Carve-Out / Carve-In Data : enjeux et stratégies pour les DSI
Les opérations de fusion, d'acquisition ou de cession se multiplient, entraînant à chaque fois un chantier majeur : la transformation des systèmes d'information.
Dans ce contexte, le carve-out (séparation) ou le carve-in (intégration) deviennent des exercices d’équilibriste : transformer l’existant sans compromettre la continuité, les synergies et la maîtrise des coûts. Pour les DSI, une question décisive demeure : comment les systèmes d’information vont être transformer pour garantir continuité, synergies et maîtrise des coûts ?
Les solutions sont multiples, côté applications comme services d'infrastructure. Pour avancer, il faut définir un plan afin d’élaborer une stratégie, en validant un certain nombre d’objectifs, de contraintes et de principes de travail. C’est ce cadre qui guidera les décisions et la définition de la roadmap.
Nous nous concentrons volontairement sur la dimension data du système d’information (IS, IT et organisation), en laissant de côté les autres composants (fonctionnels, infrastructure).
Deux univers à aligner : le métier et l’IT
Pour élaborer rapidement un plan de séparation ou d’intégration, nous raisonnons en deux groupes de composants data :
Groupe des composants métier
- Données de référence : données clés, stables, à faible variation,
- Modèles de données : sémantique métier, structures et axes d’analyse,
- Cas d’usage des données : portefeuille d’usages exploitant la donnée,
- Organisation de la donnée : gouvernance, sécurité, conformité, responsabilité métier.
Groupe des composants IS-IT
- Sources de données : applications alimentant ou utilisant la donnée,
- Architecture data : services, outils et programmes supportant la donnée,
- Modèle de delivery des données : équipes et modes opératoires de livraison des jeux de données aux cas d’usage.
Pour chaque groupe, le DSI doit définir une stratégie adaptée aux objectifs stratégiques et opérationnels ainsi qu’aux contraintes identifiées.
Les 6 objectifs stratégiques pouvant servir de "boussole"
- Assurer la continuité des opérations, de leur management et de leur pilotage,
- Optimiser ou réduire les coûts du TSA (Transfer Service Agreement), souvent lourds si la transition traîne,
- Converger vers la cible métier et IS-IT chaque fois que c’est réalisable,
- Evaluer les transformations ou améliorations à apporter, et déterminer leur rentabilité,
- Définir, structurer et planifier la cible finale et sa mise en œuvre,
- S’assurer l’atteinte des synergies visées.
Pour l’élaboration de la cible, ainsi que la construction du plan d’actions de sa mise en œuvre, on recherchera le "meilleur équilibre" entre quatre niveaux de performance :

Cet équilibre pourra être ajusté au fur et à mesure : un projet de simplification réalisé plus tôt que prévu pourrait faire disparaître un projet d’harmonisation futur, qui n’aurait plus lieu d’être.
L’intégration commence souvent… par la donnée client
Les données de base constituent un composant métier présentant un niveau de criticité élevé : un référentiel Client, par exemple, conditionne directement l’exploitation des synergies commerciales.
Lorsque deux modèles de données client coexistent – celui de la société acheteuse et celui de la société acquise –, avec plusieurs référentiels non normalisés ni mis en qualité, les travaux nécessaires s’annoncent conséquents.
Sur le plan stratégique, la priorité est claire : la réorganisation commerciale ne sera efficace que si client est harmonisé et mutualisé. C’est la condition pour créer rapidement de la valeur. L’obtention de ce résultat est donc retenu comme prioritaire.
Sur le plan technologique, la solution la plus simple consiste à mettre en place un outil de Master Data Management (MDM), éventuellement de façon transitoire. Il devient le "point de vérité", auquel les applications existantes s’abonneront, évitant ainsi des transformations lourdes et immédiates sur leurs modèles de données.
Reste à atteindre l’objectif d’harmonisation tout en limitant l’effort de transformation.
Opter pour le modèle le plus large, intégrant l’ensemble des attributs existants, peut manquer de cohérence métier et n’apporter ni clarté ni simplification. À l’inverse, se limiter au plus petit dénominateur commun – les seuls attributs présents dans toutes les bases – appauvrirait la valeur métier.
Partir des usages, pas des systèmes
Mais ces deux tactiques ne généreraient pas une valeur métier suffisante au regard de l’effort de synergie consenti. La meilleure tactique sera plutôt de :
- Définir précisément les processus et les besoins métiers qui mobiliseront la donnée client,
- Structurer le modèle de données en fonction de ces usages,
- Construire les programmes de migration permettant de mettre à niveau le MDM avec une base cible,
- Abonner à ce référentiel consolidé l’ensemble des applications consommatrices.
- Lancer la nouvelle organisation commerciale, désormais appuyée sur une donnée harmonisée.
Ainsi le profil de notre plan d’actions sera le suivant :

Une étape de simplification — rationaliser certaines applications consommatrices — pourra intervenir plus tard.
Elle apparaît comme moins prioritaire : l’essentiel est que, grâce à la transformation du référentiel client, les synergies commerciales soient rapidement activées.
Le cas du référentiel client n’est qu’un exemple. La même logique doit s’appliquer à tous les composants data. Au-delà de la technologie, l’enjeu pour le DSI est de construire une vision data commune, capable de traverser les changements d’organisation et de soutenir durablement la performance.