Traité transatlantique : l'Europe doit mettre en place une réelle stratégie numérique européenne

Si le volet culture avait été écarté in extremis l'an dernier des négociations du traité de libre échange entre l'Europe et les États-Unis, les discussions actuelles sur les enjeux numériques devrait donner les orientations liées à la protection des données personnelles, à la surveillance numérique ou l'accès aux marchés publics.

Si les États-Unis partent avec une longueur d'avance dans ce rapport de force, l'Europe doit saisir l'occasion d'affirmer ses positions en matière d'économie numérique. Elle doit aussi se donner les moyens de soutenir ses acteurs de poids pour contrebalancer l'hégémonie américaine des majors du Web.

Le CNN s’inquiète sur l'Europe

Début mai 2014, le Conseil National du Numérique (CNNum), qui donne ses recommandations au gouvernement sur les thématiques numériques, a rendu son avis sur les négociations en cours du traité transatlantique. Le CNNum s’inquiète notamment du retard pris par l'Europe dans les négociations face a des américains bien mieux préparés. Benoit Thieulin, président du CNNum, dénonce le manque de préparation des Européens : « La Maison Blanche est arrivée à la table des négociations en position de force sur le numérique. Les Américains avaient consulté tout l’écosystème numérique, des universités aux entreprises, pour préparer leurs revendications. En face, l’Europe n’a pas encore la même expertise, ni la même ambition. » Un retard préjudiciable pour les européens qui auraient tout à gagner à mettre en place une réelle stratégie numérique : "Il est urgent que l’Union européenne, eldorado du numérique, où la valeur totale des données personnelles de ses 500 millions de consommateurs représente près de 315 milliards d’euros, se dote d’une stratégie numérique et des moyens de la mettre en œuvre" poursuit Benoit Thieulin.
Aujourd'hui l'Europe a encore du retard sur les Etats-Unis en terme de d'économie numérique.
La France, par exemple, ne pointe qu'à la 19ème place du classement des pays bénéficiant d'un "environnement numérique" de qualité, publié début janvier par le Boston Consulting Group.
Une place bien loin de celles qu'elle pourrait escompter qui s'explique largement par le manque de soutien des institutions publiques en faveur du développement numérique de notre pays. Le Conseil National du Numérique précise ainsi que « bien que l'Union maîtrise toutes les technologies du numérique et soit même à l'origine d'une grande partie d'entre elles, les États-Unis disposent d'une avance commerciale et intellectuelle fondée sur une vision à long terme ».
Dans un entretien au Figaro, Jean-Michel Quatrepoint, journaliste économiste, est ainsi partisan d'un rapprochement entre différent acteurs de l'économie numérique européennes : « Notre seule chance aujourd'hui est de créer des emplois à valeur ajoutée dans le domaine de l'économie numérique, ce que j'appelle «Iconomie», c'est-à-dire la mise en réseau de toutes les activités ».

Soutenir les champions du numérique européen

Pour rivaliser avec les géants du numériques américains, tels Google, Apple ou Netflix, une consolidation du secteur à l'échelle européenne est nécessaire en faisant émerger des acteurs de poids de l'économie numérique européen qui soit aussi bien producteur de contenu que diffuseur. En Europe peu d'acteurs peuvent se targuer de jouer sur ces deux tableaux : les groupes Bertlesmann et Vivendi sont de ceux la. Le français propriétaire des chaînes Canal+ ou D8 est aussi producteur de contenu avec Studio Canal et Universal Music, premier producteur mondial de musique. En entrant au capital de Dailymotion, comme le rapporte le Financial Times, il se développerait sur le segment de la diffusion numérique.
L'Europe aurait ainsi tout intérêt de se donner les moyens de promouvoir son économie numérique et de soutenir les entreprises du secteur : le traité transatlantique devrait être l'occasion de promouvoir notre économie numérique et éviter une main mise des américains dans ces négociations.