La fin du mythe de l’Internet gratuit

On a vu ces derniers jours un certain nombre d'annonceurs et d'observateurs s'étonner de ce que Facebook commence à monétiser la parution de messages destinés aux fans de la marque ou de l’entreprise en question.

Cet épisode, fortement médiatisé et commenté en raison de l’enjeu de ce changement sur la performance boursière du géant américain, vient surtout mettre un terme à un mythe tenace : celui de « l’internet gratuit ».

A la grande époque de la « Bulle » des années 1990, on pouvait imaginer lancer un site internet depuis sa chambre d’étudiant, en comptant sur son garage pour stocker la marchandise, et en pariant sur le bouche-à-oreille ou sur quelques parutions dans la presse pour atteindre un public d’internautes initiés. Aujourd’hui, une telle péripétie n’est plus envisageable. Ce mythe est coriace mais cette époque est – hélas – révolue aujourd’hui.
Si la partie technique peut encore, à la rigueur, sortir de l’imagination d’un jeune prodige du développement, le nouvel entrant fait inévitablement face à la problématique de l’acquisition d’audience, forte barrière à l’entrée du monde numérique. L’audience digitale est en effet devenue une ressource finie, rare et extrêmement compétitive. Comme tous les marchés en maturation, celui-ci s’est récemment concentré et se scinde en cinq grands domaines.
Quels sont les ressorts économiques de chacun ? Peut-on prédire leur évolution ?

1. Le référencement naturel : il semble effectivement gratuit d’apparaître en premier dans les résultats des moteurs de recherche… En apparence seulement ! Mois après mois, les candidats au référencement sont de plus en plus nombreux et la 1ère page de Google ne comporte toujours que 10 résultats ! Pour y accéder, il faut, outre un site techniquement parfait, savoir générer un contenu authentiquement intéressant, sans cesse renouvelé et vraiment utile. Peu de chance d’y parvenir sans dédier des équipes de qualité à cette tâche.

2. La publicité en ligne / l’achat de mots-clés : manifestement payant, la loi de l’offre et de la demande l’amèneront plutôt à s’apprécier qu’à se déprécier dans les années à venir. L’offre d’espaces de qualité est inévitablement amenée à se concentrer avec, outre l’inévitable Adwords de Google, une poignée de régies spécialisées disposant d’un trafic suffisamment important pour être très pertinentes dans leur domaine (web-to-store, couponing, etc.)

3. Les réseaux sociaux : les marques avaient déjà compris que la « course au fan » n’avait rien à envier aux budgets de certaines courses sportives… Et pour enfoncer le clou, Facebook nous a donc rappelé la semaine dernière qu’il était bien, in fine, le propriétaire des centaines de millions d’internautes fréquentant chaque jour ses pages. Les marques peuvent y louer un espace d’expression et l’exploiter proportionnellement au budget qu’elles souhaitent y consacrer.

4. Les mobiles : avec plus d’1 million d’applications référencées dans les App Stores, et quelques 70 applications embarquées dans un smartphone moyen, l’art de faire émerger son application propre de ce magma constitue une vraie gageure. Le marketing de ces applications deviendra donc un véritable enjeu d’avenir… et là encore, Facebook, qui dispose d’une des rares applications ayant un cas d’utilisation extrêmement fréquent, a parfaitement identifié cette tendance en choisissant la promotion d’applications pour monétiser son audience mobile.

5. Le trafic direct : en voilà enfin un qu’on ne paye manifestement pas… et pourtant, que serait ce dernier sans les investissements de notoriété de la marque ? sans les campagnes de télévision ? Sans le programme CRM ou les emailings qui font revenir les internautes ?

On le voit donc bien, le marketing en ligne s’annonce comme une discipline riche, experte, très diverse, et qui sera cruciale pour l’acquisition de parts de voix dans un monde numérique encombré et compétitif. Facebook vient d’en verrouiller les derniers volets gratuits… et au cas où certains se poseraient encore la question : ce n’est qu’une question de mois avant que Twitter – dernier bastion de l’audience massive et gratuite – ne prenne des mesures similaires à celles de son frère ennemi.