Réparer la boussole collective : pour une opinion publique vraiment publique
Crise politique, défiance , débats éclatés: la France manque d'un espace commun de dialogue et de synthèse. Pour combler ce vide, mesurons l'opinion comme un bien commun ouvert et transparent.
La crise politique s’installe. Les plateaux télé saturent de certitudes et les fils d’actualité des réseaux sociaux débordent d’indignations. On devine les stratégies des partis, on lit les commentaires de ceux qui s’expriment le plus sur les réseaux sociaux, mais on reste aveugle à la majorité silencieuse — ceux qui ne commentent pas et ne postent pas. Et cette majorité aimerait pourtant être entendue : selon OpinionWay, 83 % des Français appellent à plus de démocratie participative. Ils ne veulent pas seulement être consultés, mais aussi disposer de repères partagés pour comprendre ce que pensent leurs concitoyens — et se comprendre entre eux. Le débat national manque aujourd’hui d’un véritable espace de mesure et de dialogue, où chacun puisse contribuer sans s’exposer et situer sa voix dans le concert collectif.
Ce besoin devient vital à l’heure où la dette se creuse et où la classe politique semble douter de ce que le pays est prêt à accepter, à soutenir ou à changer. Face à une crise sans boussole, il est temps de redonner une chance à l’intelligence collective : permettre à chacun de comprendre, de participer et de contribuer à la lucidité commune.
C’est normalement le rôle des sondages d’opinion. Mais le sondage, censé être un outil d’intelligence collective, s’est refermé sur lui-même. Les instituts d’étude produisent des instantanés, souvent pour le compte d’institutions ou de grandes entreprises. Les sujets, la formulation et les réponses dépendent de ceux qui les commandent. Les résultats sont rarement publiés, sauf quand ils servent l’agenda du commanditaire. Les répondants ne sont pas « les Français », mais des panélistes rémunérés. La rémunération crée un biais psychologique — et attire la fraude que le redressement statistique ne corrige pas. Résultat : la mesure de l’opinion reste un processus fermé à chaque étape, là où elle devrait être partagée. Entre bulles algorithmiques qui enferment chacun dans ses opinions et sondages ponctuels qui figent un instant sans le relier au suivant, le débat public s’est fragmenté.
Pourtant, les solutions existent. Les civic tech ne sont pas une mode : elles sont une nécessité démocratique. La question n’est pas de digitaliser le débat, mais de le structurer. À l’heure de l’intelligence artificielle, il devient urgent d’activer notre intelligence collective bien réelle — avec des outils sincères, robustes et capables d’aider chacun à se situer, de permettre aux élus de prendre le pouls de leur territoire et d’aider tous les citoyens à comprendre ce qui les rassemble ou les divise.
Ce qu’il nous faut aujourd’hui, c’est un espace continu, transparent, accessible à tous, où l’opinion se mesure en temps réel, sans intermédiation ni filtre. Une application gratuite, anonyme, qui permette à chacun de poser des questions, d’y répondre et de voir le résultat évoluer sous ses yeux. Un outil où les sujets les plus débattus émergent naturellement, grâce à un algorithme public. Et surtout, sans commentaires : un espace mesuré, pas un ring. Une boussole collective pour transformer le bruit en signal et le débat en intelligence collective — pour que le pays se comprenne enfin autant qu’il s’exprime.
Cette application existe depuis trois mois. Elle s’appelle Politês — et remet la mesure de l’opinion entre les mains de ceux qui la fabriquent : les citoyens.
Source : OpinionWay : Les Français et la concertation citoyenne (décembre 2021)