Après avoir avalé
Media Metrix Europe, AdRelevance, @Plan et Netvalue,
Nielsen NetRatings s'est imposé comme le leader
du marché mondial de la mesure d'audience sur
Internet. C'était sans compter sur ComScore,
autre géant américain, longtemps resté
dans l'ombre. En rachetant en juin dernier l'institut
de mesure d'audience MMXI à un Jupiter exsangue,
ComScore a pourtant démontré sa volonté
de se placer en concurrence frontale face à Nielsen
NetRatings.
Quelques
mois avant cette acquisition, fin 2001, Nielsen NetRatings
espérait, lui aussi, récupérer
Jupiter MMXI. Mais l'opération ne sera pas du
goût de la la FTC,
la Commission fédérale du commerce américaine. Début
2002, celle-ci émet un avis négatif sur
la fusion, les deux firmes préférant alors
faire machine arrière (lire l'article
du JDNet du 20/02/02). La situation financière
du groupe Jupiter ne lui pas permettra pas de tenir
longtemps. La solution adoptée est celle de la
vente par appartements : pour la modique somme
de 1,5 million de dollars, ComScore récupère
en juin les 250 clients (ce qui porte son portefeuille
à 450 références) et le panel de
60 000 internautes américains de MMXI.
Dans ce dernier domaine, ComScore
était pourtant déjà bien fournie.
La société dispose d'un panel géant,
baptisé Global Network (ou netScore), composé
d'1,5 million d'internautes. L'acquisition du panel
Media Metrix s'avère surtout hautement stratégique
pour ComScore : si l'échantillon d'internautes
est bien moindre, la méthodologie de traitement
des données obtenues et, surtout, la représentativité
du panel de Media Metrix sont bien meilleures et permettent
d'obtenir des résultats très différents.
Au quantitatif, ComScore ajoute ainsi le qualitatif
afin d'être capable de fournir aux sites et aux
annonceurs des chiffres d'audience indépendants.
Cette nouvelle panoplie
n'empêche pas ComScore d'entretenir son "méga-panel".
L'adhésion au Global Network se fait sur la base
du volontariat : les internautes recrutés
acceptent que l'ensemble de leurs activités en
ligne soit observé et monitoré et ce,
de manière anonyme. Global Network permet de
suivre en détail les évolutions du comportement
des internautes et de leurs attitudes face au commerce
électronique. ComScore commercialise les données
récoltées à des fins marketing.
Loin de vouloir substituer
une méthodologie à une autre, ComScore
a choisi de poursuivre ces deux activités de
manière cloisonnée et de proposer aux
sites une double solution comportementale et de mesure
d'audience. La diversification de ses activités
devrait permettre à l'institut de mesure d'atteindre
la rentabilité.
Fondée en août
1999 par Gian Fulgoni et Magid Abraham, ComScore a levé
depuis sa création pas moins de 76 millions de
dollars auprès de multiple fonds d'investissements
dont Accel Partners, Flatiron Partners, Lehman Brothers
Venture Fund, Topspin Partners ou vSpring Capital. La
dernière levée de fonds (20 millions de
dollars) remonte à juin dernier, adte du rachat
de Media Metrix. Ce tour de table doit permettre à
la société d'atteindre la rentabilité
et de poursuivre sa croissance externe.
Mais la viabilité
de ComScore reste encore à prouver. Si la
société emploie plus de 170 personnes,
ses résultats financiers n'ont jamais été
rendus publics. N'étant pas inscrite en Bourse
(contrairement à Nielsen NetRatings), la firme
reste très discrète sur ses résultats.
Seule indication récente : Daniel Hess,
vice-président de ComScore, a indiqué
dans une interview accordée en juin 2002 au Wall
Street Journal, que ComScore devrait réaliser
près de 32 millions d'euros de chiffre d'affaires
sur le deuxième semestre 2002 et le premier semestre
2003, en incluant les revenus de sa nouvelle division
Media Metrix. Parallèlement, il a repoussé
la rentabilité, au mieux, à début
2003.
L'état des finances
de ComScore reste donc un mystère, même
si courant 2001 et début 2002, la société
a admis qu'elle rencontrait des difficultés financières
en raison de la crise du marché Internet. La
disparition d'une partie de ses clients, victimes du
retournement de conjoncture, a réduit significativement
ses revenus. En fait, seule la confiance de ses investisseurs
a permis à la société de se sortir
de l'ornière.
Autre ombre au tableau
: son développement international. Contrairement
à Nielsen NetRatings, la firme est uniquement
présente sur le continent américain (Etats-Unis
et Canada). L'Europe reste donc le domaine exclusif
de Nielsen, après que l'institut de mesure d'audience
ait racheté son concurrent français, NetValue,
en août dernier. ComScore avait tenté depuis
juin 2001 une entrée sur le Vieux Continent en
formant, justement, une alliance avec Netvalue. L'institut
français pouvait alors accéder aux données
du méga-panel. Certains observateurs avaient
évoqué à l'époque un possible
rachat mais la rumeur a fait long feu. Il est vrai que
le montant déboursé par Nielsen NetRatings
pour l'aquisition de Netvalue, 18 millions d'euros,
allait certainement bien au-delà des possibilités
financières de ComScore. Reste que la société
a perdu ce qui était, peut-être, la dernière
occasion pour s'implanter en Europe.
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