Journal du Net > Economie  Untitled Document > Qui est Albert Frère?

Premier actionnaire de Suez. Premier actionnaire de Total, Premier actionnaire d'Imerys, le groupe Flo, Entremont, M6, Lafarge. Albert Frère est partout. Et c'est sans faire de bruit qu'il est devenu en moins de vingt ans le principal actionnaire privé du CAC 40. Malgré cet imposant statut, l'homme d'affaires reste très discret et ce n'est que très rarement qu'il accorde des interviews.

Photo © DR/CNP

Il préfère tirer les ficelles dans l'ombre. Et à 81 ans, il ne s'en lasse pas. "Quand les patrons français parlent, Albert Frère compte" ironise José-Alain Fralon, auteur d'une biographie sur le Carolo qui a mis un terme au mythe du fils de marchand de clous. Une légende que l'homme d'affaires a volontiers laissé courir pendant plusieurs décennies dans la région de Charleroi.

Un formidable commerçant

Si la réalité est plus prosaïque, elle révèle en tout cas la volonté d'un homme qui s'est hissé au sommet du capitalisme en partant de rien. Après la seconde guerre mondiale, il entre dans la petite société familiale, la maison Frère. Située dans les faubourgs de Charleroi, elle fabrique des petits articles métalliques: chaînes, clous et ferronnerie. Acheter la matière première et vendre la production, Albert adore. Le jeune Frère a alors une intuition: le commercial. Il sera le premier de la filière à se lancer dans l'export, à faire de la prospection pour trouver de nouveaux clients. A l'étranger surtout. Son affaire s'envole au moment de la guerre de Corée, en 1950. Il y a pénurie de matière première. Les cours flambent, les commissions touchées à la vente aussi. Et le jeune Frère commence à faire sa pelote. Fort de ce succès, il commence à 28 ans à prendre des participations dans des sociétés sidérurgiques du triangle de Charleroi. Jusqu'à diriger la deuxième entreprise du secteur. Mais c'est toujours la commercialisation de l'acier qui reste son activité la plus lucrative.


Paradoxalement, c'est la crise de la sidérurgie qui va faire de lui un homme riche. A la fin des années 70, l'Etat belge renfloue les mastodontes déficitaires, tandis qu'Albert Frère continue de percevoir de conséquentes commissions sur les ventes. Sa société est en position de quasi monopole quand en octobre 1983, le français Jean Gandois, chargé par le gouvernement de sauver du naufrage complet l'acier national, négocie avec lui le rachat de sa société, Frère Bourgeois. A la clef, l'industriel-commerçant touche un chèque de 925 millions de franc belges (160 millions d'euros). Ce sera la mise de départ d'Albert Frère pour entrer définitivement dans le milieu de la finance. Un exercice auquel il se frotte déjà depuis quelques années comme pilier de la filiale belge de la banque Paribas. Mais en 1981, l'établissement de la rue d'Antin est en ligne de mire pour être nationalisé. Les participations d'Albert Frère sont menacées. Pour y échapper, il va mettre en place l'opération Arche de Noé afin de prendre le contrôle de la filiale. Si c'est finalement un échec, les circonstances donnent naissance à Pargesa, une des deux holdings du belge, qu'il détient à 50/50 avec un autre homme d'affaire le canadien Paul Desmarais.


224ème fortune mondiale, selon le magazine Forbes, Albert Frère est souvent comparé au multimilliardaire américain Warren Buffett. Même âge, même aversion pour les valeurs technologiques, même intuition. Qu'il achète, d'autres achètent. Qu'il vende, ils vendent.

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