Les
demandes de départ en pré-retraite sont un signe parmi tant d'autres. Découragement,
démotivation, désengagement... La valeur travail est indéniablement sur la sellette.
Pourtant, plusieurs enquêtes montrent que les Français sont très attachés au travail.
Alors pourquoi cette grosse déprime ? Un économiste, un philosophe et un homme
politique répondent.
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Taux de chômage supérieur à celui des autres pays développés,
taux d'emploi dix points inférieur à celui de l'Europe du Nord
la France apparaît comme un pays où l'on travaille moins qu'ailleurs.
L'avènement de la société des loisirs détournerait-elle
les Français du travail ? Sont-ce les contraintes du droit et de la fiscalité
qui, seules, freinent la croissance des entreprises ?
Thomas Philippon, économiste à la Stern School of Business de
New York, a analysé les données de plusieurs enquêtes comparant
la France au reste du monde. Sa première conclusion est que les Français
accordent plutôt plus d'importance au travail que les autres Européens
et que les rigidités institutionnelles n'expliquent pas tout. Le point
de départ d'une thèse sur la crise française du travail,
imputable selon lui à des relations hiérarchiques marquées
par l'insatisfaction et la méfiance.
Jean-Marie Bergère, philosophe et directeur de l'association d'entreprises
Développement et Emploi, partage ce constat. Il assure même que la
crise du travail est d'autant plus forte que la valeur travail restant, depuis
le XVIIIe siècle, profondément ancrée comme extrêmement
positive, sa confrontation avec le réel est dévastatrice.
Enfin, l'analyse d'un homme politique éclaire le débat d'une
lumière inattendue. Le Britannique Tony Blair, dans son discours de fin
de mandat de Premier ministre, définit la valeur travail de la génération
à venir. Une vision qui permet de reconsidérer notre clivage droite-gauche
en la matière. Et qui donne une bonne idée de la direction vers
laquelle nos gouvernants souhaitent voir évoluer la valeur travail.
Voici le regard de trois hommes, mais aussi de trois disciplines, sur la valeur
travail aujourd'hui et sur les solutions pour, petit à petit, venir à
bout d'une crise dont les enjeux sont, de leur avis même, aussi importants
que sous-estimés.