INTERVIEW
 
07/12/2007

"Le mobile est le seul média qui échappe à la fragmentation de l'audience"

SFR a créé en juin sa propre régie publicitaire pour offrir aux marques une visibilité directe auprès de ses 18 millions de clients. Objectif : prendre une part conséquente du marché français de la publicité sur mobile, estimé à 400 millions d'euros en 2012.
 EnvoyerImprimer 

 
Patricia Levy
 
 
  • Directrice générale de SFR Régie
 

(Interview modifié le 07/12/2007 à 9h00) SFR a annoncé en juin dernier la création de sa propre régie sur l'Internet mobile, dont vous avez pris la direction. SFR ne commercialisait-il pas déjà des publicités sur mobile ?

Si, il s'agissait auparavant d'un projet expérimental : nous commercialisions essentiellement des bandeaux avec lien cliquable sur le portail Vodafone live et sur Gallery. Notre ambition désormais est de passer à la vitesse supérieure, d'industrialiser le marché de la publicité sur mobile. L'idée de la nouvelle régie publicitaire de SFR, baptisée "Premier Ecran", est d'associer les marques à tous les points de rencontre entre SFR et ses abonnés : le mobile, notre site SFR.fr et notre magazine de consommateurs, le Minimag.

 

Pourquoi l'avoir baptisée Premier Ecran ?

Le premier écran, c'est le mobile. C'est le seul média qui échappe à la fragmentation de l'audience, c'est donc le relais idéal de tous les plans médias. L'écran du mobile, c'est celui avec lequel les Français se réveillent le matin, qui les suit toute la journée dans leurs activités professionnelles et personnelles.

 

Cela fait déjà plusieurs années que l'Internet mobile existe, notamment chez SFR, ou que le SMS est utilisé comme levier de marketing direct. Pourquoi avoir attendu 2007 pour créer votre propre régie et promouvoir auprès des annonceurs la publicité sur mobile ?

Nous avons attendu que le marché devienne mature. Il nous a paru plus judicieux de créer une régie alors que toutes les conditions favorables du marché sont désormais réunies : une audience et des usages de l'Internet mobile, des terminaux adaptés, des annonceurs et des utilisateurs qui acceptent aujourd'hui de vivre avec de la publicité sur leur mobile. Auparavant, le marché de la publicité sur mobile se limitait au display (affichage de bannières) et n'était alimenté que par les éditeurs de contenus. Nous étions dans un modèle type minitel. Aujourd'hui, le mobile devient le support de l'ensemble des opérations de cross média : display bien sûr, mais également pull et push.

 

"Le marché français de la publicité sur mobile devrait peser 400 millions d'euros en 2012."

Qu'entendez-vous par un marché mature ?

Le marché de la publicité sur mobile démarre aujourd'hui dans tous les pays et affiche un très fort potentiel de croissance. Selon eMarketer, le marché mondial de la publicité sur mobile devrait atteindre 14 milliards d'euros en 2012, contre deux milliards en 2007. La part estimée du marché publicitaire français est de 3 % du marché mondial, soit 400 millions d'euros en 2012.

 

Quelle part de ce gâteau de 400 millions d'euros visez-vous ?

Ce qui est certain, c'est que le marché ne sera pas uniquement divisé entre les trois opérateurs. Il y aura d'autres acteurs comme MSN, Nokia, etc.

 

Et Google sur le search pour l'Internet mobile ?

Aujourd'hui, Google n'a pas de poids sur le marché français des liens sponsorisés sur mobile, dominé par les trois opérateurs qui opèrent leur propre moteur de recherche sur Gallery. Mais à n'en pas douter, Google va arriver sur le marché. Il faut toutefois savoir qu'un moteur de recherche Web ne peut pas se décliner à l'identique sur le mobile. Les modes de recherche sont totalement différent : le mobinaute ne tape pas une série de mots clés comme l'internaute mais les trois ou quatre premières lettres d'un mot. L'indexation des pages et les résultats doivent donc se faire à partir de la racine des mots. Aujourd'hui, il n'existe pas encore de moteur de recherche sur mobile aussi performant que sur l'Internet fixe.

 

Donc vos objectifs en termes de part de marché de la publicité sur mobile ?

C'est encore trop tôt aujourd'hui pour donner des objectifs chiffrés. Car des questions subsistent sur la taille et les contours exacts de ce marché d'ici 2012, concernant le développement des usages des consommateurs, le développement et la valorisation des différentes offres, et surtout le périmètre du marché : ces revenus incluront-ils le push (marketing direct par SMS, MMS) ou les nouvelles plates-formes de codes barre 2D ?

Quoi qu'il en soit, notre part de marché va dépendre de la nature et la qualité des bases de données des autres acteurs. Sur le display, cela dépendra de la fiabilité de l'audience de l'Internet mobile. C'est pourquoi nous développons, avec notre prestataire Sofialys, notre propre outil d'ad serving pour l'Internet mobile.

 

"Créer une supériorité de marque par l'innovation sur mobile."

Quels types d'offres de campagnes de marketing mobile seront commercialisés par Premier Ecran ?

Du push (SMS, MMS) via notre base de contacts opt-in Promoslive, du display sur le portail Vodafone live et toutes ses chaînes spécialisées, mais aussi des campagnes sur mesure pour nos annonceurs. Notre volonté est de créer une supériorité de marque par l'innovation sur mobile.

Par exemple, nous proposons aux annonceurs de diffuser des vidéos publicitaires ou de démonstration sur le Kiosque Visio et de créer du trafic vers cet espace en utilisant tous les points de rencontre entre SFR et ses clients : MMS, SMS, présence publicitaire sur nos portails Web et mobile, écrans des espaces de vente SFR, publicité dans le Minimag, etc. Autre exemple : nous offrons à une marque la possibilité de développer une proximité quotidienne avec sa cible en sponsorisant des alertes météo, horoscope, conseils beauté, etc. Nous pouvons également proposer aux marques de s'associer à l'univers de la musique sur SFR, en offrant par exemple le téléchargement gratuit de titres sur l'espace "Découvertes SFR Music".

Notre souci est d'élaborer des recommandations sur mesure pour les annonceurs dans le sens de l'amélioration de l'expérience de nos clients mobiles.

 

Quelle est l'audience des médias vendus par la régie SFR ?

La régie SFR c'est : 800.000 inscrits aux alertes dans notre base de marketing direct ; 2,5 millions de visiteurs uniques sur le site SFR.fr ; 7 millions d'exemplaires du Minimag distribués par mois ; 4,2 millions de visiteurs uniques et 35 millions de PAP par mois sur le portail Vodafone live.

 

"Ce qui coûte cher sur le mobile, c'est la qualité du contact"

Le mobile est réputé pour ses taux de clics plus élevés mais également pour plus coûteux que sur l'Internet. Est-ce pour cela selon vous que les annonceurs hésitent encore à investir sur le média ?

Effectivement, le CPM moyen sur le mobile est de 15-16 euros, contre 5 euros en moyenne sur l'Internet. En contre partie, le taux de clic varie entre 0,9 et 3,5 %, voire 5 %, sur des campagnes de bannières, contre moins de 0,5 % sur le Web ; sur notre base Promoslive, le taux de clic sur les alertes SMS/MMS oscille entre 4 et 20 %. Ce qui coûte cher sur le mobile, c'est la qualité du contact.

 

De tels chiffres ne convainquent pas encore les annonceurs ?

Quand nous avons lancé la régie Premier Ecran, 100 % de nos annonceurs étaient des éditeurs de contenus sur mobile. En six mois, leur part a baissé à 80 %, soit 20 % d'annonceurs traditionnels, de marques. Oui, il y a une appétence forte des annonceurs traditionnels pour le média, mais pas toujours avec les bonnes recettes.

Les agences médias ont tendance à répliquer les recettes du Web, à savoir acheter des parts de voix sur les sites et portails. Or cette pratique est impossible, voire hérétique sur le mobile car le mobinaute ne revient pas aussi fréquemment sur les sites mobiles que l'internautes sur les sites Web. C'est pourquoi nous conseillons aux annonceurs d'acheter une présence beaucoup plus forte mais sur des délais plus courts. On ne construit pas une campagne de marketing mobile dans une logique de PAP mais de points de contact avec une communauté.

 

Quel est le coût moyen d'une campagne de publicité sur mobile ?

Ces chiffres varient bien sûr d'une campagne à l'autre mais en moyenne, environ 30.000 euros pour une campagne de bannières et au moins 50.000 euros pour une campagne cross média (display et push).

 

La régie Premier Ecran est-elle rentable pour SFR ?

La régie est naissante. Elle génère du chiffre d'affaires.

 

 
En savoir plus
 
 
 

 

Le développement du off portal, avec des marques comme Yahoo, MSN ou même Nokia qui sont désormais présentes sur le mobile, ne menace-t-il à terme pas l'activité de la régie SFR, et plus généralement des régies internes des opérateurs mobiles ?

Aujourd'hui, les portails des opérateurs mobiles génèrent encore plus de 90 % du trafic de l'Internet mobile. Donc pour créer de l'audience vers les sites off portail, il faudra de toute façon faire de la publicité sur les portails des opérateurs, au moins pendant quelques années encore. Après, nous verrons bien. Ce qui est certain, c'est que de part leur longue expérience des clients, les portails des opérateurs offrent une richesse et une qualité des contenus encore inégalées. La force d'un opérateur mobile, ce n'est pas de fermer la porte à la concurrence, mais de mieux connaître les besoins et attentes de ses clients.

 


Parcours

Patricia Lévy, 40 ans, a été nommée directrice générale de SFR Régie en octobre 2007, la régie marketing mobile de SFR.

Patricia Lévy a débuté sa carrière en 1988 au sein de l'agence RSCG en tant que chef de publicité. Elle a rejoint SFR en 1999 au planning stratégique. Elle a créé en 2001 la direction de la marque et de la publicité, chargée de faire de la marque SFR un élément de compétitivité et un actif fort de l'entreprise. Cette nouvelle activité, relais de croissance de l'entreprise, offre aux marques une visibilité directe auprès des clients SFR, via leur mobile.

Patricia Lévy est titulaire d'une maîtrise de gestion de l'Université Paris Dauphine et d'un DESS du CELSA.



Sommaire MobileEnvoyerImprimerHaut de page

Sondage

La Commission Européenne aurait-elle raison d'obliger les navigateurs à bloquer les cookies par défaut

Tous les sondages