Pourquoi interdire les smartphones à l’école n’est pas une bonne idée

Les smartphones pourrait devenir de véritables outils numériques pour l'éducation nationale, qui aideraient les élèves à apprendre plus vite.

Mi-septembre, Jean-Michel Blanquer, ministre de l’Éducation nationale, a annoncé les changements qui interviendront en primaire et au collège à la rentrée prochaine. Parmi ceux-ci, il entend interdire les smartphones à l’école. Néanmoins, à l’heure où l’État et les collectivités territoriales cofinancent le plan numérique qui a déjà équipé 175 000 élèves de tablettes, ne vaudrait-il pas mieux privilégier le smartphone comme outil numérique ? Plus inné, plus accessible, moins coûteux, c’est un outil qui offre de nombreux avantages pour les élèves, pour l’éducation et pour l’État. Car oui, les élèves sont capables d’utiliser leurs téléphones pour autre chose que Snapchat.

Depuis le début des années 2000, le numérique a pris une part importante dans l’éducation. D’abord utilisé dans l’enseignement supérieur, il s’est ensuite démocratisé dans le secondaire puis le primaire, en même temps que les comportements sociétaux changeaient, jusqu’à trouver sa place dans les écoles maternelles. En 10 ans, le nombre de terminaux numériques a très fortement augmenté, les supports se sont multipliés et diversifiés. TBI, tablettes... Grâce au numérique actuel – et c’est particulièrement vrai pour les smartphones – on dispose de bien plus de puissance en un terminal que dans les ordinateurs d'il y a à peine dix ans.

Le smartphone peut-il être un outil de base de l’éducation digitale ?
Historiquement, l’Éducation nationale française a toujours redouté que les usages positifs des évolutions soient outrepassés par les usages négatifs. Autrement dit, il y a de fortes chances qu’un pré-ado passe plus de temps sur Facebook que sur son exercice, si l’accès au réseau social lui est laissé. Vaut-il mieux interdire qu’encadrer ? Après le TBI, l’ordinateur et la tablette, le smartphone, qui concentre de plus en plus de fonctionnalités et qui gagne en ergonomie au fil des modèles, se présente comme l’extension à intelligence ajoutée des individus. Et pourquoi n'irait-il pas jusqu’à assister les élèves dans leur apprentissage ?
Un coût et des usages avantageux
Alors que l’État a choisi d’équiper les collèges de tablettes, les smartphones représentent déjà un support acquis par les familles : plus de 85 % des collégiens en possèdent un. Et si le smartphone devenait la fourniture scolaire de demain, au même titre qu’une calculette ou qu’une paire de baskets ? Un système de bourse permettrait d’équiper les 15 % restants, et offrirait à l’Éducation nationale un lifting non négligeable : dématérialiser les livres scolaires serait désormais possible, et permettrait à la fois des économies pour la collectivité, davantage de confort pour les élèves et, surtout, un apprentissage individualisable.
Le numérique permet l’apprentissage à plusieurs niveaux
C’est tout l’atout du numérique appliqué à l’éducation : être capable d’enseigner un même cours à plusieurs niveaux sans jamais perdre ses élèves en route. Les parcours d’apprentissage adaptatifs, qui seront bientôt en place, permettent en effet de faire progresser l’élève plus rapidement selon son acquisition des compétences, ou au contraire de se focaliser sur une leçon qui n’est pas bien comprise. Ainsi, les enseignants peuvent consacrer plus de temps aux élèves qui en ont besoin et leur donner plus de chances de réussir.

Entre 2012-2014, un lycée de Trappes a expérimenté une solution numérique pour élever son taux de réussite au bac qui ne dépassait pas les 64 %. Avec la mise en place de classes inversées, soutenues par des outils numériques, le lycée a fait progresser ses élèves jusqu’à atteindre un taux de 88 %, et à obtenir la première place dans le classement des lycées à valeur ajoutée.

Là où les pays européens sont entrés dans le numérique éducatif par la pédagogie, la France l’a d’abord utilisé pour l’administratif. L’école ne doit pas être un sanctuaire : il est temps d’intégrer cet outil au cœur du projet pédagogique et d’apprendre aux élèves à s’autoréguler plutôt que de craindre leur soif de divertissement. De nombreux exemples font de sa mise en place un succès, et son importance au sein de la société en fait un outil fondamental pour les jeunes générations. Croire que l’on peut empêcher les smartphones de jouer leur rôle au sein de l’école est illusoire : mieux vaut accompagner le changement plutôt que l’interdire.