A partir de lundi, les abonnés mobiles pourront changer
d'opérateur en moins de 10 jours tout en conservant leur numéro. Une facilité
qui pourrait relancer la concurrence dans le secteur. (21/05/2007)
Initialement prévue pour janvier dernier, la portabilité du numéro mobile démarre
le lundi 21 mai. En pratique, cette portabilité permet à un abonné de résilier
son contrat et de changer d'opérateur en 10 jours maximum (ou de 7 jours, hors
jours fériés), tout en conservant son numéro. Jusque-là, changer d'opérateur tout
en conservant son numéro pouvait prendre jusqu'à deux mois, par chance l'opérateur
d'origine ne perdait pas le dossier en route.
Principal atout du dispositif, il permet de centraliser la demande des abonnés.
Le nouvel opérateur fera ainsi office de guichet unique, et agira à la place du
client pour résilier sa ligne. Ce qui évitera à l'abonné d'envoyer un courrier
recommandé pour se désabonner et d'attendre un retour de son opérateur. En outre,
les opérateurs ouvrent des serveurs vocaux à disposition de leurs abonnés afin
de leur faciliter la tache. En appelant un numéro gratuit, ces derniers pourront
obtenir un "relevé d'identité opérateur" (un numéro unique attribué à chaque ligne),
nécessaire pour activer la demande de portabilité. Le serveur vocal préviendra
aussi si l'abonné est, ou non, encore lié par une durée d'engagement.
Changer d'opérateur mobile tout en conservant son numéro était déjà possible
pour les plus courageux depuis juin 2003. Mais depuis cette date, moins d'un million
d'abonnés, sur les 50 millions de clients mobiles, ont franchi le pas. S'il est
difficile de prédire quelles conséquences la portabilité simplifiée du numéro
aura sur le marché, il risque néanmoins d'accroître le taux de churn du marché.
Que se soit du côté des 3 principaux opérateurs, Orange, SFR et Bouygues Télécom,
dont certains clients pourraient être attirés par les MVNO, mais aussi chez les
MVNO eux-mêmes, dont les abonnés pourraient passer de l'un à l'autre en faisant
la chasse aux meilleurs tarifs.
Au Japon, la mise en place d'un système de portabilité du numéro mobile a conduit
le leader du secteur, NTT Docomo à perdre des abonnés pour la première fois depuis
sa création, il y a quatorze ans. Un mouvement qui a grandement profité à son
challenger, KDDI, puisque 325.000 des 680.000 abonnés mobiles ayant fait porter
leur numéro au mois de novembre 2006, l'ont choisi.
Selon Jean-Louis Constanza, le fondateur de Ten, "L'effet sera sans doute un
peu plus important sur le marché des entreprises et des professionnels. Pour le
grand public, le taux de churn devrait augmenter de 1 ou 2 %, mais pas beaucoup
plus". Une posture qui conduit le MVNO à ne pas se presser pour mettre en place
la portabilité du numéro. Aussi, Ten, comme Mobisud et Transatel ne proposeront
cette option que durant l'été, avec quelques semaines de retard sur leurs concurrents.
Le numéro un du marché, Orange ne prévoit pas non plus d'activer ses efforts
pour conquérir de nouveaux clients au démarrage du dispositif. Ni offres spéciales,
ni efforts marketing particuliers ne sont prévus. L'opérateur se veut confiant,
mettant en avant un taux de churn parmi les plus bas d'Europe. SFR, par contre,
en profite pour lancer de nouveaux forfaits, baptisés "SFR 100 %", qui doublent
le temps de communication du forfait choisi pour les appels vers 3 numéros, quel
que soit l'opérateur.
De l'avis d'Edouard Dormoy, responsable des relations opérateurs chez The Phone
House, le bénéfice utilisateur engendré pourrait fortement dynamiser la migration
d'abonnés d'un opérateur à l'autre. "Le panel de choix de forfaits pour un client
va s'élargir à toutes les offres opérateurs puisqu'il pourra en changer en tout
simplicité à la fin de sa période d'engagement. En outre, cela sera plus avantageux
pour lui de passer chez un autre opérateur puisqu'un nouvel abonné bénéficie d'offres
plus intéressantes qu'un ancien abonné qui n'a qu'une réduction correspondant
à ses points de fidélité s'il veut changer de portable. Cependant, on ne peut
pas savoir à l'avance qu'elles seront les conséquences de la portabilité. Les
trois principaux opérateurs n'ont d'ailleurs pas intérêts à communiquer dessus.
Cela dépendra en grande partie du traitement de l'information par les médias grands
publics, car aujourd'hui, les gens ne sont pas au courant de la portabilité. Mais
le potentiel est très important, car 25 % des abonnés mobiles en France ne sont
plus tenus par aucun engagement."
Si les opérateurs restent prudents quant aux conséquences de la portabilité
du numéro sur le marché, ils ont néanmoins vu grand en ce qui concerne l'outil
informatique reliant les systèmes d'informations des opérateurs mobiles installés
à l'occasion. En effet, celui-ci a été développé dans l'optique de pouvoir assurer
6 millions de portages de numéros par an. C'est-à-dire de faire face à un taux
de churn de 12 %. Même s'ils n'y croient pas, les opérateurs sont néanmoins prêts
à faire face à une révolution du marché du mobile en France.