture, les chatbots basés sur Watson Assistant auront de même pour vocation de proposer une expérience personnalisée. Au programme : guidage automatisé des véhicules en fonction du trafic et de l'historique des déplacements, réglage personnalisé de la température au regard de la météo et des préférences du conducteur, etc.

"Nous mettons en place des équipes de design thinking avec les clients pour imaginer les futurs produits"

IBM planche en parallèle sur d'autres mises en application. "Nous montons des équipes mixtes de design thinking combinant nos consultants avec des experts côté clients pour imaginer de futurs produits", explique Christophe Borde. Sur son site, IBM liste divers cas d'usage de Watson Assistant, entre autres, dans la distribution, la banque ou encore de l'énergie.

Sous le capot, Watson Assistant fait appel aux briques cognitives de Watson : natural language processing, text-to-speech, speech-to-text, reconnaissance acoustique, traduction automatique, reconnaissance de formes, etc. Baptisée Watson Assistant Framework, une infrastructure permet de concevoir les scénarios et modèles de machine learning souhaités. Capable de se nicher au cœur d'une application iOS si besoin, elle pourra en outre intégrer des sources d'informations externes dans ses calculs prédictifs, telles les données météorologiques produites par The Weather Company (acquis en 2016 par IBM).

Pour accélérer la mise en œuvre de Watson Assistant, IBM met en avant Watson Virtual Agent. Une bibliothèque de bots pré-paramétrés conçus pour répondre à des requêtes déterminées, comme la mise à jour d'une adresse e-mail, le paiement d'une facture ou une question sur des horaires d'ouverture. Dans la même logique, Big Blue a signé un partenariat avec IFTTT en vue d'intégrer à Watson Assistant son service SaaS d'automatisation. De quoi permettre aux utilisateurs de configurer aisément des centaines de petits processus (déclenchement d'alertes en cas de messages importants, envoi automatisé de SMS à des dates données, publication sur les réseaux sociaux…).

18 zones de disponibilité

Dernier gros point fort de Watson Assistant : à l'instar de Watson, il s'adosse au cloud d'IBM. Les agents conversationnels qu'il met en œuvre peuvent ainsi bénéficier des services de ce dernier : IaaS, PaaS, IoT… Mais aussi de ses 18 localisations d'hébergement (ou zones de disponibilité) à travers le monde. Au sein de cette vaste infrastructure figure d'ailleurs une zone située en France. Elle est installée dans le data center de Global Switch à Clichy en région parisienne. A la différence de Microsoft cependant, IBM n'a pas doté son cloud (et par conséquent Watson Assistant) d'une région cloud juridiquement localisée sur le Vieux continent. En Allemagne, son concurrent propose une région Azure dont la structure légale a été déléguée à T-System. L'ESN filiale de Deutsche Telekom l'opère dans ses propres data centers, situés à Magdebourg et Francfort. Les données qui y sont stockées demeurent à 100% sous législation européenne. Elles échappent ainsi théoriquement au Cloud Act américain qui, rappelons-le, oblige toute société de droit US à donner accès à ses infrastructures informatiques à l'administration fédérale des Etats-Unis dans le cadre d'une perquisition. Et ce quelle que soit leur localisation à travers la planète. 

Du côté des références clients de Watson Assistant, IBM met en avant plusieurs noms : Autodesk et le Thomas Jefferson University Hospitals (situés aux Etats-Unis), Chameleon Technology (Royaume-Uni), Motel One (Allemagne), Royal Bank of Scotland (Royaume Uni), UBank (Canada). Pour l'heure, le géant informatique n'a pas encore révélé de noms d'entreprises françaises qui utilisent son assistant. Il se pourrait néanmoins que ce soit le cas d'Orange Bank. En mars dernier, la filiale d'Orange a annoncé avoir développé son agent conversationnel Djingo à partir de Watson, mais sans préciser quelle(s) brique(s) de la plateforme d'IBM il avait précisément déployée(s). Répondant en langage naturel aux demandes des clients, l'application permet par exemple d'effectuer des opérations bancaires ou de bloquer/débloquer une carte de paiement.

Watson Assistant en bref
Points forts Points faibles
- Repose sur le cloud d'IBM (18 zones de disponibilité, dont une en France), 
- Prise en charge du français,
- Bénéficie de l'offre de prestations de services d'IBM Global Services.
- Pas d'hébergement juridiquement isolé du Cloud Act américain,
- Peu adapté à une approche "mass market".