Alexis Le Portz (Clubdeal.com) "Clubdeal s'est repositionné en club privé d'achat de loisirs"

Lancé mi-juin sur le modèle de l'américain Groupon, le français Clubdeal.com propose toujours une bonne affaire par jour mais s'est transformé en site de ventes privées de loisirs haut de gamme, explique son cofondateur.

JDN. Clubdeal.com a ouvert mi-juin mais a déjà beaucoup évolué...

Alexis Le Portz. Lorsque nous avons décidé, en février 2010, de lancer Clubdeal en France sur le modèle de l'américain Groupon - un deal par jour -, il n'existait pas de concurrence sur le marché français de l'achat groupé en ligne. Quand nous avons ouvert le 15 juin, d'autres acteurs venaient de lancer des services très semblables : Groupon en rachetant Citydeal, KGB Deal...Nous n'étions plus qu'un Groupon comme un autre. Nous étions déjà trop nombreux. C'est la raison pour laquelle nous nous sommes repositionnés début septembre.

Les clients de ces sites sont des chasseurs de coupons. Ces sites ne sont attractifs à leurs yeux que par les réductions sur les prix. Le principe que nous avons retenu est le suivant : si nous demandons du marchand partenaire une grosse réduction, il faut que nous puissions en retour le mettre en contact avec des acheteurs de qualité.

En quoi consiste le nouveau Clubdeal ?

Nous avons décidé de changer l'expérience utilisateur pour offrir des prestations de plus grande qualité. Pour l'équipement, il existe Vente-privee.com. Pour le voyage, il existe Voyage-prive.com. Dans les loisirs, la place restait à prendre. Nous avons donc décidé de nous orienter dans cette direction et de "fermer" notre site aux non-membres. Ce fonctionnement en club privé nous donne accès à des marchands que nous n'avions pas pour partenaire auparavant, car ils préfèrent garder privées les réductions qu'ils concèdent ponctuellement.

A votre lancement, vous annonciez des ouvertures prochaines dans un grand nombre de villes de France. Où en êtes-vous ?

"Nous tablons sur un chiffre d'affaires de 5,5 millions d'euros en 2011"

Pour l'instant nous proposons des offres sur Paris et nous préparons l'ouverture du service à Marseille et à Lyon début 2011. C'est une extension plus lente qu'initialement prévu, mais plus adaptée à notre nouvelle stratégie. Au début, nous pensions comme Groupon nous installer dans un maximum de villes, puisque nous proposions des offres très locales. Désormais, nous réfléchissons davantage en terme de grande ville, voir de région, pour par exemple vendre aux Parisiens un weekend en relais-château en dehors de la capitale. Nous envisageons même avec certains prestataires de proposer des offres sur-mesure. Nous ne subissons plus l'urgence du début. Notre base d'utilisateurs se construit plus lentement, mais elle appartient à une population très CSP+, qui a une propension élevée à revenir et à dépenser plus.

Récemment, de nombreux marchands US ont affirmé que travailler avec Groupon leur faisait perdre beaucoup d'argent. Votre sentiment ?

Notre but n'est pas d'étouffer nos prestataires. Nous commençons par toucher le montant total de la transaction. Dans la semaine qui suit la prestation, nous transférons 50 % au marchand. A la date de fin de validité de l'offre, nous lui envoyons le solde moins la commission, qui est comprise entre 20 et 30 %. Ainsi, le prestataire dispose d'une avance de trésorerie et de notre côté, nous pouvons nous assurer que le service a été bien réalisé et que le client est satisfait.

Y a-t-il de la place pour tous les acteurs du marché de l'achat social en ligne ?

Avec ses 500 millions de membres, Facebook l'a prouvé : le modèle social s'est imposé. Cela va avoir des incidences fortes sur l'e-commerce. Or il ne s'agit pas d'un modèle de plate-forme comme eBay où le plus gros acteur rafle tout. Aux Etats-Unis par exemple, Living Social, qui par ailleurs a levé beaucoup d'argent, est quasiment aussi gros que Groupon. LetsBuyIt est également un acteur important. En France, Groupon-Citydeal est le numéro un devant KGB Deals, puis Dealissime et nous. Nous comptons désormais 20 000 membres. Nous visons toujours l'équilibre pour la fin 2010. Notre chiffre d'affaires 2010 sera de 180 000 euros et nous tablons sur 5,5 millions d'euros pour 2011. Nous sommes en train de lever des fonds, ce qui devrait être achevé dans deux mois.

Quels sont vos axes de développement ?

Nous travaillons sur une version mobile du site, qui renforcera le côté club privé. Nous l'utiliserons pour animer la communauté française puis européenne de Clubdeal. Aux Etats-Unis, Groupon s'est forgé une identité de défenseur du pouvoir d'achat. Pour notre part, nous voulons créer un sentiment d'appartenance à un club, une communauté européenne d'acheteurs, regroupant des personnes qui travaillent beaucoup, gagnent de l'argent et auprès de qui nous servons de prescripteurs d'idées loisirs. Dès 2011, nous attaquerons les grandes villes européennes.

En outre, nous allons développer des fonctionnalités sociales sur le site. Les utilisateurs pourront savoir ce que leurs amis ont acheté, ce qu'ils recommandent... Les loisirs s'y prêtent très bien : on ne va pas au théâtre tout seul.

Alexis Le Portz est cofondateur de ClubDeal avec Nicolas Guyon et Laure de Baudreuil. Diplômé de l'ESCP Europe en 2005, il rejoint l'équipe de Skype France en tant que responsable du développement. Il décide ensuite de suivre les fondateurs de Skype dans leur nouvelle start-up, Joost, et rejoint à Londres l'équipe marketing. De retour à Paris en 2008, il fonde la société de conseil en communication et marketing web Wired Media. En Février 2010, il décide avec Nicolas Guyon et Laure de Baudreuil de lancer ClubDeal.com, qui ouvre ses portes le 15 juin 2010.