Comment réussir son projet de RPA

Comment réussir son projet de RPA Très structurant, l'automatisation de processus métier peut avoir d'importants impacts sur l'organisation du travail. Elle implique de respecter un certain nombre de bonnes pratiques de gouvernance et de conduite du changement.

Un projet de RPA (pour robotic process automation) n'est pas un projet informatique comme les autres. Automatiser un processus métier peut avoir un impact fort sur les collaborateurs concernés et, plus généralement, sur l'organisation de l'entreprise. La mise en place d'un cadre de gouvernance et un effort particulier dans la conduite du changement font partie des facteurs clés de réussite.

1. Définir les processus éligibles à la robotisation

Il s'agit tout d'abord de définir les processus éligibles à la robotisation. "A contre-courant du discours des éditeurs qui poussent à automatiser à tout-va, tous ne le sont pas", prévient Christophe Radepont, associé et directeur national du conseil opérationnel et outsourcing chez Grant Thornton France. Les processus éligibles sont, selon lui, "à fort volume, répétitifs, dématérialisés et répondant à un arbre de décision logique."

L'entreprise doit aussi définir ses priorités. L'automatisation des processus vise-t-elle à gagner en productivité, à réduire les coûts, à améliorer l'expérience client ou collaborateur, à répondre à un enjeu de conformité ou de qualité ou à mettre en place une nouvelle organisation du travail ? Une fois les processus cibles identifiés, un business case permet de définir les gains qualitatifs et quantitatifs pour chacun.

Christophe Radepont conseille de démarrer par le processus le plus simple et dégageant le plus fort ROI. "Ce qui rassurera sur l'apport de valeur de la RPA", commente l'intéressé. "Ensuite, l'organisation pourra monter en maturité au fil des projets." L'éditeur UiPath propose un cadre méthodologique, baptisé Automation operating model (AOM), pour décrire les opportunités d'automatisation, les qualifier, les prioriser et les gérer dans le temps.

2. Rationaliser le portefeuille technologique

L'automatisation d'un processus peut faire appel à d'autres technologies que la RPA. La reconnaissance optique de caractères (OCR) permet par exemple d'extraire les informations pertinentes à partir de contenus structurés ou non structurés, le machine learning injecte des règles de gestion, la robotic desktop automation (RDA) ou l'approche low / no code permettent aux métiers de mettre le pied à l'étrier, etc.

"Cela ne présente aucun intérêt de faire appel à plusieurs éditeurs spécialisés"

Les plateformes d'hyper automatisation conceptualisées par le Gartner, parmi lesquelles figurent Appian, Automation Anywhere, Blue Prism ou UiPath, permettent de couvrir tout le spectre fonctionnel. "Cela ne présente aucun intérêt de faire appel à plusieurs éditeurs spécialisés", tranche Christophe Radepont.

3. S'interroger sur une possible externalisation

A ce stade, se pose la question de l'internalisation ou de l'externalisation des projets de RPA. "Ce choix dépendra de la culture de l'entreprise et de sa maturité dans le domaine", estime Christophe Radepont. "Les fonctions finance, RH, marketing, achats ou supply chain ont d'importants besoins d'automatisation et la DSI n'a pas toujours suffisamment de temps à dégager pour y répondre. Ce qui pousse à opter pour l'externalisation. Pour les métiers, c'est aussi un moyen de pallier les lacunes fonctionnelles de certains progiciels en passant par un intégrateur tout en s'assurant des conditions de réversibilité."

A l'inverse, "l'automatisation peut être l'occasion de réinternaliser des processus jusqu'alors sous-traités", juge Jérôme Blanchard, directeur des opérations - DAS insurance & financial services chez Hardis Group. "Si les processus ont été externalisés c'est qu'ils sont, a priori, massifs et ne nécessitent pas d'expertise comme la saisie de données."

4. Poser le bon cadre de gouvernance

Les entreprises qui auront fait le choix de l'internalisation créeront un centre d'excellence (CoE), généralement rattaché à la DSI. Dénommé RPA factory, cognitive factory ou automation factory, il a pour vocation d'héberger tous les experts de la robotisation : business analysts, développeurs de robots et éleveurs de robots assurant leur supervision. Ce CoE centralise et expertise les demandes des métiers puis développe les robots tout en garantissant leur conformité aux derniers standards de développement et de sécurité. Une fois le robot en production, il prend en charge sa maintenabilité, tout arrêt pouvant avoir de lourdes conséquences sur l'organisation du travail.

Autre instance de gouvernance à mettre en place, un comité de pilotage et de suivi, associant les métiers et la DSI passera régulièrement en revue le portefeuille des processus éligibles à la robotisation. Il fixera les priorités, définira des choix technologiques et les budgets associés. Il s'assurera, enfin, que le ROI au regard du coût complet d'une robotisation, de la conception à la maintenance, est bien au rendez-vous.

5. Rassurer les collaborateurs

Dans l'inconscient collectif, le terme de robot soulève des craintes, parfois irrationnelles, sur l'emploi. Pour certains collaborateurs, la machine est appelée à les remplacer. Il s'agit donc de sensibiliser les collaborateurs concernés par l'automatisation sur les enjeux de ce type de projet. Les robots ont vocation à les décharger des tâches fastidieuses, répétitives et sans valeur ajoutée.

"Si l'on écoute les éditeurs, le low / no code serait la solution miracle"

La DRH doit être impliquée le plus tôt possible afin d'évaluer les impacts sociaux de l'automatisation d'un processus et envisager les éventuelles requalifications de poste et actions de formation associées. Certains projets particulièrement structurants peuvent conduire les entreprises à informer voire consulter les instances représentatives du personnel en comité social et économique (CSE).

6. Autonomiser les métiers

Le recours à la RPA facilite l'appropriation de la robotisation, le collaborateur "augmenté" par l'automatisation des processus se voyant équipé d'un assistant sur son poste de travail. En téléchargement gratuit sur Windows 10 et Windows 11, Power Automate Desktop (PAD) de Microsoft permet, par exemple, d'expérimenter la RPA en mode test and learn. Depuis une interface 100% graphique, l'utilisateur automatise les tâches répétitives qu'il effectue au quotidien en scénarisant une série d'actions comme un clic de souris ou une saisie au clavier.

Un cran plus loin, l'approche low / no code permet aux utilisateurs avancés d'automatiser des processus métier en développant leurs propres robots. "Si l'on écoute les éditeurs, le low / no code serait la solution miracle", tempère Bastien Jourdan de la Passardière, directeur associé smart automation chez Capgemini Invent. "C'est oublier la dimension IT des projets en matière de gestion des droits, de sécurité, d'urbanisation, de maintenance. Sur le moyen terme, est-ce que donner la main aux métiers pour développer des applications décharge la DSI ou pose plus de problèmes dans la phase de déploiement ?" Une question qui mérite d'être posée. En parallèle, la démocratisation de la RPA devra également être encadrée par la DSI afin d'éviter le développement anarchique de robots.